Pour le dire simplement, la justice de la République est une justice de classe. Mais quels intérêts la façonnent exactement ? Comment se construit précisément la répression judiciaire, y compris son illusion d’impartialité ? Comment remédier à ses dysfonctionnements manifestes ? Débat avec Laurent Bonelli, sociologue, Gilles Gourc, contrôleur du travail, et Evelyne Sire-Marin, magistrate.
Chacun s’accorde à réclamer que la justice s’applique à tous. Pourtant, la partialité de l’institution judiciaire dans le traitement des délits et des délinquants qui les commettent est manifeste, comme en témoigne la composition de la population carcérale. Certains délits font l’objet d’une surenchère punitive sans rapport avec leur gravité réelle, tandis que d’autres restent très largement impunis.
De très nombreux délits (une majorité ?) échappent ainsi complètement au regard de l’institution judiciaire, soit faute de plainte (notamment concernant les viols ou les violences conjugales), soit parce que les effectifs policiers affectés au domaine d’activité concerné (comme l’industrie financière) sont dérisoires. Des pans entiers de la société semblent en fait constituer des zones de non-droit : le monde du football, par exemple, où le dopage généralisé tout comme le blanchiment d’argent semblent tolérés par les pouvoirs publics ; ou encore le monde politique, où toute tentative de poursuite judiciaire semble condamnée d’avance à partir d’un certain niveau de responsabilité de la personne mise en cause, indépendamment de la gravité des faits.
Cette partialité indique que l’institution judiciaire est au service d’intérêts particuliers. Elle est l’instrument d’un rapport de force plutôt qu’un acteur neutre dégagé des luttes sociales. Son architecture et son fonctionnement découlent non de principes juridiques universels, mais de considérations stratégiques visant à assurer le contrôle de certains groupes sociaux. Pour le dire simplement, la justice de la République est une justice de classe. Mais quels intérêts la façonnent exactement ? Comment se construit précisément la répression judiciaire, y compris son illusion d’impartialité ? Comment remédier à ses dysfonctionnements manifestes ?
Nous en discuterons mardi 18 mars 2014, de 19 heures à 21 heures 30, à la Bourse du travail de Paris (salle Eugène Pottier, 3, rue du Château d’Eau, Paris 10ème, M° République), avec :
- Laurent Bonelli, maître de conférences en science politique à l’Université Paris Ouest Nanterre, co-rédacteur en chef de la revue Cultures & Conflits, il est spécialisé dans les questions de sécurité urbaine, de surveillance et de lutte contre le terrorisme. Il a notamment publié La France a peur. Une histoire sociale de l’«insécurité» (La Découverte, 2010). Il coordonne actuellement une enquête sur la justice des mineurs.
- Gilles Gourc, contrôleur du travail et membre du syndicat CNT Travail et Affaires sociales Rhône-Alpes, auteur de «Corps au travail » (Conférence, 2008).
- et Evelyne Sire-Marin, magistrate, vice-présidente du Tribunal de grande instance de Paris. Elle a été présidente du Syndicat de la Magistrature et co-présidente de la Fondation Copernic. Elle est, depuis 2011, vice-présidente de la Ligue des Droits de l’Homme.
Entrée libre dans la limite des places disponibles.