
Ils sont quatre, trois femmes et un hommesur le plateau nu où seul brille un carré de lumière qui change de couleur au fur et à mesure du spectacle. C’est dans ce carré minuscule perdu sur la scène du théâtre de la Bastille que les corpsglissent, se frottent, viennent échouer au gré des histoires cruelles racontées par cette drôle de famille. Trois sœurs, et leur cousin, le garçon du lycée, le frère, l’amant ? On ne sait pas et ça n’est pas très important. Une sale odeur flotte sur le plateau, une odeur de cadavre ? Il y a peut-être eu un meurtre ? Avec éclats de rires et jeux d’enfants, ils distillent quelques informations où il est questiond’atrocités, dont on ne sait pas tellement la part fantastique ou réelle. Le tout est enveloppé par le son d’Arnaud Sallé qui contribue à nous plonger dans un monde où la Comtesse de Ségurveillerait.
Ilfaut laisser toute idée de compréhension narrative à l’entrée de la salle pour pleinement se laisser happer par le petit monde cruel des sœurs Sagna. Carlotta et Catarina sont de vraies sœurs à la ville. La danse est une histoire de famille, enfants, elles apparaissaient ensemble dans les spectacles de leur mère Anna Sagna. Elles ont pour sûr puisé dans les souvenirs d’enfance pour créer « Nuda Vita » qui est aussi l’acte fondateur de leur toute nouvelle compagnie. Toutes deux ont participé à l’éclosion d’une danse qui depuis les années 90 mêle mouvement et parole. Carlotta a longtemps travaillé avec le Belge Jan Lauwers avant de créer ses propres spectacles. Catarina a fondé sa compagnie à la fin des années 80 et s’est inspirée d’ouvrages tels que les soeurs Brontë.
Dans « Nuda Vita », La danse n’illustre pas le texte et vice-versa, ils cohabitentsans forcément se répondre. Toujours surprenante, Tijen Lawto que l’on a pu voir dans les spectacles de la Need Company déploie son énergie animale. Elle se roule en boule pour se détendre en un instantà la vitesse du chat. Carlotta Sagna découpe l’espace de ses brassans fins, elle a cette inimitable manière d'être toujours décalée, à côté de la plaque qui lui confère une gravité burlesque.
Chacun va se trouver exclu de cette petite société, l’apparente légèreté cache les blessures de l’enfance. Alessandro Bernardeschi l’homme du groupe, estsouvent malmené. Les filles se moquent de sa virilité, lui clouentle bec dès qu’il évoque une relation particulière avec l’une ou l’autre, ses solos nerveux donnent la mesure de sa détresse. Catarina Sagna joue les aînées et mène la danse, mi-gouvernante, mi-peste. Elle injecte une dose d’absurdité et d’humour qui embarquent toutes les réticences.
« Nuda Vita » dans le cadre du festival d’automne au théâtre de la Bastille Paris jusqu’au 25 novembre
01 43 57 42 14
tournée: Toulouse théâtre Garonne du 9 au 11 décembre , en tournée en 2011