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Billet de blog 27 juin 2012

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Cet air qui lui rappelle...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

… Toutes leurs discussions, des heures passées, accrochées sur la ligne qui les reliait.

Décor. 

Une caserne de pompiers, dans une jolie ville du sud de la France. Lui est pompier volontaire depuis de nombreuses années. Elle, c'est juste elle. Femme amoureuse, mère un peu dépassée, jolie quarantaine bien avancée, un travail, des amis.

Leur rencontre ne mérite pas d'être racontée. Elle est banale, comme toutes les rencontres. Un homme, une femme. L'un des deux est libre, l'autre ne l'est pas.

Leur histoire s'en accommode le mieux possible. Elle tourne autour des moments d'évasion, et les plus disponibles sont dans la nuit, quand il est derrière son standard, attendant les appels. Les heures sont calmes, mais même si la distance qui les sépare n'est que de quelques centaines de mètres, il ne peut la rejoindre. Le seul moyen à sa disposition, c'est ce téléphone, posé sur le bureau.

Elle, elle attend. Elle refuse de dormir tant que son portable n'a pas sonné. Souvent, pendant de longues minutes, ils ne se parlent pas. Ils partagent l'instant, le souffle, une chanson, l'endormissement qui se glisse malgré tout.

Puis il parle de lui, de son travail, de l'accident qu'il vient de voir. Des soins, de l'hôpital et du personnel soignant.

Il raccroche. « Ne dors pas ; on a un départ, le VSAB est prêt, mais je reviens. »

Les nuits. 

Malgré tout ses yeux se ferment. Elle serre le téléphone tout contre elle. Parfois la nuit se découpe en tranches d'appel. Elle sait les accidents, les suicides, les morts. Parfois les interventions sont si longues que sa nuit n'est qu'un seul sommeil. Le matin, avec la sensation d'un repos mérité, vient le manque. Le manque du manque de sommeil, la drogue de l'appel. 

Le reste de ce temps. 

Leur histoire n'est qu'une succession de SMS, de conversations brisées, de moments volés. Quelquefois, il se permet de venir passer la nuit auprès d'elle. Le bip d'alerte à côté du lit, ils ne dorment pas.

La musique aussi s'invite dans cette intimité. Ils écoutent une radio, toujours la même, banale comme une histoire d'adultère. Ils se promettent une éternité qu'ils n'auront pas.

J'ai pensé à tout ça, un matin de bonne heure, quand pour une raison quelconque, j'ai mis cette station sur mon auto-radio, je suis passée près de cette ville, et c'est juste cet air-là, celui qui mettait le creux dans le coeur de ces nuits blanches. 

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