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Ecrire sur la littérature relève sans doute du non-sens.... Lisez ce livre, devrait-on tout simplement dire, des étoiles dans les yeux...
Des étoiles dans les yeux, c'est bien ce qu'apporte Eric Vuillard avec Une sortie honorable.
Pourtant, le propos est âpre, puisqu'il revient sur la guerre d'Indochine et ces 500 000 combattants vietmings tués auxquels il faut ajouter 100 000 civils ( et ce sera « au moins trois millions six cent mille morts » à la fin de la guerre dite du Vietnam, « autant que de Français et d'Allemands pendant le Première guerre mondiale », dit E. Vuillard dans une note de fin de livre).
Mais la construction de ce récit est digne du presto du mouvement de l'Eté dans les Quatre saisons de Vivaldi. Une ouverture vive et sombre de quelques notes, la visite d'une plantation d'hévéa par un inspecteur du travail en Juin 1928. Puis l'enlacement magistral des lignes mélodiques pour les années cinquante : celles de l'Assemblée Nationale, des sociétés anonymes qui exploitaient les richesses coloniales, des militaires incompétents. Et le final, la défaite inéluctable ouvrant sur une autre défaite inéluctable au prix de millions de morts. Une pièce écrite en phrases courtes et incises souvent, si caractéristiques du style d'Eric Vuillard, comme des coups d'archet, parfois entrecoupées de phrases infinies courant même sur plusieurs pages, peut-être quand le coeur de l'auteur bat plus intensément.
On pourrait se demander pourquoi écrire sur le passé, sur ce passé, quand le présent doit si nécessairement et urgemment être interrogé pour ouvrir le futur. Pourquoi ? Parce que ce récit parle en fait du présent pour qui sait lire entre les lignes. Non. Pas « entre les lignes »....Pour qui sait lire les lignes....
Lisez ce livre !
Une sortie honorable ? Un diamant littéraire de lutte.
Une sortie honorable, Acte Sud , Coll. « Un endroit où aller », 208 p., 18,50 €
Lire l'incipit : https://issuu.com/actes_sud/docs/9782330159665_extrait/14