Jean TRAMUSET

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Sur la monnaie

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Billet de blog 14 avril 2015

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LA monnaie internationale : le système des changes ABSOLUS (IV)

Jean TRAMUSET

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  • Mise en bouche

Chose promise (cf. le dernier § du précédent article de ‘’Sur la monnaie’’), chose due : au menu d’aujourd’hui, donc, ‘’l’écoulement transnational des productions nationales’’.

Sauf qu’il me reste à dire en quoi (‘’grand dieu !’’) il pourrait être justifié que vous ne fassiez pas comme d’habitude quand je nourris ‘’Sur la monnaie’’ (c'est-à-dire… que vous ne fassiez pas que regarder ailleurs !) ?

Or si ce que je fais observer c’est que la question de ‘’l’écoulement transnational des productions nationales’’, c’est (évidemment mutatis mutandis !), la transposée à l’échelle internationale de la question de ‘’l’écoulement national des productions nationales’’ ? Que par conséquent (cf. tous les problèmes -un euphémisme !- posés par l’écoulement à l’échelle nationale de l’Euroland de la production grecque comme part de la production nationale de l’Euroland : les productions grecques comme celles de tous les pays de l’Euroland ne sont-elles pas libellées en la MÊME monnaie, savoir en € ?), la question de ‘’l’écoulement transnational des productions nationales’’ peut être l’occasion de comprendre ce qu’il en est VRAIMENT de ‘’la dette grecque’’, et donc, ce qu’il en est VRAIMENT de ‘’la crise européenne de la dette’’ ?

LA monnaie internationale et l’écoulement transnational des productions nationales exportées :

essence et ‘’limites’’ de l’économie internationale

C’est donc sous couvert d’une monnaie internationale satisfaisant au ‘’modèle’’ de LA (VRAIE !) monnaie internationale (cf. les précédents articles de ‘’Sur la monnaie’’) qu’ici, l’économie internationale est censée fonctionner.

C’est le sens de l’irrésistible et ‘’juste’’ mondialisation (au-delà des pays, la planète n’est-elle pas l’espace naturel de l’humanité ?) : toute entreprise, quelle qu’en soit la nationalité, table aussi (avant tout !) sur l’écoulement transnational de sa production. En résulte donc, chez toute entreprise, qu’outre ses anticipations quant à l’écoulement national de ses produits, ses anticipations quant à leur écoulement transnational interviennent pour la décider à former sa production au niveau (et au prix !) où, dans les faits, finalement, elle la forme.

 Reprenons des notations que nous avons déjà utilisées : le monde est partagé entre le pays R (dont la monnaie est le $) et le pays A (dont la monnaie est le Peso –Ps). Cela étant, imaginons maintenant que, une production de 100 $ ayant été formée en R à la fin du mois n-1, on constate qu’à la fin du mois suivant, le mois n, le pays R a écoulé 10 $ de cette production vers A, cette exportation de 10 $ de R vers A s’analysant comme une vente transnationale de 10 $ de r, résidant de R, vers a, résidant de A. Nous en avons vu le principe, cette transaction entre R et A se fait moyennant l’intervention de la BI (la Banque Internationale) et en monnaie internationale (Mi).

Mais entrons dans les détails…

1° La BI, LA monnaie internationale, et l’écoulement transnational des productions nationales

On l’a vu et revu, le jeu de la BI requérant le préalable de la connaissance du change $/Mi et celui de la connaissance du change Ps/Mi[1] (d’où la détermination du change $/Ps), soit donc ces deux changes : 1 $ = 1 Mi et 1 Ps = 0,1 Mi ; d’où 1 $ = 10 Ps.

Alors, sous l’hypothèse que les relations entre R et A auront donc été celles que l’on a supposées dans le précédent article de ‘’Sur la monnaie’’, le jeu de la BI dans le (vrai) paiement de R par A, celui-ci intervenant au titre de l’achat ‘’international’’ pour un montant de 100 $ par a, résidant de A à r, résidant de R, peut maintenant être décrit (à ce sujet, cf. le schéma situé un peu plus bas) :

