Mardi 10 juin – Musique d’entrée en classe : Loïc Nottet, Monsieur Madame (proposition d’élève)
En 3ème, on enchai^ne les leçons, depuis des heures et des heures. Sauf accident, je vais terminer pile le tout dernier chapitre pendant la toute dernière heure de l’année. La bonne nouvelle, c’est que le programme sera bouclé. La mauvaise nouvelle, c’est qu’on s’emmerde.
Les 5ème sont en sortie scolaire. Je ne les ai pas vus hier (lundi de Pentecôte), je ne les revois donc que vendredi. Vont-ils seulement se rappeler mon nom ?
En 4ème on attaque le dernier chapitre d’EMC ; et, là aussi, de l’année. Cette fois on ne finira pas le programme : 3 chapitres de géo et 3 d’histoire passent à la trappe. L’année de 4ème c’est souvent l’occasion de débattre, travailler les méthodes, donc on prend notre temps… Bilan : 12 chapitres seulement sur 18. Mais je les préviens, en 3ème, il y en a 21, des chapitres, et faut tous les faire !
Ils ont moins envie d’être en 3ème, d’un coup.
Pour démarrer ce chapitre d’EMC sur La Justice, je leur demande des anecdotes vécues, vus, entendues, qui font intervenir ladite justice. Dans le lot, il sort :
- Une descente de police chez un élève (avec menottes, dit-il) : son frère apparaissait sur des vidéos de télésurveillance pendant un acte suspect
- L’affaire du petit Grégory relancée, pour la 394ème fois
- Deux filles chopées par la gendarmerie devant le collège, à deux sur une trottinette en grillant un feu rouge
- Un qui s’est fait voler son portable, classique, avec dépôt de plainte en règle et en urgence
- Les attentats du 11 septembre, dont certains ont donc entendu parler
- La tuerie de Columbine, plus étonnant parce que c’est vieux (1999) et moins connu
J’aime ces chapitres d’EMC : les enfants parlent d’eux, se livrent, on rigole, on parle de la vraie vie, enfin, et ça leur plait. Je me note : ne pas me trop me dépêcher sur l’EMC. Même en 3ème.
Mercredi 11 juin
Je prépare les « derniers » de l’année, et ça fait du bien, « on va pas s’mentiiiiiirr », comme dit ma nièce.
Parce que notre emploi du temps « classique » s’arrête bientôt. Je vous raconterai.
Donc : dernières activités à mettre en page et à imprimer (et dire que ça sera tout de suite mis à la poubelle…) ; dernières cours à préparer ; derniers chapitres à boucler ; derniers bulletins à remplir…
Je m’accroche toute la journée, pour travailler sur cette fin. Même une fin, il faut la finir.
Jeudi 12 juin – Musique d’entrée en classe : Ska-P, El Gato Lopez
Juste deux heures de cours ce matin, comme un jeudi sur deux. Dont une heure avec des 3ème très calmes, trop calmes. Posent presque jamais de questions. Ce qui ajoute à l’ennui.
En 4ème, suite des anecdotes, c’est plus vivant !
- La sœur d’une élève a fait changer son nom de famille, avec avocat sous le coude
- Deux garçons, en primaire, ont déclenché l’alarme incendie ou fait croire à une intrusion : « ben oui monsieur, j’ai éteint la lumière et j’ai frappé à toutes les portes ! ». C’est le même élève qui, il y a quelques mois, voulait fabriquer une bombe atomique. Il va bien, lui, ça fait plaisir !
- Encore le 11 septembre, encore des vols (de portable, de vélo), encore des dépôts de plaintes par (ou contre) des élèves
- Un meurtre, un viol, un suicide (oui, bon, là c’est moins « vivant » j’avoue)
Le reste de la journée, à la maison, est presque calme ! J’ai le temps d’aller courir, de faire un peu de ménage et de lire mon journal ! J’hésite entre me dénoncer au Rectorat et me féliciter de m’accorder enfin un peu de temps. Je choisis l’option 2. De toute façon je sais pas qui contacter au Rectorat : bureau A121 ou bureau F847G#?01AD virgule 6 ?
Je prépare quelques exos pour les révisions des 3ème.
Je prépare les bulletins de la classe dont je suis prof principal, pour le conseil de classe à venir.
Et je retourne au collège, de 18h à 19h, pour un autre conseil de classe.
Vendredi 13 juin – Musique d’entrée en classe : BTS, Dynamite (proposition d’élève)
Suite des anecdotes d’EMC-justice :
- L’une a vu une voiture « rouler sur un cycliste »
- L’un dont le père, à l’aéroport, a oublié une valise à son nom, la police appelle, les interpelle avec menottes (dois-je les croire, pour les menottes ?)
- L’un dénonce un de ses copains de classe, qui en primaire avait déclenché l’alarme incendie ; ça fait bien rire toute la salle
- L’une demande si on peut, pour se défendre, demander à quelqu’un de faire un faux témoignage
- L’un a été « chopé par les vigiles » dans un magasin, avec de la nourriture déjà achetée dans un autre (magasin, pas vigile)
- L’un a été embêté par un SDF, dans le tram, la police l’a aidé
A la fin, je crois qu’ils ont bien compris que la justice concerne tout le monde, tout le temps, même eux.
J’ai fait commencer aux 4ème , il y a quelques jours, un exercice en classe. Normalement, ils avaient le temps de (presque) finir. Je leur ai laissé encore 3 jours pour le finir chez eux. C’est peut-être la 1ère fois de l’année (ou 2ème, allez), que je leur donne un petit truc à faire à la maison. Mais 1/3 des élèves n’ont pas fini le boulot (ni en classe, ni chez eux donc). Je le savais. Ils passent quand même une heure à recopier une page de leçon, pour marquer le coup.
Bien sûr, la plupart de ceux qui sont punis sont des gamins qui sont déjà en difficulté (et quelques flemmards, soyons honnêtes). Je savais déjà que les devoirs à la maison renforcent les inégalités : ne les font que ceux qui sont déjà bien accompagnés par leurs familles. Et ces devoirs épuisent tout le monde. Les élèves, déjà crevés de leur journée ; et le prof, qui doit préparer les punitions, les relire (rapidement), les indiquer sur Pronote, et essayer d’oublier qu’il a bêtement puni des enfants fragiles.
En 5ème, on commence aussi le tout dernier chapitre de l’année, sur le changement climatique. Il manquera, là aussi, un ou deux chapitres. Tant pis. Il me reste 3h d’ici mardi prochain, date de fin de l’emploi du temps « classique ». Je pensais avoir un peu de rab, mais a priori, non. Je dis « a priori » car, ce dimanche à 11h, je ne connais pas encore mon emploi du temps exact de la semaine prochaine. Mais le mystère finira bien par être résolu.