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Billet de blog 13 octobre 2008

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Crise: et maintenant, à qui le tour ?

Ca y est, les Européens se sont entendus pour proposer un plan sans imagination mais impressionant. 1300 milliards d'euros pour sauver le monde. Pas mal, mais qui va payer la facture ?

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Ca y est, les Européens se sont entendus pour proposer un plan sans imagination mais impressionant. 1300 milliards d'euros pour sauver le monde. Pas mal, mais qui va payer la facture ?

La grève des scénaristes de films économiques

C'est comme dans les films, où le héros arrive sur son cheval blanc, tue les monstres et sauve l'héroïne qui tombe aussitôt amoureuse. Il semble que les marchés soient aussi tombés amoureux des plans Paulson et Européen en rebondissant de plus de 10% aujourd'hui. Le happy end, c'est un gigantesque plan de sauvetage de la finance.

Il y a quelques centaines de milliards destinés aux banques, pour leur éviter de se sentir mal, et quelques milliers d'autres pour garantir les dépôts et jouer le rôle du marché interbancaire. Sait-on jamais, si une banque faisait faillite, tous les épargnants verraient leur argent garanti par l'Etat. Celui-ci garantit aussi un minimum de liquidité. Le but non avoué est d'éviter des paniques qui, elles, ruineraient à coup sûr les banques. Mais gardons à l'esprit qu'un plan type irlandais qui garantit 2 fois le PIB du pays est complètement illusoire si toutes les banques faisaient faillite. Personne n'irait prêter 300 milliards à la France dans le pire des cas. Et de nos jours, le pire n'est jamais sûr. Voir l'Irlande pour s'en convaincre.

Personne ne peut ou ne veut payer seul la facture

Mais, le problème n'est pas là pour le moment. Car ces montants astronomiques, il faut bien les financer. Et, quand on nationalise une banque, on récupère aussi toutes ses pourritures qu'il faut payer pendant des années – le Crédit Lyonnais devrait rappeler de joyeux souvenirs à certains. Seule la moitié des pertes dues aux subprimes ont été comptabilisées, et il faudra y ajouter d'autres pertes sur les crédits, les produits dérivés, les bourses et plus tard sur l'économie réelle. La facture sera bien plus élevée que les montants actuellement annoncés. Alors qui paiera ?

Pour le moment, on espère que ceux qui ont beaucoup d'argent (la Chine, les pays producteurs de pétrole, et le Japon parfois) soient bien gentils pour le prêter à nos pauvres économies occidentales selon le deal : si on coule, vous coulez aussi. Mais, si le Japon commence à entrer dans la danse de la crise après la faillite de l'un de ses assureurs (surtout qu'il ne va pas très bien depuis les années 90), si les pays producteurs de pétrole voient le prix du brut baisser et les américains les toiser de haut, alors il ne reste qu'une Chine dont on ne sait pas bien sur quel pied elle dansera. Le financement des plans n'est donc pas sûr, et il faudra sans doute monter les taux pour les rendre plus attractif et faire des concessions diplomatiques majeures. Le Dollar risque d'en prendre un sacré coup, nos économies aussi.

Le risque de faillite d'Etat et d'hyperinflation / déflation

Et ensuite, quid ? Il faudra bien rembourser tout ça à un moment ou à un autre : on fait payer les contribuables ? Les actionnaires ? Ou on fait tourner la planche à billet ? Peut-on augmenter les impôts ? Hum, peu probable. Faire payer les actionnaires ? Vu que ce sont les mêmes, à savoir les retraites et les assureurs, mais aussi les riches, peu probable sauf à faire craindre de sérieuses tensions sociales. Alors la planche à billet et l'inflation ? Alors c'est flouer ceux qui ont prêter... La Chine est suffisamment intelligente pour ne pas tomber dans le piège. Le ballet géopolitique ne fait que commencer.

Et ensuite ? La Californie est en faillite, l'Islande aussi. Le FMI n'a que 250 milliards à sa disposition pour agir, une broutille. La dette des Etats-Unis risque d'être dégradée, ce qui aurait des répercussions inimaginables sur le monde entier. On prendra peut-être l'argent des pays où on l'avait mis, en Afrique, dans les pays émergents, au risque de les faire couler. Mais alors, que deviendront ces pays qui nous fabrique nos jouets et nous donne leur blé ? Et quid de la finance américaine qui investissait justement dans ces pays pour avoir de forts rendements ?

Ce qui est intéressant et terrifiant est que nous sommes entrés dans une phase de l'histoire sans précédent, sans exemple et que nous ne connaissons absolument pas les conséquences de nos gestes. L'histoire, bonne ou mauvaise, se construit sous nos yeux. Espérons qu'elle sera heureuse, mais on ne saura ça que dans quelques années. En attendant, prions et tâchons d'agir à notre mesure. Car c'est aussi dans ces temps troubles que de nouvelles idées peuvent surgir. Et changer le monde.

Référence : http://www.telos-eu.com/fr/article/crise_financiere_qui_va_payer

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