À l'issue des élections législatives de 2024 et dans une moindre mesure à celles des européennes qui les ont précédé, le paysage politique a été profondément modifié au point que la tripartition de l'hémicycle est une phase inédite de la Ve République.
L'année 2025 débute comme s'est terminée l'année 2024 : la nomination de Bayrou comme Premier Ministre. Ce choix repose sur la volonté de Macron d'empêcher coute que coute la gauche d'être un interlocuteur au même titre que les deux autres blocs. C'est à ce moment là que la gauche n'a pas compris l'importance de dégager une parole unique et surtout univoque.
Bayrou et Macron ont joué sur cette faiblesse et ont encouragé les prises de paroles des uns et des autres et surtout accueilli avec bienveillance les allées et venues (disons le autrement : les tergiversations) de certains leaders de la gauche. Leaders de papier, mais leaders dans leur parti. Cela leur suffisait.
Le choix de Lucie Castets comme putative Première Ministre, fut présentée comme une forme de maturation des composantes du NFP. Malheureusement, il faut deux conditions pour un électorat de gauche qui puisse avaliser ce choix :
La première, que le choix de l'éventuel Premier(e) Ministre se fasse sur une base de désignation parmi des élus de la République donc sur une base que l'on pourrait qualifier d'onction démocratique. Ce ne fut pas le cas. Cela ne retire en rien les qualités de Lucie Castets qui aurait été par ailleurs bien plus soutenue si elle s'était affranchie du choix porté sur sa personne en se présentant à une élection partielle ou lors du scrutin des législatives générales. C'est un élément crucial pour comprendre la faible adhésion de l'électorat populaire.
La seconde condition aurait consisté à respecter une règle "déontologique" qui obligeait les responsables des composantes de la gauche à refuser toute négociation avec Matignon ou l'Elysée sans l'accord explicite du NFP auquel il manquait un Directoire qui aurait été le seul autorisé à mandater le ou la personne habilité à le représenter. Ce ne fut pas le cas. C'est une erreur politique énorme.
Ces deux faiblesses ont conduit notamment le PS à s'engouffrer dans la brèche. Sans leadership, le NFP n'est qu'un tigre de papier. Il est dans l'incapacité d'imposer un choix politique d'alternance à Macron. Olivier Faure à fait mine d'oublier que le PS avait dans ses gènes renoncé à une vision Marxiste de la société qui l'a conduit depuis 1983 à une vison ordolibérale calquée parfaitement sur la vision fédérative européenne qui elle-même est un succédané de l'ultralibéralisme anglo-saxon voir pire.
C'est sous le quinquennat Hollande, que le choix d'un durcissement des préférences sociales du PS s'est fait. Les deux options principales ayant été la Loi Travail et la Réforme Touraine. D'un côté, le détricotage de la représentation du personnel dans le monde du travail qui a aboutit notamment à la suppression des Délégués du Personnel, dernière trace de la démocratie directe dans les relations sociales avec la possibilité pour n'importe quel salarié (citoyen français ou non et donc unique cas de figure où un ressortissant étranger vivant et travaillant en France pouvait se présenter à une élection) de se présenter à une élection sans étiquette. La disparition progressive des CHSCT ayant été la seconde face sombre de cet implacable décision où la liberté d'action, de surveillance et de prévention à été tout simplement supprimée. Une section syndicale peut être constitué dès lors que l'entreprise atteint 200 salariés. Il eut fallut descendre ce seuil à 20 salariés pour que tout citoyen puisse acquérir une conscience sociale et politique plus facilement ce qui aurait entraîné une meilleurs politisation de la société française. Ceci est un autre débat.
De l'autre, l'allongement de la durée de cotisation voulue par le seul PS au motif qu'il fallait s'aligner sur la durée moyenne de cotisation des travailleurs européens. C'est la raison principale qui a provoqué l'intervention de Hollande pour empêcher toute abrogation de la réforme des retraites qui aurait immanquablement abouti à la renégociation de la durée de cotisation.
Dernier point, pour défaire Macron, en somme pour lui infliger une défaite sur un sujet crucial, il eut fallut avant même l'abrogation de la réforme des retraites imposer au parlement un débat sur une des prérogatives dites régaliennes dont l'article 19 de la Constitution rappel les principales qui d'ailleurs restent partagées entre le parlement et la Présidence. Seules quatre sont l'exclusivité du Président, mais deux nous intéressent : le feu nucléaire et...la dissolution.
En guise de conclusion, la tripartition voir la quadripartition (avec la récente défection du PS) de l'Assemblée a fait apparaitre qu'avec moins de 50 députés, le choix d'un Premier Ministre ne posait pas de problème. En revanche -et les chiffres sont sans appels- le NFP a réuni 8 millions de voix, la Macronie et la droite canal historique- 8,5 millions et le RN, 11millions. Cette tripartition a provoqué la dilution pour les deux blocs (presque égaux) hors RN, deux peu ou prou deux millions de voix de la gauche vers la droite et un peu moins d'un millions dans l'autre sens, chacun dans le cadre de la fumeuse stratégie du front républicain. Cette anomalie démocratique indique surtout l'absence totale d'analyse sur les résultats qui a conduit à cette situation.
Voici plusieurs liens connexes pour prolonger ce modeste billet :
https://www.vie-publique.fr/fiches/19415-le-president-de-la-republique-t-il-tous-les-pouvoirs
livre vert vieillissementPour ce dernier document, lire pages 16 et 17 notamment.