Trop con, Trop triste!
Je suis resté silencieux une bonne semaine. Dans un des derniers commentaires, je disais que le jeune maire de Tana, Andry Rajoelina avait sans doute perdu la partie.
Et je reprends la parole tant, les erreurs d’un seul homme muré dans ses certitudes, et la quasi absence d’erreur d’un autre, peuvent en quelques jours reverser une situation a priori fort compromise. En effet samedi 7 février, la position du maire s’est assez fortement arrangée, ou du moins, celle du président en exercice s’est dégradée.
Alors que la situation semblait pouvoir se déliter tranquillement en sa faveur, le président en exercice a cru bon de mettre de l’huile sur le feu, en destituant le maire de sa fonction. Comme d’habitude avec ce gouvernement (et avec bien d’autres de part le monde) la légalité des mesures, décrets, lois est plus que sujette à caution. La procédure engagée contre le maire est plus que douteuse, et celui-ci n’a pas manqué, par l’intermédiaire de ses avocats, de demander une annulation du décret en question devant la cour compétente, ce que n’a aucunement fait le président de son coté. Ainsi, toute la semaine, le président a donné l’image d’un trublion obsédé par son pouvoir, par son ennemi, et peu préoccupé des lois, de la simple justice, de son peuple. Sa crédibilité en a pris un coup, aussi bien auprès dudit peuple que des instances internationales. De son coté le maire s’est cantonné dans des actions prises dans un cadre probablement assez légal. Bien sur, ce samedi, devant 100 000 personnes rassemblées sur la place du 13 mai, il va annoncer son gouvernement de transition… Pas très légal tout ça, mais assez légitime !
En effet la seconde caractéristique du retournement (possible) de situation est la position prise depuis deux jours par les instances internationales. L’ambassadeur des USA, puis la pseudo ambassadrice française (il n’y a plus d’ambassadeur de France à Tana depuis plusieurs mois, c’est une autre histoire…), s’exprimant au nom de la communauté européenne, ont eu des mots très violents à l’endroit du président et de sa politique. Diplomatiques, mais en langage diplomatique très violents. D’abord, car ils sont très près de relever de l’ingérence, et ensuite car ils sont très explicites. En résumé il est conseillé au président de ne pas « confondre les comptes de l’état et ceux de sa société TIKO » et il est convenu que « Madagascar se trouve clairement en situation d’échec économique », coté USA. Coté Europe, il est suggéré au président « d’écouter son peuple », de « mettre en oeuvre les politiques de développement attendues avec célérité » et « d’assurer une gestion plus sérieuse des comptes de l’état »…
Ces déclaration m’exaspèrent. En effet, elle ne manquent pas de bon sens et relèvent de la réalité. Mais, ces commentaires sont vrais depuis des années. Et pendants toutes ces années, ces instances n’ont rien dit et n’ont rien fait ! Et pourtant, à moins d’être des incapables notoires, elles ne peuvent pas ne pas savoir. Elles savent, bien entendu, elles savent. Par exemple, les paiements des prêts du FMI ont été suspendus depuis le mois de décembre dernier, bien avant que commence le moindre mouvement. Personne n’en a rien dit. Pour des raisons en particulier liées à l’achat du fameux avion présidentiel… Mais pas uniquement : Détournement de dons japonais en fournitures scolaires, détournement de camions allemands donnés à la mairie de Tana, détournement de fonds destinés au développement agricole, détournement de fonds de réhabilitation routiers, etc. Tous ces faits sont parfaitement connus des instances internationales, qui devant une révolte populaire légitime, semblent soudainement les découvrir. Quelle attitude lamentable, caractéristique du fonctionnement habituel de nos soi-disant démocratie envers les pays pauvres. J’ai honte d’être français.
PS 1 : Le gouvernement français a donc signalé l’aveuglement du président malgache envers les attentes de son peuple. Il ne fait en fait que suivre l’exemple du président français… Ca me rappelle une histoire de paille et de poutre.
PS 2 15H30 heure locale: les déclaration internationales ne peuvent que conforter le maire. A l’issue de son discours et de l’annonce de son gouvernement, ses partisans se sont rendus vers le palais présidentiel. Les deux premiers barrages, tenus par des militaires ont laissé passer. Le dernier barrage, tenus pas des mercenaires, a tiré sans sommation dans la foule. Les morts dépassent la dizaine. Bravo à nos instances internationales débiles et irresponsables.
Bon WE