Le 25 décembre, le père Noël a fait une drôle de surprise à une famille de l'Estaque. Un petit chat noir déposé dans l'escalier vertigineux qui monte à la maison. Un miaulement plaintif, une petite boule noire frigorifiée sur la dernière marche. Mais comment est-elle arrivée là ? Comme elle n'a pas pu ouvrir le portail toute seule et que le mur est haut, les déductions sont faciles. Ce chat est un cadeau, encombrant et inutile, et celui qui l'a reçu a vite fait de s'en débarrasser.
La réputation de cette famille est d'avoir des animaux et de les aimer. La solution du cadeau encombrant est vite trouvée. Le jeter par dessus le mur assez haut, ou bien le balancer à travers le portail, subrepticement ouvert. Et voilà. Une bonne chose de faite. Aux autres les litières, l'éducation du chaton et les croquettes.
Mais ces personnes-là ont déjà deux chats et deux chiens. La petite boule de poils est terrorisée. Il faut trouver une solution. Après l'avoir nourrie, soignée, câlinée, dorlotée, rassurée, ils la laissent dans le garage, où il fait encore bon. Impossible de la laisser dans la maison, les autres animaux sont manifestement contre.
Ces habitants de l'Estaque sont bien embêtés. Ils en parlent à ma mère qui pense aussitôt à moi, bien entendu. Mais voilà, le nombre de chats commence à dépasser les capacités d'accueil de mon petit logement, certes avec coins et recoins, fauteuils et coussins, mais un peu surchargés.
Et c'est là que le hasard fait bien les choses (dit-on). Ma fille, celle de l'ours retrouvé, avait décidé, je ne sais pas pourquoi, d'adopter, en cette nouvelle année, un chat noir. Elle m'en avait parlé quelques jours auparavant. Un chat qu'elle appellerait Pirate, pour tenir compagnie aux deux autres chats de la maison, Pétard et Tempête.
La gentille famille au cadeau en boule de poils est rassurée. Elle transfère après pas mal de difficultés le chaton dans un carton, et direction Aubagne. Le trajet est court, mais le minet est affolé.
Aussi, à peine arrivé à destination, le carton s'ouvre malencontreusement dans le garage et la boule noire s'échappe et se cache. Vu le capharnaüm du lieu, une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Et c'est bien ce qui arrive. On a beau chercher, appeler, se mettre à quatre pattes, le museau noir est invisible.
Nous fermons donc le garage, en espérant que la faim fera sortir le mini loup de son trou.
Je suis prise de remords. Ce chaton a vécu tellement d'aventures en peu de temps ! Je retourne donc dans le garage, et je miaule, comme les mamans chats. Je sais faire, j'ai appris avec les miennes, si si, je vous assure, c'est un langage universel !
Finalement, c'est une bonne solution. Le chaton, curieux, s'avance vers moi, et je l'attrape fermement par le cou, comme toute bonne maman chatte. Je le serre contre moi, je sens son petit cœur battre la chamade. Il me griffe un peu, mais sagement, se laisse mettre à l'abri chez ma mère, en attendant l'arrivée de ma fille prévue pour ce dernier week-end de l'année.
Je vous laisse imaginer la tendresse de ce week-end là. Un chaton roi des chatons, choyé pendant les quelques jours qui le séparent de son voyage à Montpellier, dans sa nouvelle maison. Nous lui racontons l'histoire de ses deux frères qui ne l'attendent pas mais seront ravis de le voir. Bon, enfin c'est ce qu'on lui dit. On lui raconte qu'il va s'appeler Pirate... Seulement voilà. Ce chaton a un museau de chaton femelle. Il n'est pas facile de vérifier, il est encore très petit, tout juste deux mois, semble-t-il. Mais il est rare que je me trompe (n'est-ce pas... Pépito?)
Donc, pour moi c'est sûr, il ne peut pas s'appeler Pirate. Ou alors un prénom de femme pirate. Elles ont existé, les femmes-pirates, même meilleures quelquefois que les hommes (dit-on). Après quelques recherches wiki, nous tombons sur l'histoire d'Anne Bonny.
La boule de poils a trouvé son prénom : c'est Bonny. Et ça lui plait. Elle lève son regard d'eau vers nous, ronronne et s'endort, le ventre rebondi d'avoir trop mangé, fatiguée de ses aventures et rassurée sur son sort.
La petite chatte est bien arrivée à Montpellier. Elle se fait petit-à-petit à son nouveau logement. Ses frères sont un peu surpris, un peu agacés, mais curieux.
C'est une jolie année 2013 qui débute pour elle. Je lui souhaite tout le meilleur, et surtout je souhaite qu'enfin les gens réfléchissent avant d'offrir un animal en cadeau. Cette petite boule de poils là a eu de la chance, pour combien qui vont se retrouver au froid dans quelques jours, abandonnés lâchement.
Bonne année à tous, et faites de votre année 2013 une année de luttes pour toutes les injustices, même celles faites aux animaux.