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Billet de blog 11 janvier 2020

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Un gouvernement de menteurs escroque les chômeur-euse- s

Macron se sert des chômeurs pour combattre leurs droits, sur la retraite c'est la même chose: il prétend améliorer leur retraite alors qu'il la fait baisser

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Un système universel et juste ?  en faveur des chômeurs comme Macron le dit sans cesse ?

Non, c’est une escroquerie pour les chômeuses et chômeurs !

C’est d’abord une escroquerie intellectuelle quand le gouvernement les présente comme bénéficiaires du régime à points : un an après avoir présenté une loi sur la « liberté de choisir son avenir professionnel », qui ne comportait que des contraintes et des sanctions, ce gouvernement récidive avec un système qui pénalisera principalement les chômeur-euse-s et les précaires.

Mais c’est aussi une escroquerie financière parce que le système à point fera baisser les retraites en prenant en compte dans le calcul les plus mauvaises années de chômage et de précarité (et ce ne sont pas les points attribués nous verrons comment ci-dessous, qui changent grand chose).

Une moindre solidarité pour les Chômeur-euse-s

Le système universel de retraite « prendra aussi en compte, au titre de la solidarité, les aléas de la carrière ou de la vie qui conduisent à des périodes d’interruption d’activité involontaires. » (projet de loi instituant un système universel de retraite)

Voilà ce qui paraît une bonne chose mais le diable se niche dans les détails c’est à dire dans les dispositions précises. Regardons de près l’exposé des motifs de cette loi qui vient d’être rendu public

L’article 42 traite de la prise en compte des périodes non travaillées, retenons ce qui concerne le chômage et la précarité (cet exposé des motifs est en italiques):

« Les périodes de chômage donneront lieu à l’acquisition de points sur la base des indemnités versées à ces assurés au titre de ces périodes, notamment l’allocation de retour à l’emploi (ARE)... » : c’est donc sur le montant des indemnités que seront calculées les cotisations retraites. Ce qui veut dire un achat de points sur la base d’un reevenu entre 57 et 75 % du salaire antérieur alors qu’ aujourd’hui elles sont calculées sur le salaire de la période antérieure de travail : on voit bien que la soi-disant prise en compte des périodes non travaillées se traduira par une baisse du niveau de cette prise en charge. Pour ce qui concerne les chômeurs en fin de droit, ils devront attendre les «  conclusions des travaux en cours sur le revenu universel d’activité (RUA), l’allocation spécifique de solidarité (ASS) ». Si l’on se base sur le montant actuel du RSA (500€) on voit que ces périodes -loin d’une redistribution solidaire- vont tirer à la baisse le montant de la retraite surtout quand on sait que le RSA est souvent versé sur une longue période au bout d’un chômage de longue durée. On ne sait ce que sera la RUA, ni en termes de montant , ni en termes de droits. Mais d’ores et déjà la réforme de l’assurance chômage (qui multiplie les possibilités de sanctions avec perte des allocations, les nouvelles dispositions qui réduisent les droits ou baissent les allocations) vient aggraver encore la situation et potentiellement augmenter les bénéficiaires des minima sociaux quand la réforme du RUA est prévue à budget constant.

Un recul baptisé avancée sociale

En se fondant sur le fait qu’aujourd’hui un smicard a un taux d’indemnisation supérieur à celui d’un cadre supérieur( 75 % de son ancien salaire contre 57%) le gouvernement se permet d’écrire «  l’acquisition de points sur ce fondement favorisera la redistribution vers les personnes qui se retrouvent être les moins indemnisées au titre du chômage ». Mais cet effet redistributeur est bien inférieur à celui de la prise en compte des 25 meilleures années qui neutralisait – grâce à une socialisation - les périodes les plus mauvaises (pour mémoire, le passage en 1993 des 10 aux 25 meilleures années = une baisse des retraites du 15 à 20%). Dès lors le gouvernement ment quand il écrit « L’acquisition de points au titre de ces périodes d’interruption subie se traduira mécaniquement dans le système universel par une augmentation des droits constitués et une amélioration de la pension versée au moment du départ ». Ce mensonge est repris comme élément de langage par tous les LREM mais aussi par les médias qui relayent complaisamment la « dimension sociale » de la réforme.

