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Billet de blog 11 mai 2010

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Y aura-t-il deux gay prides à Marseille cette année? Les dessous d’une querelle

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Le 2 mai dernier, la rédaction de Yagg recevait un communiqué de presse de l’association LGBT Fiertés de Provence annonçant la prochaine Marche des fiertés de Marseille pour le 3 juillet prochain. Cinq jours plus tard, nous recevions un autre communiqué émanant d’une autre association LGBT locale, Tous&Go, annonçant à son tour la prochaine Marche "officielle" pour le 10 juillet prochain. Une situation surprenante qui est en réalité le résultat d’un contexte complexe et tendu dans la cité phocéenne. Décryptage.

UN CONTEXTE PARTICULIER
Impossible de comprendre ce qui est en train de se dérouler à Marseille sans examiner la situation de ces dernières années et les chamboulements de ces derniers mois. C’était, depuis toujours, la Lesbian and Gay Pride Marseille (LGP Marseille) qui s’occupait de la Marche annuelle. De l’avis de tous, la situation n’était pas idéale: mauvaise gestion, absence totale de transparence, problèmes financiers et juridiques, etc. Il fallait que la situation change. De plus, le 11 avril dernier, la Coordination Interpride France (CIF) lui supprimait sa qualité d’adhérent ainsi que le droit d’utiliser les marques Lesbian & Gay Pride, GayPride et Pride.

De cette situation sont nées en janvier dernier deux nouvelles associations, toutes deux décidées à reprendre le flambeau de la vie associative, militante et culturelle de Marseille. D’un coté Marseille Pride, qui est depuis devenue le collectif Fiertés de Provence après avoir été rappelé à l’ordre sur l’usage de la marque Pride par la CIF. Et d’un autre coté, l’association Tous&Go.

La première a été créée par plusieurs membres de l’ancienne LGP Marseille, dont Sébastien Gony, qui la dirige aujourd’hui. Ce jeune homme de 23 ans, déjà très engagé dans la vie LGBT de Marseille depuis plusieurs années, avait obtenu le poste de président pendant les derniers mois d’existence de la LGP Marseille (d’octobre 2009 à janvier 2010). À l’effondrement de celle-ci, il aurait décidé de monter sa propre association.

La seconde est dirigée par Christophe Lopez, entrepreneur ambitieux, engagé en politique, ancien vice-président du Sneg et directeur de deux établissements gays à Marseille, le Trash et le XY. Il s’était engagé dans la campagne des municipales de 2008 aux cotés de Jean-Noël Guerini (président du conseil général des Bouches-du-Rhône), et il est aujourd’hui conseiller à la communauté urbaine de Marseille.

UNE "COMÉDIE POLICIÈRE"?
Problème, les deux associations marseillaises ne s’accordent pas sur l’organisation des événements LGBT, chacune accusant l’autre de vouloir tirer la couverture à soi. Et la guerre dure depuis le mois de janvier…

Ainsi, le 2 mai dernier, le communiqué de Fiertés de Provence annonçant leur Marche du 3 juillet commençait par la phrase suivante: "Le collectif Fiertés de Provence n’entend pas rentrer dans le jeu de ceux qui voudraient que Marseille ressemble à une comédie policière". Le ton était donné.

Pourtant, un mois plus tôt, dans un courrier, la CIF sommait les deux associations de s’entendre sur la tenue d’une réunion pour organiser conjointement la Marche des fiertés. Tous&Go avait alors pris l’initiative de la rencontre qui s’est tenue le 3 mai. Une réunion à laquelle le président de Tous&Go dit avoir convié le tout Marseille (associations, commerçants, etc.) et avoir élu démocratiquement la "team organisatrice" de la Marche, comme l’a confirmé à Yagg Christophe Lopez. Quatre personnes ont été désignées. Pour Fiertés de Provence, qui était présente, mais qui n’était pas d’accord avec la tenue de cette réunion, ni avec la façon dont Tous&Go a pris les choses en main, ce vote est nul.

En résumé, Tous&Go reproche à Fiertés de Provence d’avoir organisé sa Marche sans avoir consulté personne, ni la CIF, ni les autres associations, la veille de la réunion du 3 mai. Et Fiertés de Provence reproche à Tous&Go d’avoir organisé la réunion et un vote pour élire les organisateurs d’une seconde marche.

DEUX GAY PRIDES OU UN ACCORD?
Au final, la CIF a débattu et a tranché: c’est le projet Tous&Go qui a été retenu. En effet, vendredi dernier, celle-ci a adressé un courrier informant Tous&Go qu’elle acceptait son adhésion, qui devra être ratifiée par sa prochaine assemblée générale. Elle a également accordé à l’association le droit d’utiliser les marques Lesbian & Gay Pride, GayPride et Pride. Une décision que déplore Fiertés de Provence. Pour Sébastien Gony, son président, interrogé par Yagg, ce ne serait que le résultat d’une proximité entre les dirigeants de Tous&Go et ceux de la CIF. Néanmoins, avec cette adhésion, la Coordination Interpride France reconnaît l’association comme officiellement organisatrice de la Lesbian & Gay Pride de Marseille, le 10 juillet prochain.

Des questions demeurent: que va t-il se passer maintenant? Y aura-t-il deux gay prides cette année à Marseille? Fiertés de Provence va t-elle choisir de maintenir sa marche, malgré cette décision de la CIF? Pour l’instant, l’association n’a pas tranché et dit "attendre d’en discuter avec ses adhérents". Selon Fiertés de Provence, le fait que la CIF ne soutienne que l’un des deux événements ne signifie pas que l’autre ne peut pas avoir lieu aussi, il suffit que la préfecture donne son accord.

Après des années de non-transparence, nous voilà désormais dans le grand déballage. Si les tensions se calment, elles pourraient même permettre un grand renouveau à Marseille…

Audrey Banegas

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