  1. le compte de A au crédit du bilan de la BI étant débité de 100 Mi (d’où une dette de A vis-à-vis de la BI pour un montant de 100 Mi), le compte de A, chez A, sera aussitôt crédité de 100 Mi. D’où, aussitôt (à supposer que l’on s’arrête là), une… créance équivalente de 100 Mi de A sur la BI, créance dont, évidemment, la BI trouverait le financement dans… la dette de A sur elle. Sauf que les 100 Mi dont A a été crédité, aussitôt A les verse à R (100 Mi valent en effet 100 $), lequel R, aussitôt, en crédite son compte dans les livres de la BI (d’où aussitôt, au débit de la BI, une créance de 100 Mi de R sur la BI, tous ces ‘’aussitôt’’ renvoyant à la logique de l’instantanéité du circuit de la monnaie internationale comme actif/passif (le ‘’statut’’ de toute monnaie) : aussitôt qu’elle est émise par ‘’la banque’’ (ici, la BI) elle est reprise par elle.
  2. Cependant, grâce au crédit par R de son compte au débit du bilan de la BI à hauteur de 100 Mi, la BI disposera aussitôt des 100 Mi dont elle a eu besoin pour financer A…

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Or

  • 1) Imaginons que A et R soient ‘’agents’’ du même pays P dont la monnaie soit M. Soit un paiement de A à R de 100 M au titre d’un achat de 100 M de A à R.
  • A, ceci pour payer R, donnant à R 100 M, pourquoi peut-on dire que le paiement de A à R est parfaitement valide ?
  • La chose est claire : c’est parce que, alors qu’avant son paiement A détenait 100 M, après son paiement, ces 100 M se retrouvent entre les mains de R. Or que sont ces 100 M sinon, d’abord entre les mains de A, puis, après paiement de R par A, entre les mains de R, une créance de 100 M sur la Banque Centrale de P, c'est-à-dire une créance au titre de laquelle, à supposer que R en demande le paiement à cette banque (la Banque Centrale), cette banque lui donnerait… 100 M !!!!
  • 2) Transposons tout cela au cas du paiement international pour un montant de 100 Mi du pays R par le pays A par la transmission par A à R d’une créance de 100 Mi sur la banque émettrice de cette créance : R demandant le paiement de cette créance, pour s’exécuter, la banque émettrice de cette créance ne sera-t-elle pas fondée à la lui remettre ? Et, en ces sens, ce que l’on pourra dire ne sera-t-il pas (cf. le point précédent) que R aura été parfaitement payé pour sa vente à A ?
  • 3) Et si maintenant l’on objecte que A a payé R en contractant une dette (ce qui n’est pas un paiement !), ce que l’on pourra rétorquer ne sera-t-il pas que ce que R aura ‘’perdu’’, ce sera le financement d’une dette ne renvoyant à aucun paiement, c'est-à-dire une dette égale à zéro ? Et en ce sens, ce que l’on sera fondé à dire ne sera-t-il pas que la transaction entre A et R aura été un parfait échange (rien contre… rien) ?

Bref, l’écoulement transnational des productions nationales moyennant une Banque Internationale et une (LA !) monnaie internationale sera conforme au schéma suivant :

min-56 

Ici, ne disons qu’une seule chose (une seule !).

Soit le paiement de A à R pour l’achat (du produit de R) que A fait à R ; le fait-il en monnaie ?

Catégoriquement, la réponse est : ‘’NON !’’ : A paye R en vendant à R des titres à sa dette (celle de A) sur R. D’où le fait qu’en réalité, A paye R en lui vendant pour un montant équivalent à celui de son achat. Dit autrement, A paye R par l’échange que, dès lors qu’il le paye en une monnaie qui n’est pas la sienne, il fait avec lui.

Aussitôt, ce que l’on peut dire est bien qu’il ne paye pas ‘’contre’’ de la monnaie. Et pour cause : la monnaie est ce qui monétise l’achat-vente de A (et ‘’réciproquement’’, la vente-achat de R) ; d’où cette conséquence, qu’en effet, la monnaie n’existe qu’instantanément, c'est-à-dire le temps de la durée du paiement : elle n’existe que dans le flux (instantané) qui (instantanément) débite/crédite la Banque Internationale.

Objectera-t-on encore ici que R n’étant payé qu’en une créance sur la BI, il n’est donc pas payé ?

Or :

  1. cette objection est sans la moindre consistance : R ne détient-il pas des titres à la dette de A ? Et ces titres, ne sont-ils pas la preuve que R a été payé par A (sinon, ces titres, comment R aurait-il pu les obtenir de A ?) ;  
  2. la créance de R sur la BI n’est pas l’engagement de la BI : c’est celui de A… étant entendu que, derrière son ‘’engagement’’ vis-à-vis de la BI, ce que A lui dit n’est pas : ‘’je vous paierai demain’’, c’est : ‘’vu les opérations que, jusqu’ici, j’ai effectuées au titre de mon commerce international, ma position se trouve débitrice de 100 Mi, ceci signifiant que, jusqu’ici, mes achats excèdent mes ventes de 100 Mi’’. 

