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Billet de blog 10 février 2009

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"Je viens pour la baisse du prix de l'électricité"

10 h 15, ce mardi. Je traîne au lit après une laborieuse nuit où mon bébé s’est employé à réfuter mes certitudes sur le manque d’autonomie des nourrissons. Force m’est de constater que les bébés, contrairement à ce que je pensais, sont autonomes : ils choisissent l’heure de leur repas, celle de leur colère, celle de leur besoin, et il nous appartient de nous y adapter.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

10 h 15, ce mardi. Je traîne au lit après une laborieuse nuit où mon bébé s’est employé à réfuter mes certitudes sur le manque d’autonomie des nourrissons. Force m’est de constater que les bébés, contrairement à ce que je pensais, sont autonomes : ils choisissent l’heure de leur repas, celle de leur colère, celle de leur besoin, et il nous appartient de nous y adapter. Ma compagne, plus courageuse, a déserté notre lit depuis une bonne dizaine de minutes. BiiiiiiiiiP ! L’interphone. On est mardi et ça doit être la femme de ménage de l’immeuble qui souhaite ou plutôt doit pénétrer dans notre forteresse pour y accomplir son fastidieux travail. « Je vous ouvre marmonne ma compagne » avant de réintégrer la salle de bain. Pour ma part, je continue à comater pitoyablement… Toc, toc, toc… on frappe à la porte. Ca ne bouge pas du côté de la salle de bain, ce qui est scandaleux. Je me lève donc puisqu’il faut tout faire par soi-même ici et j’ouvre la porte.

- Bonjour, je viens pour la baisse du prix de l’électricité me déclare un jeune homme, la petite trentaine, dans un duffle-coat bleu et des vraies chaussures de ville qui brillent.

- Euh… oui ? je réponds avec toute la sagacité dont je suis capable. Cette réponse trop brève était suffisamment longue pour laisser le temps à notre jeune et dynamique commercial de pénétrer dans l’appartement. A vrai dire, il était déjà dans mon dos quand je lui ai proposé d’entrer… je le suis donc jusqu’au salon.

- Donc, je viens pour étudier votre consommation d’électricité et vous proposer une offre qui vous permettra de faire des économies. J’ai juste besoin d’une de vos factures.

Ces questions m’intéressant au plus haut point, je laisse ma compagne chercher cette fameuse facture et me rends dans la cuisine pour faire couler un café. A mon retour, notre bienfaiteur nous promet une baisse d’environ 10% sur l’année. C’est alors que ma compagne, bien mieux réveillée que moi pose la question.

- Mais nous restons chez EDF ?

- Euh… oui, bien sûr, mais vous savez qu’EDF a été privatisé ? Donc, vous restez chez EDF pour les infrastructures et nous, on ne s’occupe que de la facturation…

Sapristi ! Les histoires de client-roi sont donc vraies ! Le sous-traitant d’EDF nous envoie un fringant commercial pour nous informer de cette externalisation et nous proposer, comme en compensation, une baisse des tarifs. Cette révélation produit un tel choc sur mes représentations archaïques qu’elle me réveille, et ça, c’est pas rien.

- Nous restons donc au tarif administré ou nous serons désormais soumis au prix du marché ?

- Ce que nous vous proposons, c’est le prix du marché. De toute façon, vous serez obligé d’y venir en 2010. Le marché, d’ailleurs, permet une baisse des prix puisque la concurrence…

Je cherche alors du regard un livre d’économie, lu il y a quelques mois, où il était question d’EDF, du marché de l’énergie et de l’impossibilité de baisser les prix par la concurrence pour des raisons techniques trop longues à développer ici où à opposer à mon interlocuteur. Je me borne donc à faire une moue dubitative et ma compagne enchaîne

- Mais vous êtes qui ?

- Ah… nous sommes l’entreprise XXXXXXXXXX, celle dont on voit la publicité à la télé, avec les deux petits oiseaux sur un fil…

- Nous n’avons pas la télé

- Ah oui, là, ça va être dur… mais nous vous garantissons une réduction de 10% jusqu’en 2010, vous ne pouvez donc qu’être gagnant… on y va ?

Le contrat est déjà sur la table, le stylo dégainé, et notre vendeur s’apprête à s’asseoir. Je me permets quand même d’intervenir pour lui signaler que nous n’avons pas donné notre accord.

- Ce serait quand plus simple si on faisait tout maintenant, je suis là, je peux vous aider à remplir les documents et ce sera fait…et puis, si vous le regrettez, vous pouvez toujours résilier sous huit jours et même après six mois, regardez, c’est marqué là…

- Non, nous ne le ferons pas maintenant…l’interrompis-je sans aucun argument valable. J’avais faim.

- Eh ben comme ça c’est clair !!!

- Oui, lumineux, même, ai-je pensé un bon quart d’heure plus tard en sirotant mon café.

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