Dans l'hôpital du docteur Dieu , c'est le nom du toubib, on se soigne avec le vin en perfusion et la clope à volonté sous l'œil attendri d'un cochon et d'une chèvre. « Arrêtez le monde je voudrais descendre », c'est la dernière création du Théâtre Dromesko.Une œuvre de salubrité publique. Une antidote à la morosité ambiante, un appel à la révolte contre un monde policé, liberticide, aseptisé à coup de Narta, où les vieux doivent avoir l'air jeunes et cacher les affaissements du corps. Le théâtre Dromesko a une odeur et la misère du monde n'empêche pas les rêves les plus fous. Dans la salle d'attente du Docteur Dieu, on attend son tour avec son animal de compagnie un âne, un cochon, une chèvre, une poule... Le toubib reçoit avec un « vous êtes ensemble » qui prête à confusion. Le théâtre Dromesko c'est aussi une ménagerie à poils et à plumes pas d'hommes sans bêtes, un vrai rappel à l'humilité des premiers devant la grandeur naturelle des seconds. On se dit que la consultation ne va pas être ordinaire, en effet entre chacune d'elle, le cabinet du Docteur s'ouvre à toutes les curiosités. Un gars en bleu de travail, prolétaire de la scène perché au sommet du chapiteau lève les portes d'un immense manèges et découvre les scènes hallucinées du monde de Dromesko. Un lit nuptiale XXL où s'ébattent deux beaux amoureux dans un Kama sutra équilibriste avant d'être happé vers on ne sait quels sommets, une noce fantasmatique où l'époux est un marabout au long bec, le festin une femme (une caille ou un ortolan ?) cachée sous les torchons prête à être dégustée par des convives à tête d'animaux. Le manège tourne au son des musique aux accents tsiganes d'Alexander Balanescu. Entre chaque vision dans l'entre-deux du rêve, nos quidams restés en salle d'attente causent prostate et incontinence, digressent sur la pluie « pour être mouillé il faut combiner l'eau et la chute » empruntent aux récits absurdes des Diabologues de Roland Dubillard mêlés à ceux de la Misère du monde de Pierre Bourdieu. Le manège s'ouvre encore Lily robe blanche et crinière rouge tourne à contre sens d'une foule en imper mastic et masques de porcs qui la dépece à chaque passage la laissant dans une nuisette aussi rouge que le sang et la révolte. Et la fête dure longtemps après les applaudissements la maison Dromesko paye la tournée générale avec tours de manège à volonté. Avant de partir on voudrait embrasser les hôtes Igor et Lily et toute la troupe leur dire merci de nous rappeler que nous sommes vivants.
Arrêtez le monde je voudrais descendre
SylviaMontfort
Jusqu'au 6 mars au Théâtre Sylvia Montfort
01 56 08 33 88
www.theatredelaville-paris.com