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Billet de blog 25 septembre 2009

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I went to the house but did not enter, de Heiner Goebbels

La scène s'ouvre sur une salle à manger entièrement grise. Un ton sur ton impeccable du tapis au papier peint. Quatre hommes vêtus de noir, chapeau et redingote, rangent méticuleusement vaisselle et mobilier dans un grand carton blanc.

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Illustration 1

La scène s'ouvre sur une salle à manger entièrement grise. Un ton sur ton impeccable du tapis au papier peint. Quatre hommes vêtus de noir, chapeau et redingote, rangent méticuleusement vaisselle et mobilier dans un grand carton blanc. Ils referont la scène à l'envers, la vaisselle blanche est devenue noire, comme un jeu de 7 erreurs. Ils chantent la vieillesse et la mort « The love song of J. Alfred Prufcock » de T.S Eliot d'une voix que l'on croit monocorde. Le rideau se ferme pour se rouvrir sur l'envers du décor. Les quatre hommes sont les chanteurs de l'Hilliard Ensemble. Un quatuor dont la réputation s'est construite sur la musique ancienne et les collaborations avec Arvo Pärt. Ils mettent ici tout leur art, au service de la mise en scène d'Heiner Goebbels. I went to the house but did not enter est un spectacle en quatre tableaux. Heiner Goebbels utilise l'outil théâtre comme au cinéma. Chaque décor est amené à vue par l'équipe de machiniste comme la préparation d'un tournage. On les voit pousser une façade de maison sur roulette, poser la poubelle, régler le moniteur et pourtant dès qu'ils disparaissent on les oublie. Les tableaux font penser à des peintures d'Edward Hopper ou des photos de Grégory Crewdson. Les quatre chanteurs, compagnons inséparables, sont tour à tour, déménageurs inquiétants, habitants d'un pavillon d'une banlieue quelconque, ils se retrouveront dans une chambre d'hôtel à regarder ensemble les diapositives d'un énigmatique voyage. Leurs conversations empruntent aux mots de TS Eliot, Beckett, Blanchot, Kafka, elles sont chantées, a capella d'une tonalité quasi liturgique, sans tremolos ni émotions palpables. Le son d'un frigidaire, une voix au téléphone, un crissement de pneu suivi l'aboiement d'un chien, on est au cinéma. Heiner Goebbels et ses quatre complices de l'Hilliard Ensemble que l'on a parfois comparé à des croque-morts, c'est dire leur légèreté nous emmènent dans un voyage inconfortable, parfois ennuyeux, de cet ennui qui laisse l'esprit vagabonder et ouvre l'imagination, c'est énorme.

Heiner Goebbels/ Hilliard Ensemble

Théâtre de la ville jusqu'au 27 septembre

Réservations : 01 42 74 22 77

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