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Billet de blog 4 avril 2024

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Nimes: Concert ou corrida ?

Le positionnement récent de Shaka Ponk vis à vis des corridas m'amène à m'exprimer sur la réalité sociale vécue localement au niveau des férias et corridas qui divise la population entre Nîmes et Montpellier.

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La face cachée des corridas à Nîmes et environs : un bilan social préoccupant

Bravo au groupe Shaka Ponk, groupe de rock français de premier plan pour leur prise de position engagée sur ce sujet des corridas, relançant le débat localement. Merci pour cet engagement militant et cette vidéo produite le 15 juin 2024 au lendemain de leur dernier concert d'adieu dans les Arènes de Nîmes, avant de rejoindre le collectif "The freaks".
Je suis habitant d'un petit village dans la périphérie de Nîmes, de mai à septembre, les corridas et férias qui ne font plus partie depuis 2016 du patrimoine immatériel français divisent largement la population des villages et sont sources de réelles tensions sociales entre les pros et les contres.
Les corridas et les férias de Nîmes sont des événements profondément ancrés dans la tradition et la culture locales. Elles sont souvent célébrés pour leur côté spectaculaire et leur capacité à rassembler la population autour d'un évènement festif massif (1,13 millions de participants à la féria de la pentecôte en juin 2022 à Nimes). Toutefois, derrière ces festivités se cache une réalité plus sombre, marquée par des conséquences sociales qui mériteraient une réelle attention. Les préoccupations sont nombreuses ces dernières décennies et la pratique d'abus et de mise à mort d'animaux devient de plus en plus discutable. Pour moi c'est une pratique conservatrice complètement dépassée et en choc frontal avec les tendances du moment vis à vis des animaux (interdiction des animaux dans les cirques, fermeture des parcs avec animaux aquatiques...).

Illustration 1
Arène de Nîmes - concert

Ce qui me choque le plus depuis la dizaine d'années à vivre dans l'Hérault et le Gard, et c'est la partie émergée de l'iceberg, ce sont les décès de jeunes ou moins jeunes participants aux férias. Ces personnes se font violemment percuter par des taureaux car leurs réflexes sont parfois amoindris par quelque substance, comme par exemple à :

Dans d'autres les personnes sont victimes de violences en marge des férias ou corridas elles mêmes, agressions, accidents de voiture, animaux échappés qui provoquent des désordres comme à :

Où les victimes n'ont pas été percutées par un taureau ou une vachette. Ces incidents et leurs coûts financiers et humains n'ont jamais fait l'objet d'une étude sociale approfondie et documentée, à ma connaissance.
Deux autres points me choquent au fil des années d'observation locale :

  • Le personnel municipal des villages pratiquant les férias passe un temps considérable à monter et démonter des grilles de protection des rues pour les férias (au moins 3 ou 4 par village et par an). Cet argent public ne pourrait il pas être utilisé de façon plus intelligente ?
  • L'incroyable opération de nettoyage express de ces festivités où les rues sentent un mélange d'alcool, d'urine et de vomi, nettoyage qui a toujours lieu le lendemain des festivités 

J'ai relevé quelques autres points qui méritent réflexion et sont rarement abordés en dehors du strict rapport que nous avons avec les animaux :

  • Risques pour les participants : Bien que les statistiques précises sur les incidents et décès soient difficiles à obtenir, il est reconnu que les participants aux corridas s'exposent à des risques significatifs.
  • Impact sur les spectateurs : L'exposition à la violence des corridas, en particulier pour les jeunes et très jeunes spectateurs, pose question quant à ses effets psychologiques et éducatifs, aucune restriction n'est en place pour interdire l'accès aux corridas aux plus jeunes

Les répercussions sur la population

Les corridas et les férias ont également un impact notable sur la communauté locale, engendrant divers problèmes sociaux :

  • Division communautaire : La pratique divise clairement la population entre défenseurs de la tradition et opposants préoccupés par les questions de bien-être animal et de sécurité. Dans les villages, de nombreux habitant désertent littéralement leur village pendant les férias ou les fêtes votives à cause du bruit, de problèmes de sécurité, et d'autres nuisances, les accès au centre du village sont complètement verrouillés.
  • Conséquences économiques : Si certains argumentent que les événements attirent des visiteurs et stimulent l'économie locale, il serait bon de dresser un bilan financier des coûts considérables associés à la mise en sécurité, au nettoyage, et aux impacts négatifs sur certains commerces locaux qui doivent fermer, étant situés dans le périmètre des festivités.
  • Image internationale : Dans un contexte global où la sensibilité aux droits des animaux est en hausse, les corridas peuvent affecter négativement la perception internationale de Nîmes et de la France à l'étranger. Lorsque nous évoquons ces "festivités" à des étrangers, ils nous demandent parfois de répéter tant cela leur semble moyenâgeux et décadent de payer pour aller assister à de tels "spectacles"

Le débat est ouvert de longue date déjà, et il est certain que les prises de position publiques comme Shaka Ponk participent aux réveil des consciences, et devraient inciter au développement d'événements culturels non violents dans les arènes de Nîmes comme c'est déjà le cas et comme cela devrait encore être davantage le cas. Cela permettrait de maintenir une attractivité culturelle de notre ville en dehors de ces évènement festifs controversés.

En 20 ans nous avons su passer des raves party à des fêtes plus soft comme l'ecstatic dance, sans substances au milieu pour détraquer les liens sociaux.

Espérons que dans 20 ans, nous aurons réussi à trouver une alternative à des moments festifs sans nos amis les animaux !

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