La Route du Rock avec des bottes en stock
- 15 août 2011
- Par Marine Turchi
- Édition : Synthétique


Après 5 heures de route où on a englouti 24 palets bretons et fait 46 fois la blague «Tiens regarde, y a ta reume là», on a fini par arriver à Saint-Malo. Cette année on a apporté les bottes Aigle et le kway parce qu'on nous la fait pas deux fois quand même (lire notre récit de l'édition 2010 du Koh-Lanta-Route du Rock). On a aussi délaissé la Polo verte de 1994 avec vitres qui ferment pas pour une voiture étanche en design nuage - on a les voitures de location qu'on mérite.

Et pourtant, ça donne ça (ici au festival de Montreux):
La fosse sautille. Elles reprennent «Turn Away Run away» de Bronski beat (écoutez ici à partir de 45'10) et terminent sur une reprise très musclée de «The Partisan», de Leonard Cohen (écoutez ici à partir de 56'20). La foule tangue. Notre voisin de droite n'en peut plus, il fait des bonds comme un gosse de cinq ans à qui on a promis d'aller à Disneyland s'il terminait ses poissons panés. Nous on a déjà décidé que c'était LE groupe du festival (voir le concert en entier sur le site d'Arte Live Web).

3h. Backstage, le staff de Mogwai atteint les 10 grammes et joue au babyfoot avec les vieux des stands boissons qui ont visiblement respecté la règle du «une bière vendue, une bière bue». La chanteuse Anika passe, perchée sur ses talons, un peu ivre. On recroise une consoeur. Elle ouvre sa trente-sixième bière en nous racontant que la faute dans le nom de groupe, en police 72 dans son titre, c'est justement pas sa faute, «c'est le graphiste en fait». Elle dit que peut-être elle devrait s'asseoir. Elle manque l'accoudoir du canapé, bascule en arrière et vient s'écraser par terre. Le coccyx claque contre le parquet et la bière sur les murs. Ca fait beaucoup rire les vieux types du staff boissons avec leurs t-shirts «Tirage sous pression». Elle dit que comme ça elle tombera pas plus bas. On la rassoit et on lui dit à demain.
Le lendemain, comme prévu le soleil est parti, retour à l'ambiance pêche en haute mer sur l'île de Jersey à la Toussaint. On mange des crêpes savoyardes en gros pull et on lit Ouest France qui a décidé que les Blonde Redhead s'appelaient les «Blonde Red Hair». On se dit que notre consoeur au coccyx amoché doit aussi travailler à Ouest France.
Intramuros, on croise des amis dans un café où les types boivent leurs demis au zinc suspendus sur des balançoires. L'entrée est interdite «aux photographes malpolis», «à la malbouffe qui pue» et aussi aux gens qui ont «un taux d'alcoolémie supérieur à celui du patron». En version anglaise c'est encore plus clair: «If you want to get drunk, go away. If you're cool, take a table». On lit que le café est «classé historique et hystérique», on se dit que les Malouins ont beaucoup d'humour. Dehors c'est le déluge, alors on fait du shopping à Promod, ce qui nous était pas arrivé depuis 1999.


On va se réchauffer au café backstage, on a l'air de débarquer d'une randonnée dans le Morvan en plein novembre. On s'excuse de sentir le chevreuil crevé. On disserte sur l'invention d'un kway-camping Quechua où on se lancerait en arrière pour se déployer en tente. On recroise notre amie au coccyx amoché qui a encore bouclé autant d'articles qu'elle a ouvert de bières. Elle raconte comment elle s'est cassée les côtes ici il y a trois-quatre ans. On se dit qu'on devrait créer la «Croûte du rock» avec elle.

3h30. Battles passe au travers des boules quies et achève tout le monde. Le meilleur concert de l'avis des festivaliers. On se dit que certains vont devoir se faire déterrer au tracto-pelle. A la sortie, la gendarmerie attend tout le monde avec des éthylotests et un grand sourire.
JOUR 3


20h30. Okkervil River arrive sur scène, notre voisine est heureuse de voir enfin «des barbus avec des chemises». Mais pour les bûcherons-folk-sortis-de-leur-cabane-au-Canada il faudra encore attendre un peu. Le chanteur est très content de nous voir tous, il le dit et le redit, il demande qu'on tape dans les mains, mais au bout d'un moment son «Clap your hands!» se transforme en «Clap your fucking hands».


A lire, à voir, à écouter:
Les concerts de l'édition 2011 sur le site d'Arte Live Web.
Notre récit de l'édition hiver 2011.
Notre récit de l'édition 2010 et notre billet sérieux.
Notre récit de l'édition 2009.
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