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Billet de blog 5 octobre 2014

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Les “affaires” ont un sens, j’en ai la preuve

Je n’ai aucun goût particulier pour la randonnée mais je présume qu’à un moment donné, pour aller plus loin, il faut faire une pause. Mettre l’urgence entre parenthèse afin de raconter et, j’espère, comprendre : voilà ce qui m’a poussé à écrire le livre Le Sens des Affaires, qui vient de paraître aux éditions Calmann-Lévy.

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Je n’ai aucun goût particulier pour la randonnée mais je présume qu’à un moment donné, pour aller plus loin, il faut faire une pause. Mettre l’urgence entre parenthèse afin de raconter et, j’espère, comprendre : voilà ce qui m’a poussé à écrire le livre Le Sens des Affaires, qui vient de paraître aux éditions Calmann-Lévy.

Le Sens des Affaires est le quatrième livre publié par un journaliste de Mediapart depuis la rentrée de septembre, après Je crise climatique (La Découverte) de Jade Lindgaard, A tous ceux qui ne se résignent pas à la débâcle qui vient (Don Quichotte) de Laurent Mauduit et Pour les musulmans (La Découverte) d’Edwy Plenel. Ces ouvrages ont ceci en commun qu’ils visitent chacun à leur manière, mais toujours à la première personne, quatre domaines de réflexion qui nous permettent de questionner le monde qui nous entoure. Jade interroge notre rapport individuel au désastre mondial de la crise climatique ; Laurent dissèque les renoncements de la gauche de gouvernement ; Edwy parie sur l’Autre comme un espoir face aux sorciers de la peur.

Avec Le Sens des Affaires, j’ai voulu, pour ma part, en revisitant quelques-unes des “affaires” que Mediapart a mis au jour (Karachi, Bettencourt, Takieddine, Kadhafi, Cahuzac…), montrer que nous sommes tous au quotidien les victimes invisibles de la corruption. Que les “affaires” ne sont pas des sortes de faits divers financiers plus ou moins spectaculaires qui débarquent au journal de 20 heures et en disparaissent aussi vite qu’elles sont arrivées. Qu’elles constituent, prises dans leur ensemble, les maillons d’une même chaîne qui nous permet d’interroger notre fatigue démocratique et l’incapacité chronique de la classe politique française à s’attaquer de front à ce poison, au-delà des discours. Les verrous, malheureusement, sont de tous ordres : culturels, institutionnels, politiques, judiciaires…

Depuis au moins Cicéron, nous savons qu’il y aura toujours des corrompus et des corrupteurs. Le problème n’est pas tant que la corruption existe, ni que certains – des journalistes, par exemple – la révèlent, mais que ceux qui sont censés nous représenter au nom de la République ne semblent pas prendre la mesure du danger qui nous guette avec elle, ou, pire, s’en arrangent pour certains. Ce sentiment nauséeux du « tous pourris », agité parfois par ceux qui préfèrent le silence au bruit qui dérange et oblige, prospère précisément sur le dos cette crispation française face à la corruption.

Le temps presse : depuis trente ans qu’il existe dans ce pays des lois de moralisation de la vie publique, la mollesse risque de plus en plus d’être vue comme une complaisance et la complaisance comme une complicité. Pour essayer de comprendre ce que les affaires nous disent, en somme, de nous-mêmes, j’ai fait le choix de convoquer la littérature, la sociologie et la philosophie. Deux auteurs en particulier m’ont pris par la main : George Orwell et Guy Debord.

Le Sens des Affaires est aussi un récit, j'espère le plus sincère possible, sur les coulisses de la fabrication du journalisme, carrefour des doutes, des convictions, des découvertes et des combats de toutes sortes.  

Hasard du calendrier, mes confrères et amis Antoine Peillon (La Croix) et Benoît Collombat (France Inter) publient dans le même temps deux ouvrages sur le rapport entre le pouvoir et l’argent : Corruption, nous sommes tous responsables (Seuil) pour Antoine et Histoire secrète du patronat (La Découverte) pour Benoît – avec David Servenay, Frédéric Charpier, Martine Orange et Erwan Seznec. Nous étions tous les trois les invités, jeudi 2 octobre, du « Téléphone sonne », animé par Hélène Jouan sur France Inter. À écouter ici.