Pendant que la révolution démocratique s'enracinait dans une série de pays arabes, en particulier avec l'embrasement de la situation en Egypte, celle de la Tunisie n'est toujours pas réglée, où le processus promet d'être long et compliqué.
Cette semaine s'est produit un fait étrange et inquiétant, la prise d'assaut par plus de 2000 individus armés se revendiquant de la "sécurité intérieure" du ministère, le ministre lui même ne trouvant son salut qu'en une fuite éperdue. Cette quasi tentative de coup d'état n'a pas fait la une de la presse française, les seuls à en rendre compte étant dans un premier temps la version tunisienne de "business News" et le site web d'"Arrêt sur Image". Ce silence assez singulier (même si "l'actualité chaude", c'est l'Egypte) renforce le sentiment d'étrangeté de l'affaire elle même.
"M. Rajhi assure qu’il s’agissait bel et bien d’un complot contre l’Etat et le gouvernement transitoire et qu’il n’a dû son salut, avec le général Ammar, qu’à un miracle à un point tel qu’il n’a pensé qu’à sauver sa peau. Il est parti sans son manteau, ses lunettes et son portable. Lunettes et portables qui lui ont été dérobés ! " Voilà comment le magazine "Business News" présente "l'affaire" .. Quelques jours aprés le départ de Ben Ali et le remplacement d'un cabinet ministériel constitué par de vieux cheveaux de retour du "systéme Ben Ali" par des ministres moins compromis dans la complicité avec le systéme (même si tous, et notamment M. Rajhi, ne sont pas des "opositionnels", mais de hauts fonctionnaires ayant fait preuve d'une certaine neutralité) une attaque majeure prend pour cible le ministère de l'intérieur, sans que cela titille la curiosité des principaux journaux sauf "Le Monde" qui a écrit un entrefilet, mais sans parler de ce quasi coup d'état en particulier, mais en la noyant dans un ensemble de considération sur les exactions de l'ancienne "police politique" du régime.
La question apparait en effet bien mystérieuse, et les objectifs des conjurés ne semblent pas trés évidents. Leurs motivations ne pouvaient se limiter au fait de voler less lunettes et le manteau du ministre de l'intérieur. Prendre d'assaut un des centres du pouvoir d'état requiert une préparation minutieuse et des complicités nombreuses. En effet ce jours là, la police était en "grève politique", selon les déclarations de M. Rajhi lui même. De plus Business News poursuit de façon plus étrange encore : "Et dire que le directeur général de la sûreté nationale n’a arrêté personne. Après avoir informé le ministre qu’une cinquantaine d’assaillants avaient été retenus, il est revenu pour annoncer qu’il les a laissé partir !".On peut se poser de sérieuses questions sur le contrôle réel de la situation par un gouvernement qui apparait comme un gouvernement fantoche, uniquement capable de donner une apparence de normalisation. Quels étaient les objectifs réels des troupes félones, et n'assiste t on pas à une entreprise de mystification, plus digne d'un mauvais polar que d'un scénario politique.
Il n'empéche que le silence de la majeure partie de la presse française (ni Libération, ni Le Figaro, ni même Mediapart n'en ont parlé) est aussi incompréhensible.