La sixième édition du Omnivore Food Festival (OFF) vient d’ouvrir avec un prince de la pince à épiler, un géni de la précision laser, André Chiang. Après un set Normand, classiquement crémeux mais de bonne facture, après notre star tv nationale Cyril Lignac qui s’est coupé en direct, ajoutant un peu de sang à sa paëlla improbable, les 1200 spectateurs du OFF ont découvert ce petit homme discret, fraichement atterri de Singapour et qui a réussi à faire mieux à l’applaudimètre que son prédécesseur.

André Chiang est passé par les meilleures maisons, mais quand on lui demande celle qui l’a le plus influencé, la réponse donne l’esprit du bonhomme. « Chez Pascal Barbot (L’astrance à Paris), j’ai évidemment appris beaucoup sur la cuisine, mais j’ai surtout compris la valeur du travail collectif. Nous étions six dans une cuisine relativement petite et si l’un d’entre nous n’était pas à la hauteur, le plat ne pouvait pas sortir. J'ai reproduit dans mon restaurant (Restaurant André) le même processus, ce qui implique également de travailler pour très peu de couverts». André a visiblement développé d’autres qualités, à commencer par la conceptualisation de son menu sans descriptifs de plats, dessiné, imprimé et relié par ses soins, magnifique leçon de philosophie d’avant manger. Huit thèmes au programme : unicité, pureté, terroir, sud, mémoire, texture, iode, et artisanat. Révisez bien, André vient de vous donner votre premier cours de ce qu’il appelle l’octaphilosophie.
Au OFF, les plats cuisinés en direct ont donné de la couleur et du sens à ses théories. Petite pince à épiler dans la poche de sa manche, André va chercher l’infiniment petit, sculpte ses plats avec une précision chirurgicale en ne manquant jamais de mettre le trouble dans la perception de son spectateur mangeur. Quand on lui demande où il va chercher ses produits, la question a l’air de le surprendre. « Je prends ce qu’il y a de plus intéressant là où c’est produit. Ca peut être les Seychelles pour une variété de légume proche de la pomme de terre que je ne trouve que là-bas, comme la France où j’achète rhubarbe et abricots ».

Et puis, André a dressé sa première œuvre au OFF dans un silence religieux, le public retenait presque son souffle de peur de faire envoler les micros éléments posés dans un plat d’un design magnifique et tellement adapté à cette création. Sébastien Demorand qui anime le OFF a évidemment demandé qui fabriquait ces merveilles et André a répondu : Moi, comme si c’était parfaitement normal de ne pas pouvoir imaginer séparément contenu et contenant.