Je suis une mère à chats. Une femme à chats. Je vais vieillir avec mes chats.

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C'est le terme employé lorsqu'on veut faire peur à une femme sans "homme", sans mari. On lui dit "tu vieilliras avec tes chats". Comme si c'était une tare, une peur, un échec, une vie triste.
Alors voilà. Ce n'est pas une phrase que l'on m'a dite, et pourtant mon avenir (ce qu'il en reste) sera avec des chats. Et j'en suis contente. Parce qu'aucun de mes chats, même mon Tempête si possessif ne m'a soumise chimiquement pour m'offrir à d'autres chats. Je n'ai pas eu besoin d'être endormie pour ouvrir ma porte aux quelques misérables chats qui passaient par là.
J'ai commencé tôt ma vie avec eux. Toute petite, même bébé, une minette dont on m'a parlé, m'a sauvée d'un serpent, alors que ma maman m'avait déposée sous un arbre dans le jardin.
Je crois avoir gardé depuis, une éternelle reconnaissance pour ces animaux, si fragiles, si indépendants, si quémandeurs d'amour malgré tout, avec leur mignonnerie cruelle, lorsqu'une souris passe par là.
Ma vie avec elles et eux n'est que ronrons et rires. Et câlins.
Je ne résiste pas. Evidemment, même si à un moment de ma vie leur nombre était important, je n'en ai plus que trois. Eh oui, ces animaux-là leur vie est un peu plus courte que la nôtre. Enfin ça dépend des endroits. En ce moment, en Palestine et au Liban, par exemple, les enfants meurent souvent avec leurs chats.

Par contre, en Turquie, les chats sont rois. Bon, jusqu'à ce que un fou décide d'envoyer des bombes, on sait jamais.
A un autre moment de ma vie aussi, j'avais un mari. Pas le meilleur au monde, je faisais avec. Jusqu'à ce jour où, devant ma porte, un petit miaulement triste et désespéré me fait me précipiter pour ouvrir. Un chaton déposé là, qui ne demandait que chaleur et tendresse. Et croquettes aussi.
Je l'ai accueilli, nourri, cajolé. Et l'homme est rentré du travail. Je lui ai présenté le nouveau colocataire. Sa réponse a scellé son avenir : "c'est le chat ou moi !" Ben c'est le chat, mon chéri, évidemment ! ai-je répondu sans même avoir à réfléchir. C'est le mari qui a réfléchi, et est resté encore quelques années. Et a fini par partir me laissant avec les meilleures compagnies qui soient : les enfants et les chats.
Du bonheur, tout pur, une ronronthérapie journalière, des dépenses de véto, des pleurs lorsqu'un ou une part dans un autre monde, des disparitions aussi, mais toujours cette pureté dans la maison. Ces merveilles posées ça et là, dormant, jouant, ronronnant, me rassurent : je vieillirai avec des chats.
