Masques de cochon sur le visage et faux calibres à la main. Le Front de libération du cochon lutte depuis un an contre le hallal. Et contre tout ce qui représente l'Islam. Rencontre avec le « cochon en chef » à la Maison flamande de Lambersart, près de Lille.


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Dans la Maison flamande (association d'extrême droite basée à Lambersart, près de Lille), qui accueille le Front de libération du cochon (FLC), il faut aller au fond de la première salle à gauche, monter un escalier sombre, tourner à gauche et... le cochon est là. Il attend. Assis bien droit sur une chaise, les deux pattes avant posées sur la table, il porte une veste militaire. Derrière lui, un immense drapeau noir au sigle du FLC. Et à sa droite, bien en évidence, un revolver noir. « C'est un faux bien sûr ! », lance une voix masculine, teintée d'un léger accent du Sud-Ouest. Ouf. Le cochon ne grogne pas. Après quelques prises de vues, le masque tombe. « On étouffe là-dessous ! » L'entretien peut commencer.
« L'abattage rituel musulman est un acte politique, et non religieux. »
Né il y a environ un an, le FLC se donne pour objectif de lutter contre l'Islam en France et en Europe. Mais « en faisant quelque chose de sympa, de potache », explique le cochon en chef. Il souhaite garder l'anonymat. « C'est une organisation clandestine, et armée », précise-t-il en montrant le pistolet en plastique du doigt. « On pousse le clin d'œil jusqu'au bout. »
« Nous pensons que dans la société française, il y a un vrai problème avec une islamisation de plus en plus importante. » Alors les costumes et les vidéos coups de poing, « c'est pour dédramatiser le combat », explique l'homme. Pourquoi le cochon ? « C'est devenu un symbole de lutte contre l'islam, et contre le hallal pour commencer.» C'est donc le premier cheval de bataille du FLC, qui considère l'abattage rituel musulman comme « un acte politique, et non religieux ».
« L'Islam modéré est presque plus pernicieux, plus dangereux que l'Islam radical. »
Le Front a organisé en octobre dernier une « grande fête du cochon » dans la banlieue de Lille, où une grosse centaine de participants a dégusté cochons grillés et autres dérivés de l'animal. « Nous ne sommes pas islamophobes, se défend le leader du FLC, nous sommes des islamo-résistants. » Et, selon lui, manger du cochon fait partie de ces actes de résistances.
Mais derrière des accents humoristiques, le FLC tient un discours très dur. « L'Islam est une religion de guerre et c'est un danger pour les futures populations européennes. » Selon le Front, « le hallal n'est que la partie visible de l'iceberg d'une religion qui veut tout contrôler avec les dérives qu'on connaît : lapidation, charia... » Et quand on évoque avec lui une possible distinction entre Islam modéré et Islam radical, le militant rétorque : « c'est de la poudre aux yeux tout ça, il y a juste des musulmans plus intelligents que d'autres, qui choisissent la voie du débat. Au contraire, l'Islam modéré est presque plus pernicieux, plus dangereux ».
En France, l’Etat n’a pas d’organisme chargé de lutter contre l’islamophobie. Seule une Organisation non gouvernementale s’en charge : le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Samy Debah, son président, déplore ce silence étatique. « Il y a des statistiques qui comptabilisent les actes racistes et antisémites, mais aucune pour l’islamophobie alors que c’est un vrai problème pour le pays. » Le CCIF tente donc, à son niveau, de collecter et recenser les actes islamophobes. Conclusion du rapport 2010 : le phénomène n’en finit pas de croître.
Et le FLC ne fait pas rire Samy Debah. « Ce genre de collectif peut prêter à sourire mais derrière ces actions clownesques, il y a un message très dangereux pour la société toute entière. » Pour lui, « on utilise délibérément la fanfaronnade, pour mieux infiltrer les esprits. »
Sur le site du CCIF, un seul slogan qui tente de sensibiliser les opinions : « l’islamophobie n’est pas une opinion, c’est un délit ».
Maud de Carpentier