Ahamada Smis « Marseille ma ville, Comores mon pays, citoyen du monde ! ».

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Être ou ne pas être, telle est la question ? Être ou ne pas être au concert d’Ahamada Smis, telle est ma question ! Avancer, poser mes derniers souvenirs avant qu’ils ne deviennent mes premiers oublis, sera ma réponse d’autant que la jauge de Croisière n’est pas celle d’un paquebot. Laisser sa place à d’autres, qu’ils découvrent le phénomène Ahamada Smis, un AS si j’en crois ses initiales, obstiné et inventif qui construit son chemin pas à pas, en toute indépendance, avec ténacité et talent. Ahamada n’est pas un grand chanteur, il le sait. Sa voix est faite pour le slam, comme prédestinée. Comorien arrivé en France, peu de temps avant l’adolescence, il a grandi dans le hip-hop, côtoyé, observé, ceux qui à Marseille ont signé de beaux contrats, démarré, continué (ou pas) des carrières, et a choisi la liberté de faire ce qu’il veut, quand il veut. C’est en conscience donc qu’à la charnière des siècles, il a choisi de retourner au berceau, à la source de sa création, dans les îles de l’océan Indien et sur les terres africaines voisines pour parler la langue mat’, celle des ancêtres, le swahili et jouer les instruments (dzenzé, gaboussi) qu’on fabrique sur ces bouts de terre en pleine mer, sur ses îles entre lesquelles les Comoriens circulaient librement avant. Il a depuis publié 4 albums (Être, Origines, Afrosoul et Air) sur Colombe Records, son label. Être, le tout premier, et ses masterpieces (le séminal Gouttes d’eau, mais aussi Kinshasa ft. Bawuta Kin & Déborah, Ma vie Un Jazz, Massiwa ft. Cheikh MC, Racines ft. Staff Benda Bilili…) paru uniquement en physique il y a une quinzaine d’années, est revenu à la faveur de l’été en digital. C’est aussi ça la liberté ! Je n’ai pas vu Ahamada, pas vu son solo présenté il y a quelques jours en Avignon et repris ici. J’en connais des bouts, semés ici ou là à Marseille, sa ville, dès que l’occasion lui en était donnée. Seul au micro, seul aux instruments, seul aux machines, Ahamada fait face avec le visage du frère, de l’ami. Il te donne sa confiance, et t’invite à le suivre de titre en titre. Homme de la mer, sa chaloupe peut tout affronter, les vagues, les courants, les vents et même les accidents de parcours, les caprices des machines, il est prêt ! « La salle était pleine, le cagnard insolent et le public fantastique » me confiera-t-il quelques heures plus tard. « Il a même dansé ! ». Belle performance quand résonne tout juste 12 coups de midi !
Baba Squaaly