Billet de blog 30 mars 2010

christophe louis

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Etre hébergé est un droit

La fermeture des centres d'hébergement sans autre proposition est contraire aux principes définis par la loi, depuis le 7 mars 2007. C'est pourtant ce qui va arriver le 31 mars.

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La fermeture des centres d'hébergement sans autre proposition est contraire aux principes définis par la loi, depuis le 7 mars 2007. C'est pourtant ce qui va arriver le 31 mars.

Article 4 de la loi DALO
Abrogé par LOI n°2009-323 du 25 mars 2009 - art. 73

Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation.

Il y a des dates qui portent un symbole, le 15 mars est devenu depuis plusieurs années synonyme d'expulsion !

Une autre date moins connue, le 31 mars, met fin au dispositif de renforcement hivernal. A cette date un certain nombre de personnes sera remis à la rue, avec comme seuls abris les trottoirs de nos villes, un cabanon ou une tente.

Depuis des années, nous admettons le principe d'un dispositif de mise à l'abri pour la période hivernale, entre le 1er novembre et le 31 mars. Ce renforcement de moyens offre des places d'hébergement temporaires. Celles-ci sont composées de « chaises de nuit » dans des locaux, de lits pliants dans des gymnases, des matelas au sol dans des salles polyvalentes.... Et parfois des chambres en caserne, qu'il faut libérer au début du printemps.

Au cœur de l'hiver, cette année, plus de 8 100 places ont été ouvertes, la succession des périodes de froid fut éprouvante pour les personnes à la rue. Contrairement à ce que l'on évoque souvent, nous avons enregistré une réelle volonté des personnes à se mettre à l'abri et constaté une forte affluence dès l'ouverture de ces lieux.

Hélas ! Au 31 mars, toutes ces places seront inexistantes, les chaises revenues à leur usage, les lits pliés, les matelas rangés. Les personnes ! Elles retournent à la rue... Peut-être pour y mourir !

Nos gouvernants nous disent chaque année qu'il y a suffisamment de places d'hébergement. Nous aimerions les croire ! Mais ce n'est pas le cas.

Des consignes ont été données aux préfets, pour la sortie de l'hiver, mais sans critères de résultat.

Les raisons de cette situation sont multiples, le manque de logement dû à un déficit de constructions pendant plusieurs années, un contexte économique qui ne permet pas aux plus pauvres de se maintenir dans un logement.

Résultat : une augmentation de la demande d'accès aux places d'hébergement.

Dans tout ce dispositif, nous retrouvons un public très hétérogène, certains voudraient nous faire croire que ces personnes sont malades, mais regardons la diversité de l'ensemble : familles, femmes seules avec enfants, jeunes, travailleurs à temps partiel, demandeurs d'asile... Et également le « clochard », celui qui s'est chronicisé dans la rue, le symbole de nos représentations. La liste est longue et ne cesse de s'allonger. Chaque type de cas demande un traitement adapté de sa situation, un accompagnement spécifique.

Que faire, me direz-vous ! Le gouvernement, les services de l'Etat et les associations travaillent sur la mise en place d'un nouveau dispositif. On ne peut que s'en réjouir, mais si nous souhaitons que ce dispositif ne soit pas « mort né », il faut prendre des décisions immédiates. Il faut une politique volontariste et d'urgence, que l'Etat se donne les moyens pour permettre à la personne de ne pas être contrainte de vivre dans la rue. Nous demandons le respect des différentes lois, SRU, DALO...

Le collectif Les morts de la rue et la Fondation Abbé Pierre ont mené une action vers ces personnes hébergées dans des conditions de mise à l'abri, en permettant de faire valoir leur droit, par le DALO (volet logement et hébergement). De nombreux dossiers ont été déposés devant les commissions, pour la grande majorité ils seront éligibles mais hélas sans propositions d'hébergement.

Dans ce dispositif, les préfets doivent apporter une réponse entre 3 et 6 semaines, sur Paris plus de 140 personnes, parfois des personnes très fragiles, sont en attente d'une place depuis le mois d'avril 2009. D'autres dossiers de demandes DAHO arrivent et s'empilent.

Le législateur a mis en place la loi DALO, c‘est une réelle avancée mais nous le constatons, cette loi, après 3 ans d'existence, est déjà in-opérationnelle, dans les territoires tendus, là où les problèmes sont les plus importants, car il n'y a aucune solution de logement ou d'hébergement pour ces personnes.

Alors ! Qui pourra exiger de nos gouvernants la mise en place des moyens nécessaires à l'application de la loi?

Nous souhaitons rappeler que cette politique concerne la population la plus vulnérable de notre pays.

Depuis le 1er janvier 2010, 74 personnes de la rue sont décédées en France, dont 4 enfants.

Christophe Louis, président du collectif Les Morts de la Rue

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