Lundi 1er février, premier jour de Festival international du film documentaire d'Océanie. La projection des films en compétition ne commence que le lendemain, mais le Te Fare Tauhiti Nui, la Maison de la culture de Papeete, grouille d’une foule de collégiens et lycéens. Le parking est envahi par les trucks, les camions aménagés, désormais délaissés pour le transport des passagers au profit d’autobus chinois, mais toujours utilisés pour le transport scolaire. Les écoles de la « grande île » de Tahiti Nui ne manqueraient pas le rendez-vous annuel du FIFO : « Il y a de véritables générations FIFO, c’est un rendez-vous attendu toute l’année », explique Khadidja Benouataf, une des responsables du festival. C’est un pari difficile qui a été gagné, alors qu’il n’existait presque plus de salles de cinéma en Polynésie française, celles de Papeete se contentant pour l’essentiel des blockbusters internationaux. Après la semaine de Papeete, le FIFO se « prolonge » toute l’année avec des projections itinérantes dans toutes les îles de Polynésie. Les chiffres sont éloquents : 31 000 entrées en 2015, 6 900 scolaires et 12 000 spectateurs dans les projections hors les murs.
Le FIFO est né en 2004 dans le cadre du Te Fare Tahiti Nui, avec la double volonté de créer un rendez-vous culturel majeur, qui a su trouver son public, et de devenir un rendez-vous régional, permettant le dialogue entre les problématiques et les productions de Polynésie française et celles des autres îles. La compétition officielle reçoit tous les ans des films en provenance d'Australie, de Nouvelle-Zélande, de Papouasie Nouvelle-Guinée, de Nouvelle-Calédonie, du Vanuatu ou encore des îles Salomon… En marge, le FIFO propose aux professionnels un programme de rencontres et débats articulés autour de plusieurs rendez-vous : le colloque des télévisions océaniennes, le Pitch dating, le marché du film documentaire océanien et des workshops professionnels.
Cette année, le jury, présidé par le réalisateur mauritanien Abderrahman Cissako, a attribué son premier prix à The ground we won, un film de Christopher Pryor (Nouvelle-Zélande, 2015), qui raconte, en noir et blanc, l’univers viril d’une communauté rurale d’agriculteurs passionnés de rugby… The Price of Peace de Kim Webby (Nouvelle-Zélande, 2015) et que vous verrez prochainement sur Mediapart, a obtenu le deuxième prix : ce documentaire militant suit durant sept années le combat du leader maori Tame Iti, depuis les raids de la police dans sa tribu et son arrestation jusqu’à la conclusion d’un « traité de paix » avec la Couronne britannique. Le 3e prix a été attribué à Tupaia, une coproduction Polynésie française/ Nouvelle-Zélande, évocation du navigateur polynésien Tupaia (à voir sur Mediapart).
Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin