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Billet de blog 30 août 2010

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Quelles réponses face à la crise de la gouvernance économique de la zone euro?

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La crise des dettes souveraines a ébranlé ce qui restait du système de gouvernance de l’Union économie et monétaire (UEM), défini par le Traité de Maastricht en 1992 et complété par le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) en 1997. Face au risque de défaut de la Grèce, les tergiversations allemandes et le choix d’une intervention du FMI – nécessaire dans l’urgence mais symptôme de l’impuissance de l’Europe à résoudre elle-même ses problèmes internes –, ont fortement refroidi les espoirs de ceux qui croyaient à une « crise salvatrice » permettant d’effectuer un véritable pas en avant.

Pourtant, la question d’une refonte profonde du système de gouvernance européen est aujourd’hui posée. La perte de crédibilité du régime actuel est l’une des causes des turbulences observées ces derniers mois sur les marchés financiers et des pressions en faveur de politiques de rigueur en Europe. Certains gouvernements, en particulier l’Allemagne, ont déjà avancé des propositions précises. Conformément à une position déjà ancienne, la France a défendu l’idée d’un « gouvernement économique » de la zone formé par le Conseil européen des chefs d’Etat et le gouvernement des 16 Etats membres – proposition aussitôt contestée par les autres pays membres de l’UE et en particulier l’Allemagne. Les déclarations communes de Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ne parviennent pas à masquer les divergences d’approche qui subsistent. Le président du Conseil européen Herman van Rompuy a décidé de prendre le dossier en main pour tenter de dégager un terrain d’entente et fera des propositions à l’automne.

L’enjeu du débat actuel est bien la définition d’un nouveau modèle. Ce modèle doit permettre d’assurer à tous les Etats membres de la zone euro un environnement stable, autorisant la conduite des politiques les plus favorables à leur croissance dans la solidarité réciproque. Le risque aujourd’hui est double : voir la solidarité s’effacer devant la contrainte, en ne laissant le choix qu’entre mener des politiques « orthodoxes » ou sortir de la monnaie unique ; n’ajuster qu’à la marge un système aujourd’hui décrédibilisé qui, sous l’apparence de la règle, a autorisé tous les excès. Dans la phase actuelle, il est devenu urgent d’adopter un système à la fois crédible et économiquement pertinent : une telle réforme permettrait aussi de convaincre les créanciers que la consolidation des finances publiques aura bien lieu, donc de différer celle-ci dans le temps pour préserver la croissance à court terme.

1 - Face à la crise d’un modèle de gouvernance, réaffirmer les règles de l’UEM en durcissant les sanctions ne constitue pas une réponse adaptée.

1.1 - La crise d’un système

Le système né du Traité de Maastricht et du Pacte de stabilité tentait de concilier la mise en place d’une politique monétaire commune avec le maintien de la compétence nationale pour la politique budgétaire. Cela devait permettre d’une part de préserver la souveraineté des Etats, qui restaient seuls maîtres de leurs choix budgétaires et pouvaient ainsi répondre au mieux aux chocs économiques asymétriques, et d’autre part, d’éviter par un mécanisme contraignant qu’un Etat isolé fasse subir aux autres membres de la zone les conséquences d’un dérapage de ses finances publiques (risque de « passager clandestin »). Deux règles ont été mises en place dans cet objectif. La première, c’est le pacte de stabilité et de croissance : un double plafond de déficit (3% du PIB) et de dette (60%) que les finances publiques nationales doivent respecter sous peine de sanctions (amendes). La seconde : un Etat doit assumer seul un éventuel défaut (règle dite de « no bail out »), toute autre solution conduisant à inciter à des comportements imprudents.

Le premier pilier de cet édifice – le pacte de stabilité et de croissance – s’est lézardé lorsqu’en 2003, après avoir lancé une procédure de déficit excessif contre le Portugal, le Conseil a suspendu la procédure visant la France et l’Allemagne. Cet événement a mis en évidence les faiblesses intrinsèques du Pacte de stabilité – les fondements économiques peu solides du seuil de 3% de déficit, l’absence de toute incitation concernant le haut du cycle économique, l’inadaptation d’une règle rigide à la diversité des situations possibles –, et a décrédibilisé l’ensemble du système de règles et de sanctions, vis-à-vis desquels les gouvernements ne se sont plus sentis liés. La réforme du Pacte de stabilité en 2005 a échoué dans son objectif d’améliorer le respect des règles par leur assouplissement.

Le deuxième pilier de l’équilibre – le « no bail out » – s’est effondré à l’occasion de la crise grecque : malgré les réticences de l’Allemagne, le principe d’une assistance mutuelle a prévalu. L’idée selon laquelle un Etat membre de l’UE pourrait continuer à faire seul ses propres choix budgétaires et donc en assumer seul les conséquences perd sa validité dès lors que le principe de solidarité intra-européenne s’impose en cas de risque de défaut. Le maquillage des comptes grecs par les autorités de ce pays a également décrédibilisé un mécanisme de surveillance ex ante qui favorisait les comportements de « passager clandestin » au nom du respect de la souveraineté.

Pendant les dix premières années de l’UEM, les Etats de la zone euro ont donc pu profiter de la stabilité monétaire et des faibles taux d’intérêt permis par l’introduction de la monnaie unique sans qu’il existe dans les faits de véritable discipline collective. Il apparaît aujourd’hui que le défaut de ce système ne réside pas seulement dans sa tolérance vis-à-vis des « dérapages budgétaires » mais, également dans l’absence de surveillance de l’ensemble des risques pesant sur la stabilité de la zone, tels que l’excès d’endettement et les bulles de prix d’actifs. Parallèlement, l’UEM a continué à fonctionner sans qu’aucun mécanisme de gestion des crises ne soit prévu.

Il est donc nécessaire de reconstruire l’ensemble de l’édifice, autrement dit de mettre en place un régime de gouvernance économique qui soit doté d’un dispositif crédible pour faire face à une crise des finances publiques. Un régime adapté aux périodes de prospérité comme aux périodes de crise, et qui permette de suppléer à l’absence de deux mécanismes d’ajustement au sein de la zone euro : le taux de change et le taux d’intérêt.

1.2 - Comprendre les positions allemandes.

Le débat actuel est marqué par des divergences extrêmement fortes opposant en particulier la France, qui a toujours préféré à la « règle » un mode de gouvernance fondé sur la « discrétion », c’est-à-dire les choix politiques collectifs, et l’Allemagne, qui analyse la situation actuelle comme la conséquence logique d’un excès de laxisme et interprète les appels à la « coordination » ou au « gouvernement économique » comme des marques d’indulgence vis-à-vis de comportements peu rigoureux.

Depuis le début de la crise, l’Allemagne a rechigné à un accord de l’UE sur l’assistance à la Grèce. Tout d’abord, l’opinion publique allemande est apparue comme largement hostile à une aide qui apparaissait injuste pour les pays ayant respecté la discipline budgétaire. Si 70% des Allemands étaient opposés à une intervention de leur gouvernement aux débuts de la crise grecque, ils étaient près de 80% à la fin du mois de mars. 32% des Allemands estimaient même que la Grèce devrait sortir de la zone euro le temps de remettre de l'ordre dans ses comptes et 40% que leur pays serait mieux en dehors de la zone euro ! Cette hostilité s’est accompagnée de dérapages verbaux d’une grande violence dans certains médias qui a envenimé les relations entre l’Allemagne et la Grèce. A l’approche d’importantes élections en Rhénanie du Nord Westphalie le 10 mai dernier, qu’elle a finalement perdues, Angela Merkel n’a pas voulu prendre le risque de brusquer l’opinion.

Au-delà de ce contexte politique, les réticences allemandes s’expliquent évidemment par des déterminants plus profonds, de nature historique et idéologique : l’attachement à la stabilité monétaire et à une monnaie forte – la crise des dettes souveraines ayant entrainé la chute du cours de l’euro jusqu’à 1,1877 dollar, pour la première fois depuis mars 2006 – renforcé par un modèle de croissance fondé sur les exportations. Dans ce contexte, la question de la prévention des comportements « irresponsables » de gouvernements qui ne partagent pas toujours sa philosophie économique est cruciale du point de vue de l’Allemagne : il faut à tout prix éviter le risque d’aléa moral, c’est-à-dire envoyer les « bons signaux ». C’est pour cette raison que l’Allemagne a défendu l’intervention du FMI et non des Etats de la zone euro pour soutenir la Grèce, avant de se résoudre à une intervention conjointe puis à la création d’un Fonds européen de stabilité financière (FESF). C’est aussi pour cette raison qu’elle conteste le rachat de titres de dette publique par la Banque centrale européenne. Et c’est au nom des mêmes principes qu’elle défend aujourd’hui le retour à un régime strict de règles et de sanctions.

1.3 - La tentation du « retour à la règle »

La République fédérale a exposé sa vision de la réforme de la gouvernance de l’Union économique et monétaire dans un « plan en 9 points » présenté par Wolfgang Schäuble. On peut identifier trois grands principes qui inspirent ces propositions de réforme.

Le premier principe est la réaffirmation de la primauté de la règle, c’est-à-dire du respect des « valeurs de référence » d’un déficit public inférieur à 3% du PIB et d’une dette publique inférieure à 60% du PIB fixées par le Traité. Les programmes de stabilité et de convergence établis par les gouvernements seraient examinés non plus par la Commission et le Conseil mais, pour éviter les interférences de considérations politiques, par un organisme indépendant, à savoir un groupe d’experts ad hoc ou la BCE elle-même. Les règles du Pacte seraient obligatoirement intégrées sous forme d’un engagement contraignant dans le droit national (de préférence dans la Constitution, comme en Allemagne). Enfin, au niveau européen, l’objectif de solde budgétaire à moyen terme établi pour chaque pays pourrait être rendu juridiquement contraignant dès lors que sa dette publique dépasse les 60% du PIB.

Le second principe est le renforcement des sanctions : la mise en œuvre du volet « répressif » du Pacte et de ses différentes étapes serait désormais, si l’on en croit les déclarations des dirigeants allemands, quasi automatique et moins soumise à la discrétion du Conseil. Les violations répétées de ses engagements par un Etat membre donneraient lieu à la suspension du versement des fonds structurels européens, voire, dans les cas extrêmes, à leur retrait. Selon une autre variante, à laquelle Nicolas Sarkozy a donné son accord, les pays qui enfreignent les règles pourraient voir leur droit de vote au Conseil suspendu pendant un an.

Le troisième et dernier principe est la réaffirmation du principe de responsabilité nationale : un mécanisme permanent de résolution des crises d’endettement souverain prévoirait des dispositions permettant le défaut « ordonné » d’un Etat membre. En d’autres termes, des mesures de supervision financière adéquates seraient introduites pour éviter qu’un défaut de paiement n’ait de conséquences systémiques. Dans le même ordre d’idées, la surveillance ex ante serait étendue aux questions de compétitivité, avec là encore des sanctions, mais elle serait essentiellement focalisée sur les Etats membres non compétitifs, appelés à faire des efforts. En d’autres termes, c’est toujours avant tout à l’Etat membre fautif, et non à ses partenaires, d’assumer les conséquences de politiques irresponsables.

Ces propositions s’inscrivent dans la lignée de la philosophie du « constitutionnalisme économique ». Elles visent en effet à concilier le maintien du souverainisme budgétaire avec la contrainte de « règles de finances publiques », rendues cette fois crédibles grâce à l’introduction de sanctions particulièrement dissuasives. Dans l’idéal, ces sanctions seraient quasi automatiques, c’est-à-dire enclenchées dès que les seuils de référence sont dépassés. La surveillance ferait la part belle aux experts plutôt qu’aux décideurs politiques. C’est donc le choix de la norme contre la « discrétion ».

1.4 - Les insuffisances et les dangers de l’approche allemande.

Un tel projet apparaît déficient à plusieurs titres. Tout d’abord, il conduit à renouer avec une logique de « seuils » – et d’abord celui des 3% de déficit public – qui n’a pas de sens d’un point de vue économique. En effet, ce qui compte, c’est le caractère soutenable ou non de la dynamique d’endettement. En haut de cycle, un déficit public pourtant modéré peut avoir des effets néfastes, tandis qu’en bas de cycle, un déficit public nettement supérieur à 3% peut, comme c’est le cas aujourd’hui, être indispensable au maintien de la croissance.

De plus, il ne permet pas suffisamment de tenir compte des autres types de déséquilibres macroéconomiques. En raison d’un endettement privé excessif, le solde public espagnol est passé de +2% en 2007 – l’Espagne faisait alors figure d’élève modèle du Pacte de stabilité – à -11,2% en 2009. Le plan Schäuble prévoit bien d’étendre la surveillance aux questions de compétitivité, mais une telle surveillance est difficilement réductible à la logique de la règle et des « seuils ». De plus, il est bien précisé que le fardeau de l’ajustement reposerait entièrement sur les pays « non compétitifs ».

Enfin, d’un point de vue démocratique, alors même que l’objectif est de laisser les mains libres aux Etats membres « vertueux » en réaffirmant leur totale souveraineté budgétaire, cette philosophie se révèle extrêmement problématique : la décision politique est toujours enserrée par des règles rigides – constitutionnelles et/ou européennes – et la surveillance est confiée aux juges ou aux experts. D’autre part, une sanction telle que la suspension du droit de vote d’un Etat membre au Conseil constituerait une violation majeure de la souveraineté : il est étonnant qu’elle puisse être aujourd’hui sérieusement envisagée.

2 - Pour un nouveau régime de gouvernance économique fondé sur la solidarité et les choix collectifs.

Le renforcement voire la « restauration » de la philosophie initiale de l’Union économique et monétaire n’est pas à la hauteur de la crise que connaît ce régime de gouvernance. Pour que le nouveau système soit à la fois crédible et légitime, le respect des règles communes et la responsabilité nationale en matière de finances publiques doivent évidemment avoir leur place, mais ne peuvent constituer des dogmes sur lesquels l’ensemble de l’édifice reposerait.

Tirer les leçons de la crise impose d’évoluer vers un système qui ferait davantage de place aux choix collectifs des Etats membres de la zone euro, à la discipline collective qui doit nécessairement l’accompagner, mais aussi à la solidarité réciproque. Un tel système doit néanmoins répondre de manière satisfaisante au problème de l’aléa moral. Un dispositif permanent de gestion des crises, accompagné d’une surveillance multilatérale plus exhaustive et d’une véritable coordination des politiques économiques, avec des instruments assurant le respect des choix collectifs, permettrait de remplir cet objectif. Enfin, les solutions fédéralistes, politiquement moins réalistes, ne sauraient être écartées d’emblée du débat et pourraient constituer un nouvel objectif à terme pour l’UEM. Toutes ces solutions permettent d’envisager une autre voie que le maintien de la souveraineté nationale encadrée par des règles rigides : celle de la souveraineté partagée.

2.1 Un mécanisme permanent de gestion des crises

Ce qui est apparu étonnant au début de la crise grecque, c’est le refus dans un premier temps, dans la lignée de la vision allemande de l’UEM, de mettre en place pour les Etats ayant adopté l’euro un mécanisme équivalent à celui du « fonds d’européen d’aide à la balance des paiements » (doté de 50 milliards d’euros) qui bénéficie aux autres pays de l’Union et permet à la Commission d’emprunter sur les marchés, après autorisation du Conseil, avec la garantie des Etats membres.

Le 9 mai dernier, l’ECOFIN a finalement adopté un mécanisme assez similaire avec la création du Fonds européen de stabilisation financière (FESF). Ce fonds communautaire, mobilisable à très court terme, est doté de 60 milliards d’euros qui seront engagés en cas de difficultés d’un Etat membre, l’activation de ce mécanisme étant soumis à une forte conditionnalité. La Commission européenne pourra lever les fonds sur les marchés, après autorisation du Conseil des ministres, et avec la garantie des Etats membres. Ce mécanisme sera maintenu aussi longtemps que nécessaire afin de préserver la stabilité financière. Les Etats membres de la zone euro sont prêts à compléter ces ressources via une entité ad hoc qui est garantie sur une base proportionnelle et de manière coordonnée par les Etats membres participants, jusqu’à 440 milliards d’euros, et qui expirera après une période de trois ans. Le FMI pourra également intervenir à hauteur de 250 milliards d’euros au profit des pays de l’eurozone menacés.

De plus, la mise en place de ce mécanisme de stabilisation s’est accompagnée de la décision de la BCE d’intervenir sur les marchés secondaires pour racheter des titres de dette publique de certains Etats – les plus fragilisés –, afin en particulier de mettre fin à des phénomènes spéculatifs, sans que ne soit fixé de plafond sur les rachats de dette publique. Si on ne peut que se féliciter de cette décision, il faut toutefois souligner qu’il serait préférable que le rachat de dette se fasse avec plus de transparence, la BCE annonçant pour l’instant le montant total des rachats mais pas l’identité des émetteurs des titres rachetés. De plus, jusqu’ici, la BCE n’a acquis que 47 milliards d’euros d’emprunts d’Etat, soit une somme dérisoire au vu des volumes de dette qui circulent sur les marchés. Enfin, l’opposition de l’Allemagne à cette pratique, par la voix du président de la Bundesbank Axel Weber, successeur putatif de Jean-Claude Trichet, peut faire douter de la pérennité de ce type de mesures, alors même que la BCE stérilise ses interventions et ne fait donc pas fonctionner – à tort, puisque nous sommes en période de tensions déflationnistes – la « planche à billets ».

L’important, c’est surtout qu’avec ce mécanisme de stabilisation et cette intervention de la BCE, deux tabous fondateurs de la zone euro ont été remis en question : d’une part, le principe d’une solidarité des finances publiques est maintenant amorcé à travers le mécanisme de garantie commune ; d’autre part, la BCE va désormais directement acheter de la dette publique et de la dette privée sur les marchés. Ce qui, bien évidemment, ne se fera pas sans contrepartie, les dirigeants de la zone euro ayant exigé, en contrepartie de leur aide, que les Etats en difficulté consentent de plus importants sacrifices budgétaires.

Il faut souhaiter que ces dispositifs soient pérennisés. Le FESF pourrait à terme évoluer vers un véritable Fonds monétaire européen (FME) capable d’intervenir pour résoudre les crises internes sans l’intervention du FMI, qui, malgré l’aide européenne, fixe encore l’essentiel des conditions de l’aide dans le cas de la Grèce. Les problèmes internes de la zone euro ne relèvent pas du mandat habituel du FMI puisqu’elle est aujourd’hui parfaitement solvable – beaucoup plus que ne le sont les Etats-Unis, le Japon ou le Royaume-Uni par exemple. L’aide apportée par la zone euro en cas de crise doit être soumise à une conditionnalité avant tout déterminée par ses propres objectifs de politique économique, et doit trouver sa contrepartie naturelle dans un dispositif solide de prévention fondé sur la surveillance multilatérale.

2.2 - Une coordination économique exhaustive.

Pour prévenir l’apparition de telles crises et tirer pleinement parti d’une union monétaire, les grands choix de politique économique devraient être effectués en commun. Cela implique que chaque Etat membre s’engage sur un objectif budgétaire crédible et respecte ses engagements. La surveillance des finances publiques devrait être davantage centrée sur le niveau de la dette et la soutenabilité à terme des finances publiques (incluant les engagements implicites), qui constituent les seules variables véritablement pertinentes, plutôt que sur le niveau du solde budgétaire lui-même. Mais la coordination économique dont a aujourd’hui besoin la zone euro ne se limite pas aux questions budgétaires.

S’il existe une leçon à retenir de la crise actuelle, c’est que la surveillance ex ante des Etats membres de l’UEM ne peut se limiter à contrôler un ou deux indicateurs (le déficit et la dette publique). Même si le cas grec s’analyse comme une crise d’endettement public « classique », la crise actuelle de la zone euro est aussi due à ses déséquilibres macroéconomiques et financiers internes, lesquels se sont accumulés pendant ses dix premières années d’existence. La faiblesse des taux d’intérêt a entrainé dans certains pays, tout particulièrement en Espagne ou encore en Irlande, une mauvaise allocation des ressources, alimentant une consommation à un niveau insoutenable, les bulles immobilières et l’accumulation de l’endettement privé. La surveillance doit donc être étendue aux différentiels d’inflation et de compétitivité et aux déséquilibres des comptes courants entre les Etats membres. Les variables et les mesures concernées sont multiples – évolution des salaires, encadrement réglementaire, notamment du secteur financier, réformes structurelles, certaines dispositions fiscales, etc. Autant de paramètres qui doivent être discutés par l’Eurogroupe, par exemple sur la base d’un « tableau de bord » rassemblant divers indicateurs, et sur lesquels les Etats membres devraient prendre des engagements. Ces différents facteurs peuvent être tout aussi déstabilisants que le laxisme budgétaire.

Une telle coordination doit permettre l’émergence de stratégies coopératives. En effet, les déséquilibres internes qui nuisent à la cohésion de la zone euro constituent un problème commun qui nécessite une action collective, souvent réciproque et donc non limitée aux efforts d’ajustement des pays qui souffrent d’un manque de compétitivité prix. Comme l’a récemment rappelé Patrick Artus, demander à un pays comme l’Espagne d’atteindre un niveau de performances industrielles à l’exportation équivalent à l’Allemagne n’aurait pas de sens et irait à l’encontre des logiques de spécialisation productive qui font l’intérêt d’une union monétaire. Des politiques de renforcement de la compétitivité de certains pays sont certes nécessaires, mais, symétriquement, les politiques non coopératives et non coordonnées de désinflation compétitive, telles que celle menée par l’Allemagne ces dix dernières années, ne devraient plus avoir cours. Les membres de l’Eurozone doivent définir ensemble, en fonction de la situation de chaque Etat membre, les trajectoires d’ajustement les plus appropriées.

Un degré de coordination des grands choix de politique économique beaucoup plus élevé, et couvrant un champ nettement plus étendu, est nécessaire au niveau européen. Une telle coordination ne peut faire l’objet dès aujourd’hui d’un constat d’échec puisqu’elle n’a jamais été sérieusement tentée – les règles du Pacte de stabilité étaient en effet réputées suffisantes. L’article 121 du Traité prévoit une telle coordination des politiques économiques mais n’a jamais conduit à l’adoption d’instruments de droit dérivé, à la différence des dispositions du Traité sur les finances publiques. Le Conseil s’est toujours jusqu’ici contenté de déclarations d’intention vagues dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne » et non d’un dispositif structuré de coordination comme pour le Pacte de stabilité.

2.3 - Les choix collectifs plutôt que la norme.

Un système de gouvernance fondé sur des choix collectifs partagés implique la discipline dans le respect de ces choix. Il faut donc d’abord accepter le droit de regard de nos partenaires sur les choix nationaux. L’idée de la Commission européenne – confirmée par le Conseil – que le premier semestre de l’année budgétaire devienne un « semestre européen » pour la préparation du budget de l’année suivante est une bonne proposition. En effet, même si elle provoque aujourd’hui des protestations au nom de la souveraineté et des prérogatives des parlements nationaux, elle permettrait une coordination beaucoup plus efficace des choix budgétaires. De plus, il est possible de l’aménager afin de la concilier avec le respect de la démocratie parlementaire.

Dès le début de l’année, le Conseil européen identifierait les principaux défis économiques de l’Union européenne et donnerait des orientations budgétaires stratégiques qui devraient constituer la base des projets de budget des Etats membres. Leurs documents stratégiques, le Programme de stabilité (ou de convergence pour les non membres de la zone euro) et le « Programme national de réforme » (dans le cadre de la stratégie « UE 2020 »), seraient ensuite publiés simultanément. Enfin, le Conseil fournirait son évaluation des programmes nationaux pendant ce premier semestre de l’année, c’est-à-dire avant la discussion parlementaire sur le budget, et adresserait des recommandations aux Etats membres qui formaliseraient ex ante les engagements de chacun vis-à-vis de ses partenaires. Au-delà du cadrage des lois de finances nationales que permettrait un tel exercice, les questions liées à la compétitivité et aux déséquilibres macroéconomiques, et les mesures nationales qu’elles nécessitent, seraient pleinement intégrées à la discussion.

