
« Nous sommes une génération qui n’a rien vécu, rien! ». Une troupe d’acteurs s’enferment dans une cave (pour de faux) pendant quatre ans, et s’exclue du monde pour y faire le spectacle qui changera le monde, ou du moins "essayer". La compagnie chilienne Re-sentida , un jeu de mot entre l’adjectif resentida (faché) et le verbe sentir questionne (pour de vrai) la nécessité de faire du théâtre aujourdhui.Quelle représentation pour sortir le public d’une léthargie désabusée ? Comment créer les formes qui le secoueront ? «Quand l’anticonformisme ne suffit plus, quand l’avant-gardisme est inefficace ? Il faut faire la révolution ! » proclame l'un des acteurs. La névrose est collective, le désenchantement aussi. Pinochet est mort, la dictature militaire a fait place à un ennemi bien plus sournois qui opère mondialement: la société de consommation. Du fond de leur tanière, ils ont tout lu, ou presque, le plateau jonché de livres, le mur de fond de scène, couvert de milliers de pages (magnifique installation sublimement éclairée) en témoignent. Camus, le Che , Duchamps ou Jean-Claude Vandamme ? A quels saints se vouer ? Les idées fusent : le spectacle pour changer le monde pourrait se faire avec de vrais enfants africains faméliques le visage couvert de mouches mortes par exemple ? Mieux, encore mourir sur scène, pour de vrai, le sacrifice, ça ce serait vraiment quelque chose. Oui mais qui va se sacrifier ? l’un d’eux s’imagine déjà boire de l’essence et craquer l’allumette de son immolation. Si certains l’ont fait « pour de vrai » déclenchant la révolution de jasmin en Tunisie, sur la scène, la révolution n’ira pas plus loin que le bout du nez de l’acteur. En mettant en abyme la question de la representation, du vrai et du faux, du simulacre, en un mot du théâtre La « Re sentida » avec férocité lève le voile confortable du bon sentiment sur le rideau crasseux de nos lâchetés politiques. La Re-sentida n’aura sûrement pas fait un spectacle qui change le monde, il nous avait prévenu essaient. Leur tentative est jubilatoire, portée par l'énergie débordante des cinq acteurs C’est peut-être ça la révolution !
Tratando de hacer una obra que cambie el mundo: jusqu'au 19 octobre au Nouveau Théâtre de Montreuil/ Reservations: 01 48 70 48 90. www.nouveau-theatre-montreuil.com
La imaginacion del futuro : Du 3 au11 décembre au Théâtre des Abesses à Paris