
Lorsqu’une femme a été valide et qu’elle est devenue une grande écrivaine reconnue internationalement, on voit peut-être juste une femme qui dans sa vieillesse utilise un fauteuil roulant et a perdu quelques facultés, comme c’est le cas de beaucoup de personnes âgées.
Moi, sur cette scène, j’ai vu une écrivaine handicapée. Maryse Condé ne peut plus écrire avec ses mains. C’est à son amie Pascale Thériez qu’elle a dicté son dernier livre, L’Évangile du Nouveau monde. C’est à son amie Eva Doumbia qu’elle a demandé d’être sa prête-voix dans la rencontre car Maryse Condé n’a plus la fluidité d'élocution que l’on attend dans ces rencontres.
Elle a trouvé des stratégies pour fonctionner autrement et continuer d’être dans le monde, d’apporter au monde parce que le handicap « entrave mais n’empêche pas », comme le dit mon amie No Anger au sujet de la douleur dans un article récent de son blog À mon geste défendant, qu’elle a écrit avec ses pieds.
Cette soirée était belle, pour beaucoup de raisons, mais aussi parce qu’elle montre à qui veut le voir les potentialités des corps handicapés quand on laisse place, avec naturel, à l’interdépendance et aux fonctionnements divers.
Être les mains et la voix de Maryse Condé a été certainement perçu comme un privilège, pas comme une charge.