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Billet de blog 8 janvier 2013

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Mélenchon VS cahuzac

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Soyons parfaitement honnêtes. Bien que sympathisant du front de gauche je dois bien reconnaître que  c’est bel et bien Jérôme Cahuzac qui tire les avantages de sa confrontation tardive avec Jean-Luc Mélenchon. Sa froide arrogance, son ironie grinçante et son calme froid de technocrate ont eu raison de la verve d’un Mélenchon que l’on a senti bien des fois au bord de l’apoplexie. On ne saura sans doute d’ailleurs jamais si le leader du front de gauche s’est trouvé à court d’argument face à un technicien qui l’a noyé sous des références invérifiables, ou si le culot de son contradicteur l’a proprement sidéré. On peut aussi simplement envisager que Mélenchon commence à (se) fatiguer  et qu’il en vient hélas à se caricaturer un peu plus à chaque débat. Dommage, l’homme possède un vrai talent de tribun et son combat reste juste. Pour ma part, je me remets mal de sa déculottée d’hier. Si même lui commence à se faire lessiver par le premier technocrate venu, il ne restera plus beaucoup d’espoir aux sans grades et aux démunis.

Toutefois, si dans la forme Mélenchon s’est fait étrillé, dans le fond on a appris deux trois choses intéressantes.

En tout premier lieu, à son contradicteur qui lui signalait que les autres grands états pouvaient se financer pour rien auprès de leurs banques centrales, ce que ne peut faire l’Europe, Cahuzac a reconnu explicitement qu’il avait personnellement voté non au traité de Maastricht, justement pour éviter d’en arriver à cette situation. Ce qui signifie en clair qu’initialement ce Monsieur ne voulait pas que la France et l’Europe se mettent dans la main des marchés pour se financer. Or que nous dis quelques minutes plus tard notre clairvoyant édile ? Puisque désormais  les traités ont été signés et que la banque centrale européenne, malgré l’aberration de son statut, est indépendante, il ne saurait être question de remettre en question ce qui a été fait et il faut accompagner le mouvement. Donc, qu’elle soit juste ou non, légitime ou non, assassine ou non, la dette doit être payée aux vainqueurs. Dis plus crument : «  le loup est dans la bergerie, je vous avais bien dis qu’il y viendrait, mais maintenant qu’il est là filons lui quelques brebis, peut-être qu’il finira par s’en aller ».
Pour le moins nous aurions aimé que cet homme si clairvoyant à l’époque (et il y en eut peu à ce moment-là – et surtout pas moi), fort de sa conviction, prenne la tête de la résistance et lutte pieds à pieds pour faire annuler des traités qui, non contents de mener l’Europe au désastre, sont en plus totalement illégitimes (du moins est-ce le cas pour le traité de Lisbonne, adopté contre les peuples), et donc moralement et juridiquement attaquables.

Mais pour Jérôme Cahuzac, l’appel des ors de la république est manifestement plus audible que celui de sa conscience et c’est donc de l’intérieur qu’il préfère « appliquer une politique de gauche », c'est-à-dire dans les interstices laissés par ses « amis » néo-libéraux. Malheureusement notre ministre du budget semble ignorer que jamais vaincu ne put faire progresser sa cause en rejoignant le camp du vainqueur. Tous ceux qui s’y sont risqués au cours de l’histoire (de Pétain à Kouchner) n’y ont gagné que le déshonneur.

Toutefois Jérôme Cahuzac est-il réellement un vaincu ? On peut se permettre d’en douter au vu de ce qu’il déclare en fin de débat : « La lutte des classes, je n’y crois pas et je n’y ai jamais cru ! ».  Au-delà du déni de réalité d’un ministrissime richement doté et vivant hors de la réalité quotidienne du français moyen, qui peut croire un seul instant qu’un « socialiste » puisse ne pas se réclamer de ce qui fait l’ADN même d’une identité de gauche, à savoir justement la lutte des classes ?

Pour finir cette diatribe qui ennuiera profondément les sociaux libéraux (les libéraux tout court sont sur d’autres forums, ils n’ont pas besoin de se donner bonne conscience), et pour argumenter contre celles et ceux qui prennent Mélenchon pour un « clown », je rappelle simplement que les propositions de Mélenchon ne seraient démagogiques et inapplicables que si ce dernier entendait les mettre en œuvre sans rien changer au cadre général politique et économique. Or tout ce qu’il propose est conditionné à un préalable : celui d’une refondation institutionnelle par le biais d’une constituante. Toute la cohérence de son projet est là. C’est difficile, très lointain et un peu incertain. Mais c’est infiniment plus noble, et finalement plus crédible, que de se vautrer dans la collaboration avec le maître du moment pour finir totalement asphyxié.

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