Delphine Gardey, historienne et sociologue, a dirigé un petit livre collectif faisant le point sur l'état des féminismes et leurs apports: Le féminisme change-t-il nos vies? Un nouveau titre de la collection «Petite Encyclopédie Critique» des éditions Textuel...
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Face à une nouvelle donne politique, économique, sociale et internationale, le féminisme est-t-il armé pour apporter des réponses ?
Haut lieu d’échange, la pensée et la pratique féministes sont par tradition et nécessité concernées par les thèmes de l’égalité, de la différence, de l’altérité, de la diversité. Espace de réflexion transnational, le féminisme a par ailleurs produit des catégories d’action et des outils qui sont aujourd’hui utilisés à l’échelle internationale et qui contraignent les acteurs locaux occidentaux et non occidentaux, formant une sorte de nouveau référentiel pour la conduite des politiques de développement, l’audit des Etats et de leurs prétentions « démocratiques », la mise en œuvre de politiques de réparation à la suite de conflits armés ou l’accompagnement de politiques économiques. En ce sens, loin d’être archaïque, le féminisme nous apparaît comme un mode de pensée et d’agir vivant et actuel, cependant qu’il est possible de mettre en évidence la diffusion et, dans une certaine mesure, la routinisation d’une partie de ses « produits dérivés » sous la forme d’instruments actifs dans nombre d’aspects concrets de nos vies.
Travail, économie mondialisée, représentation politique, relations et institutions internationales, sexualité, famille, immigration, etc., l’objectif de l’ouvrage est de revenir sur ces questions et de les mettre à l’épreuve de la pensée et de l’action féministes. Nous le faisons depuis notre expérience et notre expertise, en tant que membres d’une équipe spécialisée dans le domaine des études de genre. Nous mobilisons ce qui nous unit et ce qui nous différencie, tant du point de vue des centres d’intérêt que des relations passées et présentes que nous entretenons (ou non) avec l’action militante. Spécialistes de l’analyse des rapports sociaux de sexe et de la théorie féministe, au contact depuis de nombreuses années avec des étudiant.e.s de tous horizons qui viennent chercher des réponses et proposer de nouvelles questions dans nos cours et conférences, notre objectif est de donner à voir les atouts, les atours et la créativité des féminismes contemporains, ce qu’ils ont ouvert et contribuent à ouvrir tant en termes de pensée que d’action. En proposant de répondre par l’affirmative à la question « Le féminisme change-t-il nos vies ? », nous ne souhaitons ni faire preuve d’angélisme, ni pratiquer une sorte d’auto-consécration. Nous n’appartenons à aucune église et ne formons pas une école dont il faudrait défendre la ligne ou les intérêts. Ce qui nous intéresse, c’est de répondre par la pluralité et de montrer l’intérêt et la complexité des questions posées par la pensée et les mouvements féministes.
Car le féminisme est pluriel et comme on peut le voir en lisant le livre : il est vivant !
Delphine Gardey, historienne et sociologue des sciences et des techniques, spécialiste de la théorie féministe, a dirigé le livre collectif Le féminisme change-t-il nos vies ? (144 pages, 9,90 euros, septembre 2011). Cet ouvrage rassemble des contributions de sociologues, politistes et anthropologues de l’équipe des Etudes Genre de l’Université de Genève : Laurence Bachmann, Delphine Gardey, Isabelle Giraud, Lulia Hasdeu, Lorena Parini, Christian Schiess et Rachel Vuagniaux.
* Sommaire du livre
Introduction : Le féminisme change-t-il nos vies ?
Delphine Gardey (historienne et sociologue)
Le féminisme a-t-il transformé la politique ?
Isabelle Giraud (politiste)
Le féminisme a-t-il déplacé les frontières du travail ?
Rachel Vuagniaux (sociologue)
Le féminisme a-t-il redéfini les sexualités ?
Lorena Parini (politiste)
Un féminisme « décolonial » est-il possible ?
Lulia Hasdeu (anthropologue)
Le féminisme est-il soluble dans l’individu ?
Laurence Bachmann (sociologue)
Le féminisme émancipera-t-il les hommes ?
Christian Schiess (sociologue)
Conclusion : Définir les vies possibles, penser le monde commun
Delphine Gardey