
Au titre de chorégraphe, Michel Schweitzer préfère celui de manager. Cartel, le titre du spectacle emprunte lui aussi au monde de l’entreprise. Le dispositif de Cartel est un peu celui de l’enregistrement public d’une émission de télévision.
Le fond de scène est ouvert sur une sorte de hangar où sont stockés les projecteurs Michel Schweitzer, une dégaine d’animateur de direct 8, vient nous parler énergie partagée et bilan carbone. Une solution pour contribuer à baisser la note énergétique, pédaler ! Trois cyclistes, sont convoqués , ils produiront à la force de leurs mollets une partie de l’éclairage du spectacle. Il est assisté de Maël, régisseuse, qui donne du « Ragazzo » ou du « Jean s’il te plaît… » et ne finit aucune phrase magnifique exemple de dépense inutile. Entrent en scène les invités : Dalila Khatif, chanteuse mais aussi mère protectrice de ce petit monde, un tout jeune danseur Roman Di Fazio, le fameux « ragazzo » encore élève et L’ancien danseur étoile Jean Guizerix, 68 ans. Il manquera une autre ex étoile Cyril Atanassoff blessé lors d’une répétition, mais dont on verra la radiographie du pied éclairée grâce aux cyclistes. Pas de chiqué , on est en direct ! Quel rapport entre le bilan énergétique et les danseurs étoiles ? L’économie mon capitaine ! Economie du mouvement imposée par l’âge face à la dépense du corps jeune. Jean Guizerix danse avec les mains « un danseur qui ne sait pas danser son parcours avec les mains ne peut pas danser ». Par sa seule présence, c’est l’histoire de la danse classique qui traverse le plateau. Son corps se place impeccablement même « si les articulations font mal ». Guizerix se souvient de sa rencontre avec Noureev en 1973, du Faune, les mouvements sont inscrits , minimalistes mais d’une telle précision ! Le jeune homme exécute les tableaux de la célèbre pièce, nuque droite, bras déliés, le duo est bouleversant. Dalila Khatir chante , son corps énorme et rassurant, avec une infinie douceur, .enveloppe les danseurs. Mais tout ça pour quoi se demande le jeune homme ? Quelle vie que celle dédiée à la pratique d’un art dont norme , formatage, et excellence sont les maîtres mots ? Quel rapport au monde ? « Il Ragazzo » se rebelle, et dans un solo éblouissant de rage, danse l’Arlésienne sur une musique électro.C’est la devise du grand Merce Cunnigham qui ouvre l’horizon: « Pour rester bien vivant, il faut sans cesse faire le choix de mettre un pied dans l’inconnu ». Faisons la nôtre !
Jusqu'au 6 décembre au Parc de la Villette Grande Halle
01 40 03 75 89