Ce recul social est considéré comme «une avancée majeure par rapport au système actuel qui est fondé sur la validation de trimestres dans lequel les droits acquis peuvent n’avoir aucun effet in fine sur le niveau de la pension dès lors que les trimestres acquis au titre de la carrière sont suffisants. Le système actuel qui est « fondé sur la validation de trimestres assimilés n‘avait aucun effet in fine sur le niveau de la pension » : les chômeurs disposaient de trimestres validés qui leur ouvraient droit à pension sans que les périodes de chômage n’influent à la baisse sur le montant de la retraite (à moins de dépasser 17 ans de chômage, les 25 meilleures années intégrant alors des périodes de chômage). On voit ainsi que les chômeurs et précaires de demain intégreront dans leur déroulement de carrière chômage et précarité renforçant ainsi à la retraite les inégalités dans le travail et face au chômage : malheur aux vaincus c’est la devise de ce gouvernement !

Retraite et précarité

On comprend le pourquoi de la réforme quand, dans cet exposé des motifs, on lit la phrase suivante : «  notre système de retraite reste injuste, complexe, peu lisible, et, plus que tout, inadapté à la réalité de notre société, aux parcours professionnels d’aujourd’hui, aux nouvelles précarités, et aux défis de demain » Avec la réforme, le système reste injuste puisqu’il reproduit -avec moins de corrections solidaires- les inégalités croissantes dans le travail et le salaire ; Il reste complexe et peu lisible , on pourrait même dire encore moins lisible avec la multiplication des régimes particuliers, des périodes de mise en œuvre, des ages différents et des calendriers différents... Tout le monde le découvre aujourd’hui et il n’y a que certains « experts médiatiques » pour trouver un progrès dans ce sens.

Par contre il répond aux exigences de la phrase soulignée, il est adapté au projet de société de Macron : des parcours professionnels où se mélangent salariat, emplois indépendants, fonctionnariat et le passage de l’un à l’autre est facilité par un système unique : nous avions eu un avant goût de cela avec la réforme de l’assurance chômage et ses « avancées sociales » l’indemnisation des démissions utiles et reconnues et celle des indépendants. C’est une société pour les gagnants où chacun-e doit se faire son avenir sans les autres ou contre les autres.

La manière dont l’exposé des motifs fait référence aux « valeurs fondatrices du projet conçu par le Conseil national de la Résistance » est significative. Notant que le système de protection sociale visait «un caractère de grande généralité à la fois quant aux personnes qu'elle englobe et quant aux risques qu'elle couvre», et dans sa référence à cette période,ils se livrent à une falsification de l’histoire : « Force est de constater que cette ambition universelle pourtant clairement affirmée a reculé sous le poids de chacune des solidarités professionnelles pour aboutir à la mise en place de nos 42 régimes de retraite » comme si la mise en cause de l’universalité avait été générée par la création ultérieure des régimes dits spéciaux. Dans les faits ces régimes préexistaient et ils étaient conçus comme des locomotives devant tirer le régime général vers le haut à fur et à mesure de l’amélioration de la situation économique . Ce sont les indépendants qui ont refusé d’entrer dans le régime général et le patronat avec les cadres qui ont tenus à garder des singularités. Dès le début les forces du Capital ont cherché à miner l’universalité : aujourd’hui ce qui se cache derrière ce mot c’est le développement de toutes les formes de sous-statut salarial.

L’exposé des motifs nous livre un aveu :« L’universalité.assurera aussi une meilleure liberté et mobilité professionnelles ». Dans la novlangue macronienne depuis la réforme de l’assurance chômage nous savons que cela signifie l’inverse de ce qui est énoncé.

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