Pour garantir le respect des prérogatives parlementaires, on peut imaginer qu’un débat suivi d’un vote ait lieu devant le Parlement national sur le Programme de stabilité et le Programme de réforme. Ensuite, l’évaluation de ces deux documents stratégiques par le Conseil pourrait être réalisée, comme l’a proposé Pervenche Bérès, par une formation « élargie » de l’ECOFIN dans laquelle chaque Ministre serait accompagné par le président de la commission parlementaire compétente, le rapporteur général du budget et un membre de l’opposition. Enfin, cette évaluation pourrait elle-même être précédée par un débat au Parlement européen, lequel obtiendrait ainsi une sorte de droit de regard sur les orientations budgétaires de l’ensemble des Etats membres.

En ce qui concerne la surveillance ex post, l’existence de règles de finances publiques – éventuellement recentrées sur le ratio de dette sur PIB plutôt sur le déficit – et le volet « répressif » du Pacte de stabilité seraient maintenus, tout en laissant au Conseil les marges de discrétion nécessaires. Mais plutôt que de promouvoir une logique de sanction « automatique » lorsqu’un seuil de déficit public est dépassé, comme semble vouloir le faire le plan Schäuble, le Conseil doit pouvoir apprécier la situation économique de chaque Etat membre dans sa complexité. Les trajectoires de consolidation des finances publiques doivent être propres à chaque situation et il faut pouvoir continuer à tenir compte de circonstances particulières qui justifient économiquement un dérapage des finances publiques.

Comment faire pour éviter que le maintien de cette « souplesse » introduite par la réforme du Pacte en 2005 n’aboutisse pas au laissez-faire constaté ces dernières années ? Plusieurs conditions doivent être réunies.

Tout d’abord la confiance, qui suppose la sincérité et la crédibilité des engagements pris par chacun. Les projets de budget de chaque Etat pourraient par exemple être établis sur la base de prévisions communes concernant la croissance et les grandes variables économiques (évolution des prix, du change, du baril de pétrole, etc.), préparées par la Commission et discutées collectivement au Conseil. Les compétences et le droit de regard d’EUROSTAT sur les données nationales devraient être élargis pour empêcher tout maquillage des comptes publics « à la grecque ». Enfin, le bon fonctionnement du système suppose la confiance accordée à l’ensemble des acteurs institutionnels, en particulier la Commission dans son rôle de préparation des recommandations, ce qui suppose un renforcement important de ses capacités d’expertise en matière d’analyse des finances publiques, des autres équilibres macroéconomiques, de connaissance des politiques publiques nationales, etc.

Ensuite, la discipline collective quant aux engagements pris, qui est la seule alternative à la rigidité de la règle. On pourrait imaginer que le dépassement du ratio de dette de référence habilite le Conseil à voter des sanctions. Ces dernières ne seraient pas automatiques, mais le Conseil en ferait usage dès lors qu’un pays aurait méconnu les engagements pris devant ses partenaires en matière budgétaire. En bonne logique, les sanctions devraient aussi être appliquées lorsqu’un Etat n’applique pas les recommandations du Conseil dans les autres domaines de politique économique. La Commission jouerait son rôle de « gendarme » en adressant directement des avertissements, comme le Traité de Lisbonne le permet, aux Etats qui vont dans la mauvaise direction. Pour que le système soit crédible et efficace, ces sanctions pourraient être dissuasives mais graduées en fonction du non-respect des engagements, dans une logique de désincitation aux comportements non coopératifs (les dépôts et amendes prévus aujourd’hui par le Pacte étant très peu crédibles car il est politiquement difficile d’imposer un fardeau aussi lourd à un pays très endetté). L’utilisation du budget de l’UE, par exemple en suspendant voire en retirant une partie des fonds de la politique de cohésion alloués aux Etats fautifs, semble être la solution la plus adaptée. Le niveau de sanction pourrait être modulé en fonction du niveau de développement de l’Etat concerné pour éviter de désavantager les Etats membres qui dépendent le plus de l’aide régionale.

