Véronique Klein

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Billet de blog 18 mars 2011

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16 ans

Ils sont sur le plateau comme chez eux. Mickaël et Elliot jouent à la play station et parlent dans une langue où il est question de « pokemon argent, Command conquer, que quand tu y as joué, c’est comme le vélo, t’oublies pas »,

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Illustration 1

Ils sont sur le plateau comme chez eux. Mickaël et Elliot jouent à la play station et parlent dans une langue où il est question de « pokemon argent, Command conquer, que quand tu y as joué, c’est comme le vélo, t’oublies pas », les filles chantent une chanson d’Amy Winehouse et s’écroulent sur un tigre géant en peluche,portables à la main. Et ça commence. Ils doivent s’entendre pour jouer une scène de Marivaux, au programme du bac de français. L’expérience du collectif n’est pas simple. Yassin distribue les rôles, Adja ne veut pas être la soubrette « Hé, c’est pas parce que je suis noire que dois faire les rôles de blédarde » , Célia veut jouer « à fond : là je peux le taper quand même ». Mickaël, le gothique et l’intellectuel du groupe convoque la dramaturgie pour ne pas jouer « le bouffon ». Il a surtout peur que son copain Elliot lui pique sa copine Emma à la faveur de la scène. Ils sont au coeur de la pièce de Marivaux, et donnent avec leur mot l’explication du texte qui résume parfaitement la situation « de toutes les façons y veut se faire les deux. » . Ils nous parlent d’eux, leur vie, leurs amours, le bac, les règles…. Ils s’embrassent avec la langue, ne sont d’accord sur rien et sont collés ensemble. Ils sont vrais, joueurs, malins et diablement inventifs. Le metteur en scène et directeur du Théâtre de Genevilliers Pascal Rambert est à l’initiative de ce projet. Il a su donner les clés du théâtre dans tous les sens du terme, sans être interventionniste et c’est bluffant. Les jeunes acteurs ont tout choisi, les costumes, la scénographie, les mots, il n’y a que Marivaux qui leur a été imposé. Pascal Rambert avait imaginé un scooter sur une pelouse, ils ont préféré les peluches, face book projeté sur le mur, ils nous invitent dans leur chambre et fixent, eux-mêmes les limites. C’est beau, drôle, plein de vie et terriblement exigeant. Au même moment, à deux stations de métro de là, le couvre feu a été déclaré pour les mineurs suite à la mort d’un adolescent de quinze ans et de bagarres entre bandes rivales. Au Théâtre, de Gennevilliers Pascal Rambert se bat pour un art politique au centre de la cité. Il fait appels à des artistes aussi renommés que la photographe Nan Goldin pour capter la ville pendant toute la saison, le critique et auteur Jean-Pierre Thibaudat écrit une chronique depuis deux ans «les gens de Gennevilliers », la crème de la scène internationale est programmée : Rodrigo Garcia, Ryoji Ikeda, l’ensemble philharmonique de Houston… L’exigence est au centre du projet, le théâtre est un lieu accueillant, vivant, on peut y consulter Internet, y manger, y passer. Pascal Rambert n’abaisse jamais le niveau c’est une posture qu’il faut souligner à l’heure où le ministère de la culture ne parle plus de culture pour tous mais pour chacun.

16 ans jusqu’au 19 marsau Théâtre de Genevilliers

www.theatre2genevilliers.com

Tél. : 01 41 32 26 26

photo : Marc Domage

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