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Billet de blog 24 novembre 2021

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Une larme émotive pour l'Opus "La Création" de Chucho Valdez

Philharmonie de Paris, 20 novembre 2021. Musique pour l'histoire.

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Une larme émotive pour l’opus « La Création » de Bebo Valdez 

Quel moment d’apothéose le concert du pianiste cubain Chucho Valdez, « La Création » à la Philharmonie de Paris, l’avant dernier weekend de novembre de 2021!. On fêtait son 80ème anniversaire. 

À l’égal de la « Suite de la Américas » du compositeur cubano-mexicain Dámaso Perez Prado dans les années 50, le nouvel opus « La Création » de Chucho Valdez restera dans les annales de la musique latine de ces temps. Conçu pour un quartet c’est avec un grand orchestre de 25 musiciens qui s’est produit : Trompettes, saxophones, trombones nous rappellent les Big Band d’un Dizzi Gillespie, d’un Machito ou du grand Tito Puente. Ici nous étions face à Chucho Valdez en tant que directeur musical avec ses deux confrères pianistes Hilario Duran et John Beasley. Étaient aussi : trois percussionnistes de tambours Batá, Aña et Abericula qui se jouent lors des cérémonies du Panthéon Yoruba; Roberto Jr Vizcaino aux congas, Dafnis Prieto derrière la batterie, les saxophonistes Marcus Strickland, Carlos Averhoff Jr., les trompettistes Bryan Lynch et Etienne Charles et l’Amazing Keystone Big-Band. Une femme Yeni Valdéz au chant. 

Profitons pour faire hommage à l’un de ses percussionnistes Anga Diaz qui nous a quitté en 2006. 

Il s’agissait d’un Oratorio. « La Création » conte le récit de l’arrivée sur le continent américain, dans la Caraïbe, des esclaves d’Afrique de l’Ouest et en particulier ceux de la culture Yoruba. Un déferlement de sons, rythmes profonds, chants et harmonies parfaites interprétés avec une grande dextérité. Dans sa dimension épique, l’ambition de « La Création » est une « histoire de rédemption et de liberté », divisée en quatre parties, qui intègrent dans son écriture des éléments de Santeria, de musique d’Afrique de l’Ouest, du blues, de jazz, de la salsa. Une larme émotive est sortie de mes yeux tant l’émotion était au suprême. Il m’a rappelé le moment immortel du dernier concert de Miles Davis au théâtre de Châtelet à Paris au début des années 90. Musiques de la « quatrième dimension » pourrait-on-dire, honorables, respectueuses. Chucho Valdez dans sa créolité envoie et rétribue à l’Afrique l’intensité de ses rythmes, de sa spiritualité, et de sa sagesse mais aussi de sa souffrance. Sous le culte aux divinités, la Santeria à Cuba et au Venezuela, mais aussi le Candomblé et la Macumba au Brésil, le Voodou en Haiti : c’est du syncrétisme, du métissage, de la culture actuelle pleine d’âme Yoruba, dont il s’agit. 

Diverses croyances et religions se sont rencontrées pendant toute la période de la colonisation : mythes indiens, religion africaine, iconographie chrétienne et ceci se ressent à l’écoute de « La Création » que Chucho Valdez nous offre. Les durs moments de l’esclavage, de la colonisation, de l’extermination des populations locales lors de l’arrivée des Européens, toute cette histoire déjà racontée musicalement par C.V., se synthétise dans cette Ode à la liberté. Dans ce moment particulier où l’ont voit des peuples clamer justice, demander l’auto-determination, récupérer leur dignité, leurs terres et les arts, la musique accompagne toutes ces luttes. Merci Maestro Chucho. 

Chose curieuse, hier a été innocenté par la Cour des États-unis le militant d’extrême droite qui a tué par balles deux manifestants antiracistes lors des émeutes qui avaient éclatées deux jours plutôt après q’un policier eut grièvement blessé un homme noir en lui tirant dans le dos à sept reprises, à Kenosha (USA) en 2020. Bref, résurgence de ce fléau, le racisme, qui nous accable et qui est présent partout dans le monde. 

Merci Monsieur Chucho pour cet Opus qui arrive à bon moment!. 

Une autre concomitance, celle de la présentation de l’ouvrage de Françoise Vergés avec la contribution visuelle de Seumboy Vrainom:€, « De la violence coloniale dans l’espace public, visite du Triangle de la Porte Dorée à Paris », de la Collection : Arpentages, Shed Publishing, à la Flèche d’Or à Paris, pour laquelle je suis allé m’excuser de ma « non présence » après le concert de Chucho Valdez à la Philarmonie. Tes luttes sont les nôtres. 

Quelque chose du beau et positif, le « Guiness World records, de l’Orchestre la plus grand du monde vient d’être adjugé à l’expérience musicale et orchestrale vénézuélienne de El Sistema, qui a regroupé 12 000 jeunes et adolescents musiciens avec comme Directeur musical un jeune agé seulement de dix-sept ans. Ils ont gagné!. Nous les félicitons de tout notre cœur. Ils m’ont déjà fait verser des larmes émotives lors de concerts à la Salle Tereza Carreño à Caracas. 

Vincent + Feria, Paris le 20 novembre 2021.

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