Trois naufrages en quelques heures au sud de Lampedusa : deux corps repêchés, dont celui d'une femme de 26 ans, une vingtaine de disparus et 118 migrants secourus. Dans la journée d’hier des dizaines de bateaux ont quittés la Tunisie vers l'île la plus méridionale d'Europe. Les garde-côtes italiens ont secouru au moins 35 embarcations au cours des dernières heures, sauvant environ 1.200 personnes, mais le bilan reste de deux corps retrouvés et au moins une soixantaine de disparus.
À la tombée de la nuit, on parlait d'au moins 400 autres réfugiés, sur de nombreuses embarcations à la dérive, qui n'avaient pas encore été secourus, selon Alarm Phone, le numéro d’alerte pour migrants en difficulté en mer. Sur la dernière embarcation en fer, long de 7 mètres, voyageaient 38 personnes originaires du Burkina Faso, de Côte d'Ivoire, de Guinée, du Mali et du Sud-Soudan, les subsahariens discriminés par le régime de Saïed et poussés au départ. Selon les survivants eux-mêmes, le bateau avait déjà pris l'eau lorsque, à la vue du patrouilleur de la Guardia di Finanza, certains se sont levés et ont lancé des appels à l'aide. C'est à ce moment-là que le bateau aurait chaviré et que tous les occupants seraient tombés à l'eau. Une femme, âgée d'environ 26 ans, s'est noyée. Deux autres embarcations ont également coulé en raison d'une mauvaise flottabilité.
En Tunisie, 31 corps ont été d'abord repêchés dans la nuit de dimanche entre les côtes de Sfax, Mahdia et Gabès. C'est ce qu'a indiqué le porte-parole de la Garde nationale, Houcem Eddine Jebabli. Les corps étaient en état de décomposition, victimes de plusieurs naufrages non identifiés. Selon ce responsable, l'enquête préliminaire a montré que tous ces corps, dont des femmes et des enfants, étaient de nationalités des pays d'Afrique subsaharienne. Mais hier est arrivée la nouvelle que les cadavres récupérés dans les eaux tunisiennes seraient au moins 70.
Hier, le Croissant-Rouge libyen annonçait aussi avoir récupéré, en cinq jours, sur les côtes de Sabratha, les corps de 34 migrants qui s’étaient noyés en tentant de fuir de la Libye et de rejoindre l'Europe.
Si les navires de secours civils n'avaient pas été éloignés par le décret-loi de janvier 2023 de la route maritime la plus létale au monde, et par l'attribution systématique de ports éloignés par les autorités italiennes, la capacité d'un seul navire d'ONG aurait permis de sauver toutes les personnes qui ont fui la Tunisie ces dernières heures.
On sait que les bateaux métalliques sont de véritables « cercueils flottants » comme les a qualifiés le procureur d'Agrigente. Le criminel n'est pas celui qui pilote la barque mais celui qui, sachant qu'ils ne sont pas en état de naviguer, omet le sauvetage dans les eaux internationales et se cache derrière les accords avec les Libyens et les Tunisiens, quand il ne peut pas invoquer une zone de recherche et de secours (SAR) maltaise qui n'existe que sur le papier. Des garde-côtes tunisiens, qui selon des témoignages, pratiquent des interceptions en mer de plus en plus violentes ces deux derniers mois, dérobant les moteurs des canots de migrants, les laissant dériver en pleine mer et opérant des manœuvres dangereuses près des embarcations, provoquant des naufrages.
Il n'y a donc pas que le récent naufrage Cutro (qui avait fait au moins 93 victimes). Nous sommes aujourd'hui face à un massacre d'État planifié. Il est prévisible que des milliers d'autres personnes en mouvement mourront ces semaines et les mois à venir, car pour les gouvernements italiens et européens, c'est ainsi que les frontières nationales se « défendent ».