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Billet de blog 3 mai 2018

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Un dîner rue de Solférino (12)

Les affaires reprennent. Questions sans réponses.

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Les affaires reprennent

Questions sans réponses

Illustration 1

- Planche pourrie, tu dis ? Qu’est-ce que tu dis, René, qu’est-ce que tu viens de dire ? Je croyais que c’était le majordome, la planche pourrie ?

...

Avant, personne n’aurait osé dire ça, que Marco était un menteur, personne, ou alors... peut-être était-ce parce que je n’écoutais pas ? Je l’aimais tellement, je croyais tellement bien le connaître, jamais..., jamais je n’aurais imaginé qu’il était le genre d’homme, jamais… Comme la femme au tablier, pareil… Comme le ministre, pas possible… Comme l’inaccessible diva de la maison de Neuilly, inimaginable…

...

- Non, pas du tout, Louise, le majordome, il écoutait, c’est tout. Les planches pourries, c’était les autres : le conseiller, le jardinier, le chauffeur…

- Le jardinier, tu es sûr ?

Pourquoi me dire ça, maintenant ? Parce qu’au moment où tout bascule, tout le monde sort de sa cécité, tout le monde se remet en mémoire les événements oubliés, enfouis dans le cerveau, ou est-ce que c’est moi ?

- Non, je n’en suis pas certain, non… Je suis l’affaire vaguement, comme tout le monde… C’est l’une des télénovela de l’été, cette histoire, mais nous, on s’en fout, non ?

Ensuite, il avait développé son obsession, René : les vertiges de la classe moyenne… Moi, je préfère le Tour de France, forcément… Le Tour de France, c’est plus signifiant, comme dirait Roland Barthes, et en plus, il y a des paysages magnifiques, on s’étonne de la Riviera, parfois, ou alors des grands Parcs, aux Etats-Unis, ou encore des rizières miroitantes de la Cochinchine, mais quand on y réfléchit, la France, c’est magique, non ?

- Ces paysages qui défilent, jamais les mêmes, j’essaye de convaincre Jean-Rémi, l’été prochain, de partir en roulotte ou en camping-car, tous les deux, ou alors en péniche, mais je ne sais pas pourquoi ça n’a pas l’air de le brancher : il aimerait mieux La Baule, ou alors Saint-Tropez, ou alors un trekking dans le désert ou dans l’Himalaya…

- Pff, toi et Jean-Rémi en roulotte, je demande à voir… Et même le camping, mes chéris, je ne vous vois pas bien monter la tente avec les piquets, faire la queue pour les frites et danser la lambada tous les soirs, d’autant plus que France-Cul, ça ne passe pas partout, figure-toi, même avec le wifi… Le Tour de France, oui, d’accord, pour ta thèse, mais Tony Gallopin, Thibaut Pinot, Romain Bardet et consorts, et tous les autres, ça fait moyennement rêver, tout de même, pas plus que les casquettes Ricard ou le petit lion du Crédit lyonnais… Le bronzage du cycliste, non plus, d’ailleurs, je me souviens de Thomas, l’été, il avait l’air d’une tranche napolitaine, Thomas… Ou alors, c’est le barrage de la langue, encore, parce que je reconnais que Giovanni Visconti, ça le fait plus, incontestablement, ça le fait plus…

- Non mais tu es snob, ou quoi ?

- Ben oui, pourquoi je n’aurais pas le droit ? Sauf que je dis n’importe quoi, là, parce que j’aimerais bien savoir, pour le jardinier… Qu’est-ce que tu en penses ?

- Ça, tu ferais mieux de le demander au play-boy… Ce Moreno…

- Pourquoi tu dis ça ?

- Parce que son père est un copain du père de Lisa, mais que ça m’a l’air d’une belle affaire d’entre-soi, cette histoire, et que personne ne dit rien…

- Ah bon ? Moreno ? Je ne le vois plus, en ce moment, Moreno... Je croyais qu’il était parti avec cette fille, cette Laetitia, non, Sabrina, enfin je ne sais plus. Mais il n’est pas impossible qu’il se planque, maintenant que tu me le dis, c’est probable, comme Marco, d’ailleurs, mais en ce qui concerne Marco, je crois bien qu’il est… en Argentine ? Tu n’imagines pas ce que c’est, pour moi, c’est hallucinant. Tu n’imagines pas… Je n’ai pas de mots. Je ne voulais pas le croire, tu sais, mais tout le monde me dit le jardinier… Il en avait peut-être deux, le père de Lisa ? Ou alors une escouade ? Pourquoi est-ce que serait lui ?

- Sans vouloir, et bien, sans vouloir… Je crois malheureusement que l’abus de faiblesse et la captation d’héritage ne sont peut-être pas constitués mais…

- La captation d’héritage, c’est ça que je voulais te demander, il y a quand même quelque chose que je ne comprends pas, c’est comment on pourrait lui reprocher ça, à Marco, alors que de toutes les façons, Lisa, elle allait bien hériter un jour, alors… Pourquoi ?

- Tu n’as pas lu ? En fait, Lisa, ce n’était pas sa fille, seulement sa fille adoptive, ce qui fait que… D’après ce que j’ai compris, Lisa et lui se sont arrangés pour lui faire signer tous les papiers, en douce, en cachette de la famille, et maintenant, la famille, elle veut reprendre ses droits, normal. C’est comme ces gens, dans le château avec le gourou, quand ils ont fini par sortir du rêve et de l’illusion…

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