Ici, l’essence et les ‘’limites’’ de l’économie internationale se trouvent dévoilées. Voyons ce qu’il faut entendre par là.

2° Essence et ‘’limites’’ de l’économie internationale

A important 100 en Mi depuis R (et donc R exportant 100 en Mi vers A), faisons, pour A et R, le bilan de ces opérations :

  • A qui gagne un produit de 100 Mi ‘’gagne’’ une dette de 100 Mi vis-à-vis de BI ; cela veut dire qu’il ‘’gagne’’ d’avoir, plus tard, à faire une exportation de 100 Mi qui lui permettra d’équilibrer son compte dans les livres de la BI ;
  • R qui perd un produit de 100 $ (= 100 Mi) gagne 100 Mi (= 100 $) : c’est sa créance sur BI.

Bref, les pays A et R commerçant, leurs patrimoines sont invariants à leur commerce.

Pourtant, A important un produit depuis R, il est certain que la distribution du produit mondial (celui-ci s’analysant sous nos hypothèses comme la production nationale de A à laquelle s’ajoute la production nationale de R) entre A et R a évidemment été modifiée ; c’est ‘’l’essence’’ de l’économie internationale : l’économie internationale, c’est, entre les pays qui commercent, par la monnaie internationale, la redistribution du produit mondial tel qu’il se trouve formé pays par pays… et tel aussi que, pays par pays, quand bien même la production (intérieure) y soit tirée par l’anticipation d’un écoulement extérieur, ce produit , dans son volume (et donc dans le niveau d’emploi que sa production permettra pays par pays d’obtenir) se trouvera contraint par les lois de l’amortissement du capital fixe (sur ce sujet, cf. : ‘’Contre le chômage comme ''Vérité'' : la vérité du chômage ’’) auxquelles bien entendu, aucune entreprise, quelle que soit sa nationalité, ne peut échapper.

En résulte que, s’il est évident que la mondialisation peut, dans tel ou tel pays, favoriser l’emploi (du fait, par exemple du niveau des salaires dans ces pays, niveau qui, en effet, peut permettre aux entrepreneurs de ce pays d’être particulièrement compétitifs sur le marché mondial), le gain d’emploi constaté ne sera qu’un gain local : nécessairement , ce gain se trouvera ailleurs, compensé par des pertes d’emploi, celles-ci sanctionnant le fait qu’ ‘’ailleurs’’, les productions cessant d’être concurrentielles (car produites à des coûts salariaux trop élevés), celles-ci devront être abandonnées.

C’est ce que nous appelons les ‘’limites’’ de la mondialisation : contrairement à tout ce que peuvent en dire ses (modestes) ‘’penseurs’’, la mondialisation n’est certainement pas la solution de la VRAIE crise du capitalisme ; conformément à ce qui est '’la vérité du chômage’’ (cf. l'avant dernier §), cette crise n’est, en aucune manière, due à de quelconques phénomènes de marché ; touchant tous les pays, la crise est, dans chacun d’eux, la conséquence de la non maîtrise par les entreprises ‘’nationales’’ de l’amortissement de leur capital fixe. D’où ce que sa résolution implique : à l’échelle de chaque pays, la révolution de l’organisation du système bancaire (là-dessus, cf. par exemple : ‘’Ni Tirole, ni Mauduit : la MODERNITE ’’).

Ici, après 16 articles, ce que ''Sur la monnaie'' doit encore montrer, c'est comment, dans le système des taux de change ABSOLUS, les monnaies nationales coexistant avec LA monnaie internationale que la mondialisation requiert, pourtant exposé qu'il le veuille ou non à la nécessaire internationalisation de l’économie, chaque pays, démocratiquement, pourra conserver, INTACTE, la possibilité de gérer ses affaires comme il l’entend[2].

Précisément, ainsi que ''Sur la monnaie'' l'a promis, ce sera le modèle du système monétaire européen comme système préfigurant celui dont la mondialisation a besoin, donc TEL QU’IL DEVRAIT (ET POURRAIT !) ÊTRE ; et… ce sera pour la prochaine fois !

JT


[1] Cette connaissance datant du jour j du passage de l’ancien au nouveau ‘’système’’ (ou du jour de la révision du change, au début de chaque nouvelle période de temps en laquelle, après la réforme du système monétaire international actuel, la vie des relations entre les pays sera découpée. Sur ce sujet, cf., le précédent article de ''Sur la monnaie'' intitulé : ''LA monnaie internationale : les système des changes ABSOLUS (III)''). 

[2] Ainsi que nous l’avons déjà dit, ‘’n’y va-t-il pas de son identité, concrètement, de sa langue, de sa culture… ?’’

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