Enfin, la responsabilité. L’efficacité du système suppose en effet que chaque Etat joue son rôle et se donne les moyens de se conformer à ses obligations. L’implication des Parlements nationaux dans le mécanisme de surveillance européen favoriserait son appropriation au niveau national. L’adoption d’une règle budgétaire en haut de cycle et, plus généralement, de « cadres budgétaires » nationaux doit être encouragée, mais en respectant les choix et les caractéristiques du système politique de chaque Etat. A cet égard, il n’est pas souhaitable que chaque pays se dote d’une norme budgétaire constitutionnelle « à l’allemande ». Tout d’abord, rien ne justifie de corseter ex ante la politique budgétaire sous le contrôle du juge constitutionnel alors que des situations particulières et difficilement prévisibles peuvent surgir. Ensuite, il est possible d’envisager des dispositifs moins rigides et qui permettent pourtant de contrôler l’évolution des finances publiques. Par exemple, le rôle du budget pluriannuel mis en place en France pourrait être renforcé. Dans les pays de tradition parlementaire et à mode de scrutin proportionnel, les « contrats de coalition » gouvernementale fixant des objectifs pour les finances publiques sur la durée d’une législature peuvent être des instruments très efficaces. Chaque Etat doit prendre sa part de responsabilité en fonction de choix et de traditions qui lui sont propres.

Encourager à l’échelle européenne l’adoption dans chaque pays d’une norme d’utilisation des excédents budgétaires ou de dispositifs du type « rainy day funds » (mise en réserve des excédents budgétaires conjoncturels) qui mettraient fin aux illusoires « cagnottes fiscales », serait sans doute une manière plus efficace d’inciter à des comportements vertueux que la fixation de règles rigides sur le solde budgétaire ou le niveau d’endettement ou de déficit public.

2.4 - Vers des solutions fédérales ?

Les solutions d’inspiration plus fédérale aux problèmes de cohésion interne de la zone euro sont aujourd’hui peu discutées, car elles sont jugées, à raison, peu réalistes politiquement. Mais il n’existe aucune raison d’écarter a priori ces solutions. La crise grecque a montré que des dogmes hier intangibles pouvaient être remis en cause sous la pression des faits. D’autre part, il est indispensable d’inscrire dès maintenant la réflexion sur l’avenir de l’Union économique et monétaire dans le temps long. Une Union monétaire constituée de plusieurs Etats souverains implique nécessairement de trouver un juste équilibre entre des instruments nationaux, qui peuvent faire l’objet d’une coordination, et des outils fédéraux, comme l’est aujourd’hui la politique monétaire.

La création d’une agence européenne de la dette, comme l’ont proposé les socialistes européens, est aujourd’hui parfaitement réalisable. L’idée est de rendre possible l’émission d’obligations européennes (euro bonds), émission justifiée dès lors que les choix de politique budgétaire seraient désormais étroitement coordonnés. Un tel dispositif créerait un marché plus liquide, consoliderait le rôle de l’euro comme monnaie de réserve et permettrait d’alléger le coût de l’endettement pour les contribuables européens. Comme l’a souligné l’économiste Thomas Piketty, l’émission d’une dette publique européenne permettrait à l’UE de reprendre à son compte le surplus d’endettement créé par la crise de 2008-2010, soit entre 20 et 30 points de PIB selon les pays, et à chaque Etat membre d’assainir durablement ses finances publiques.

De plus, afin d’éviter l’aléa moral, une partie seulement de la dette de chaque Etat pourrait ainsi être mutualisée, et la possibilité pour un Etat de recourir à ces euro bonds pourrait être modulée en fonction de la crédibilité de sa politique budgétaire, comme l’a récemment proposé l’Institut Bruegel.

La création d’outils de stabilisation macroéconomique au niveau fédéral bute aujourd’hui sur la faiblesse du budget de l’UE, limité à 1% du PIB. On pourrait néanmoins envisager la création d’un fonds de stabilisation conjoncturelle alimenté par les excédents budgétaires mutualisés des Etats membres. Un tel dispositif poserait néanmoins des problèmes d’aléa moral que des « rainy-day funds » organisés sur une base nationale permettent d’éviter. La solution la plus convaincante à terme serait la « communautarisation » de dépenses fortement liées à la conjoncture telles que l’assurance chômage, ce qui supposerait un abandon des spécificités nationales dans ce domaine, abandon qui poserait des difficultés politiques évidentes. Même s’il n’existe pas d’alternative à court terme à la coordination des choix nationaux, rien n’empêcherait que la montée en puissance à terme de mécanismes complémentaires d’ajustement à l’échelon fédéral commence dès maintenant à être envisagée.

2.5 Une Union économique et monétaire gouvernée.

Sur le plan institutionnel, l’Union économique et monétaire se trouve aujourd’hui dans une étrange situation. Alors qu’elle a désespérément besoin d’un système de gouvernance crédible, le flou domine quant aux responsabilités des divers acteurs. L’Eurogroupe, qui réunit les Ministres des finances, est doté d’un président permanent, Jean-Claude Junker, dont le rôle politique semble faiblir depuis quelques mois au profit du nouveau président du Conseil européen, Herman van Rompuy, qui a décidé de prendre en main ce dossier.

