
Cinq garçons fraîchement sortis du conservatoire de Liège, nous font avec le Signal du promeneur un spectacle déjanté comme il faut. Ils se sont réunis sous le nom de Raoul pour fonder leur collectif, ce qui donne Raoul Collectif. Un Raoul qui n’a rien à voir avec les tontons flingueurs mais tout avec l’auteur belge Raoul Vanegeim, médiéviste reconnu membre de l’international situationniste, qui voyait en la résistance au christianisme les signes d'une civilisation à venir, fondée non plus sur l'aliénation du travail, le pouvoir et le profit, mais sur la créativité, la jouissance et la gratuité ». Une ligne de conduite pour les cinq lascars qui mettent en oeuvre des trésors de créativité, dépensent leur énergie sans compter, prennent et dispensent un plaisir du jeu qui requinquent les plus moroses. A une société gangrénée par les pouvoirs, où chacun fuit comme il peut, Raoul Collectif répond par une réflexion sur le faire ensemble. Au terme d’une longue marche dans d’obscures forêts, les cinq promeneurs en cirés , bottes de caoutchouc et lampes frontales, se retrouvent autour d’un feu imaginaire et entament en chorale un chant de ralliement. L’un d’eux lève la lampe-tempête, avec un brin d’anxiété, c’est le naturaliste de la bande. Il raconte une petite histoire de loups, de chevreuils et de bocages dont la morale dit le fragile équilibre qui fait « qu’il est nécessaire d’être un peu dévoré , mais pas trop pour que le monde fonctionne ». Un chevalier en heaume et armure vante les vertus du travail à un type dépressif et un autre cancéreux. Cinq histoires, se croisent et se répondent. Elles se tissent et révèlent le dessin d'une société malade. Au centre de la toile, le personnage de Jean Claude Romand. Pendant 20 ans, il a fait croire à son entourage qu’il était médecin renommé, a extorqué des millions à ses proches et a finalement tué parents, femme et enfants. La reconstitution du procès hilarante que les acteurs nous font du criminel les fait entrer directement dans le panthéon du burlesque, juste à côté des Monty Python. Elle soulève néanmoins de vraies questions autour de la responsabilité. C’est finalement sur une histoire de chenille qui se transforme en papillon que dans un dernier éclat de rire nous réfléchirons au sens de la vie. Que celle du Raoul Collectif soit longue!
Jusqu’au 13 décembre au Théâtre de la Bastille à Paris
01 43 57 42 14
theatre-bastille.com