C'est un vendredi soir à la chaussée mouillée, sur laquelle on glisse un peu. Il a plu quelques heures auparavant, et il fait froid.
Le Cercle Républicain de l'Harmonie, Aubagne, se vide de ses clients habituels : d'ici quelques minutes tout va être chamboulé, les tables serviront de support à des piles de polars et de romans, les chaises seront à la disposition de la centaine de personnes qui a sagement réservé. Place au polar...
Nous, avec notre petite association toute jeune d'à peine six mois, nous sommes sur des charbons ardents. C'est que ce soir, ici même, nous allons vivre un moment privilégié avec trois auteurs qui nous ont fait l'immense plaisir d'accepter de participer à cette veillée des livres, veillée des mots, autour d'une délicieuse soupe qui chauffe dans de grosses casseroles et dont l'arôme se répand déjà dans la cuisine. Les gâteaux maison attendent d'être coupés, le petit vin de pays et les fruits sont aussi arrivés à bon port.
Le responsable et gérant des Éditions « Parole » initiateur et créateur de l'idée Soupe aux Livres est aussi présent. Il nous aide à mettre en place les chaises pour que tout le monde soit le plus proche possible des écrivains. Le libraire dispose ses bouquins, nous, nous avons l'impression d'être partout en même temps. Recevoir, discuter, expliquer, c'est un baptême du feu, c'est une fabuleuse première fois... On revoit les discours, on perd les papiers, on les retrouve, on barre, on corrige puis on froisse le tout : les mots sortiront du cœur...
Nos auteurs sont là. Installés au bar, devant un verre de vin, Maurice Gouiran, René Frégni et Gilles Del Pappas, éternels complices, discutent à bâtons rompus.
La salle est pleine. Tout peut commencer.
Ici, je ne vais pas retranscrire toute la soirée. J'y étais, dans une bulle de bonheur, attentive, captivée par les mots de ces hommes passionnés par ce métier d'écrivain.
Les questions fusent, ils répondent, écoutent attentivement une nouvelle écrite par un des participants et lue par un autre, ils partagent ces moments de communion totale avec les lecteurs, sans un seul moment d'ennui.
Soudain une voix s'élève dans un coin de la salle... Nous avions réservé une jolie surprise à nos invités. Un groupe de chanteurs « de rue » El Kabaret de Leda Atomica ont décidé de mettre de l'ambiance. Surprise accueillie par des applaudissement fournis, un étonnement joyeux se lit sur les visages.
Pour nous, c'est une satisfaction sans limites ; les gens rient des histoires racontées par nos trois complices... ou pas, en écoutant René Frégni parler des prisons, en écoutant Gilles raconter l'anecdote du vieux monsieur qui n'a que quelques mois à vivre et dont les derniers jours sont enchantés par les livres qu'il lit... la soupe servie est délicieuse, rien ne manque, le vin et le pain sont en quantité, les fruits et les gâteaux sont dévorés.
Le partage est réussi. Le corps et l'esprit repus. Pari gagné.
En sortant de la salle, tous nous posent la même question : c'est quand la prochaine ?