Lundi 25 novembre – Musique d’entrée en classe : The Beatles, Lady Madonna
Avec la CPE, on reçoit la mère d’Emma (1), l’élève rejetée par toute sa classe. Elle va mieux, moins de crises d’angoisse, moins de pleurs à la maison. Peut-être que de savoir qu’on l’écoute, qu’on fait quelque chose pour elle, lui fait déjà du bien. Sa mère nous avoue que de son côté, elle disait surtout à sa fille de se mettre des coups de pieds au cul et d’arrêter de se plaindre. C’est sûr que vu sous cet angle…
Suite de l’organisation d’une sortie au ciné avec les 3ème, en mai : le budget ! On peut le financer via le Pass Culture, un truc créé par le Président pour les jeunes, et qui marche aussi pour les activités culturelles au collège. Enorme succès ! Tant tellement que depuis septembre les crédits sont épuisés… jusqu’en juin 2025. Bon. On va gratter d’autres fonds de tiroirs, pour voir.
Ce soir, réunion parents – profs : après 3 mois, on donne les premières notes, les premières impressions, on demande comment ça va… Début à 16h, mais à cette heure-là sûr j’ai cours. Une collègue recevra seule les premiers parents, je la rejoindrai ensuite. A 10h, on n’a pas encore les relevés de notes (ah, si, ils arrivent), ni les bulletins, ma collègue les imprime dans la journée, personne n’a pensé à le faire. Je déboule donc à la réunion sans y avoir jeté un œil (aux bulletins, pas à la collègue). Pendant le weekend le planning des rencontres a été modifié, mais on est plusieurs à ne pas l'avoir reçu. J’apprends donc à une collègue n°2 qu’elle ne commence pas à 16h50 mais à 16h, pour accompagner la collègue n°1 qui commence seule en m’attendant. Coup de bol que j’aie croisé la n°2, et que j’aie moi-même eu l’info en allant voir la Principale. Pour un autre sujet, sinon, trop fastoche.
Un truc rigolo, aujourd’hui ?
Je cherche… Si ça me revient…
Mardi 26 novembre – Musique d’entrée en classe : Michel Polnareff, Je Suis Un Homme
J’explique Polnareff, qu’il a écrit cette chanson en 1970 après s’être fait tabasser et traiter de « pédé ». Chanson sur un ton provocateur pour un message de tolérance. Je dis aux enfants que j’ai eu envie de leur faire écouter parce que certains m’appellent « madame ». Ça les fait rire.
Exercice de description d’un tableau de peinture sur la Prise de la Bastille avec les 4e. Après un 1er exercice sur une image d’immeuble en Ukraine (vous vous souvenez ?), grand progrès ! La plupart écrivent plusieurs lignes, certains plus d’une demi page (bon OK ils écrivent gros). Mais ils entrent dans les détails, un peu. Ça me fait plaisir.
Les 3ème, eux, rament encore pour comprendre l’ensemble d’un chapitre d’histoire et l’expliquer à leurs copains. Je ne les ai pas assez guidés, j’espérais qu’ils trouvent plus d’infos tout seuls. Trop de consignes à suivre, aussi. Pas grave, c’est en se trompant qu’on s’améliore, non ? J’ai les idées pour faire mieux la prochaine fois. Et je me dis que si j’arrive à bien caler le processus, ça peut être une chouette façon de travailler avec toutes les classes. Je sens déjà venir les prochaines insomnies qui se foutent de ma g**** à 4h du mat’.
Les 5ème font une entrée en classe en mode son et lumière avec pom-pom girls et churros à la mi-temps. Je fais ressortir tout le monde. En parallèle, une dizaine demandent à aller boire parce qu’ils sortent de sport. Je vérifie pendant qu’ils sont au robinet : le cours d’EPS était 2h plus tôt donc ils ont largement eu le temps d’aller picoler pendant la récré. Une fois la meute rassemblée, je leur explique ma façon de voir tout ça. Avec des phrases courtes et le ton d’Aymé Jacquet à la mi-temps de la demi-finale 98 contre la Croatie.
Ils relèvent le nez de leurs genoux et se mettent au boulot. On entend grincer les pointes de crayon sur le papier. Dix minutes plus tard tout le monde sourit, même moi. C’est dire si c’est pas grave.
Jeudi 28 novembre
« Le prof d’histoire est pas là ! Ouaiiiiiiiiiiiiiiiis !!!!!! »
Petite blessure, je peux à peine poser le pied par terre, je prends un jour (de carence).
J’ai une petite pensée pour mes collègues réquisitionnés (je l’étais aussi) pour une autre réunion parents – profs, celle des 3ème. Encore de 16h à 18h30 : deux heures et demi avec les parents, après une journée entière de cours pour certain(e)s…
Vendredi 29 novembre – Musique d’entrée en classe : Mac Demarco, Heart to Heart (proposition d’élève)
Avec les 4ème, ça roule : je maitrise le chapitre sur la Révolution, entre petites histoires, grandes dates et analyse de documents. Fragile équilibre pour ne pas qu’ils s’ennuient ou s’endorment. D’autant que certains, il leur manque toujours 2-3h de sommeil par nuit. Quand je m’amuse à leur rappeler qu’à leur âge c’est au lit à 21h, ils me regardent comme si j’étais une affiche « -80% » du Black Friday.
Avec les 3ème, ça roule : ils sont à fond dans la rédaction de leur leçon pour les copains. Ils découvrent qu’ils savent pas bien écrire un texte. Je leur dis qu’ils s’inquiètent pas, qu’ils sont là pour apprendre. Je suis content d’eux, je leur dis. Pas trop de moi, je leur dis aussi. J’ai hâte que ça se finisse, pour mieux recommencer en mieux.
J’accompagne Emma (1), nouvelle crise d’angoisse dans le couloir, à la Vie Scolaire. Elle s’assoit, tremble, pleure. Je vais lui chercher des mouchoirs. Et je repars alors que j’ai envie de m’assoir à côté d’elle pendant deux ans (il lui faudra bien ça pour se calmer).
J’explique aux 5ème que non, Charlemagne n’avait pas la barbe fleurie (ni de barbe tout court), que non il n’a pas inventé l’école (ils connaissent quand même France Gall, c’est fou), que non la brèche de Roland dans les Pyrénées n’a pas été taillée d’un coup d’épée, et que non on ne connait pas sa date de naissance, à lui comme à un paquet de monde. Ils sont sciés.
Je leur explique aussi qu’il y a maintenant une pendule à aiguilles dans la salle et qu’ils peuvent suivre combien de temps il reste avant la fin du cours. Des doigts se lèvent : « mais monsieur, je sais pas lire l’heure comme ça ! ». Ils sont six ou sept ; je suis scié.
Par l’info, et par l’allitération que je viens de pas faire exprès.
L’heure, c’est plus avec des aiguilles !
Je prends une bonne centaine de cheveux blancs.
Et deux whiskys, en rentrant.
(1) Tous les prénoms sont modifiés