Il serait logique, comme l’a récemment proposé la France avant de faire marche arrière, qu’un Conseil européen « zone euro », réunissant les chefs d’Etat et de gouvernement des Etats ayant adopté la monnaie unique, soit placé au centre du dispositif, mais cela pose la délicate question de la place des autres Etats membres. Le lien étroit entre les questions qui concernent la zone euro et les questions de politique économique générales, abordées notamment dans le cadre de la stratégie « UE 2020 » (ex-Lisbonne) suppose sans doute de trouver des mécanismes pour éviter de donner l’impression de créer une « avant-garde » qui exclurait certains pays (la distinction entre l’Eurogroupe et l’ECOFIN, au niveau des Ministres, est d’ailleurs parvenue à trouver cet équilibre). Cependant, il apparaît nécessaire aujourd’hui d’assumer pleinement le besoin d’une coordination beaucoup plus étroite qui existe entre les pays partageant une même monnaie en différenciant les instances. Il devrait également être possible de distinguer entre les Etats qui n’envisagent pas l’adoption de la monnaie unique à moyen terme, tels que la Grande-Bretagne, et ceux qui font de son adoption rapide un objectif central de politique économique.

Contrairement aux positions du gouvernement français toutefois, il est dangereux de vouloir concevoir un « gouvernement économique » de la zone euro de nature purement intergouvernementale qui laisserait à la Commission européenne un rôle marginal. Il faut peut-être renforcer ses capacités d’expertise dans ce domaine, mais celle-ci est institutionnellement la mieux placée pour définir les contours de la coordination des politiques économiques en préparation des travaux du Conseil. Sur le modèle du Haut représentant pour la politique extérieure, un « M. Euro », à la fois Vice-président de la Commission, commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires (et éventuellement des questions relatives aux marchés financiers) et président de l’Eurogroupe, pourrait être nommé pour coiffer l’ensemble de l’édifice – et représenter la zone euro vis-à-vis de ses partenaires commerciaux, notamment dans le dialogue concernant la politique de change.

Une UEM « gouvernée », donc dotée de mécanismes de coordination crédibles et efficaces , pourrait aussi, au-delà de la seule maîtrise de ses déséquilibres internes, poursuivre des orientations de politique économique à l’échelle de l’ensemble de la zone. Dans le système décrit plus haut, on pourrait envisager l’adoption, avant la préparation des budgets nationaux (ou d’éventuels collectifs budgétaires), d’orientations budgétaires horizontales permettant de faire face de manière coordonnée à un choc symétrique de grande ampleur comme la crise de 2008-2009. Plus généralement, ce système pourrait permettre l’émergence d’un « policy-mix » à l’échelle européenne.

Enfin, il pourrait permettre l’émergence de la politique de change qui fait aujourd’hui défaut à la zone, co-déterminée par l’Eurogroupe (le Conseil étant compétent pour en adopter les orientations) et la BCE, laquelle pourrait poursuivre dans la voie engagée récemment des interventions monétaires dites « non conventionnelles ». La nécessité d’une telle politique est particulièrement impérieuse aujourd’hui, car les consolidations budgétaires réussies, c’est-à-dire non déflationnistes, reposent toujours sur leur accompagnement par une politique monétaire accommodante et la dépréciation du change.

Conclusion

Dans la zone euro, le choix de la solidarité interne et de la logique de « souveraineté partagée » serait économiquement plus pertinent et démocratiquement plus légitime que la combinaison du « souverainisme » budgétaire et de règles rigides complétée par l’affirmation du seul principe de responsabilité nationale face aux errements des politiques économiques. A condition d’accepter cette mise en commun de la souveraineté, il est possible aujourd’hui d’adopter des mécanismes qui doteraient la zone euro d’un véritable « gouvernement économique ».

Une telle évolution verrait la zone euro se doter d’un dispositif institutionnel crédible - car doté des incitations appropriées - pour gérer ses propres déséquilibres internes, prévenir et gérer les crises de toutes natures et mener une politique économique cohérente. Son adoption rendrait crédible les engagements des Etats membres en matière de consolidation des finances publiques et permettraient donc de l’étaler davantage dans le temps afin de ne pas nuire à la croissance à court terme. En effet, la crise des dettes souveraines dans la zone euro, alors que d’autres grands pays ont des niveaux de déficit public et d’endettement supérieurs, s’explique aussi par la crise d’un système de gouvernance qui, en dix ans, a été constamment contourné et a perdu toute crédibilité aux yeux des marchés financiers.

Au-delà des seules questions de stabilisation conjoncturelle, il est essentiel que les Etats membres de la zone euro mènent des politiques permettant de rehausser leur croissance potentielle, qui allègeraient d’autant le poids de l’endettement public. Ils devraient ainsi s’engager tout particulièrement à atteindre les objectifs de la stratégie « UE 2020 » en investissant dans la connaissance et le capital humain, ce qu’ils n’ont pas assez fait pendant les 10 premières années d’existence de l’Union économique et monétaire.

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