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Billet de blog 15 avril 2008

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Malthus, le come-back

Nous croyions que les pénuries étaient une histoire ancienne, une de ces histoires que l’on raconte aux enfants pour leur faire peur ? Rien, et rien du tout, ce qui menace aujourd’hui, ce n’est ni plus ni moins qu’une famine.

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Nous croyions que les pénuries étaient une histoire ancienne, une de ces histoires que l’on raconte aux enfants pour leur faire peur ? Rien, et rien du tout, ce qui menace aujourd’hui, ce n’est ni plus ni moins qu’une famine.

Il y a quelques mois j’ai écrit un article sur la grève des pâtes en Italie : les italiens avaient manifesté contre la hausse des prix des pasta, et tout le monde avait ri de ce qu’on croyait être une farce. Je vois aujourd’hui à la Une de MédiaPart et des autres médias qu’éclatent aujourd’hui de terribles émeutes partout sur le globe pour les mêmes raisons, et ceux qui hier en aurait ri, aujourd’hui en sont désarmés.

Cette famine était prévisible : depuis plus d’un an, le prix des céréales a explosé et les plus pauvres n’ont plus les moyens de s’acheter ces biens de premières consommations. Je vois trois raisons à cette situation :

- une occasionnelle : de mauvaises récoltes dues à un climat éprouvant, une situation que le réchauffement climatique pourrait rendre plus fréquente, et donc une baisse de l’offre

- une structurelle : la hausse de la demande, par la Chine et l’Inde notamment qui consomment d’avantage, et par l’utilisation grandissante des carburants verts issus des céréales

- une spéculative : la spéculation récente sur les matières premières, utilisées comme refuges le temps que passe la crise financière

La première raison se reproduira de plus en plus fréquemment, la deuxième ira en s’aggravant, la troisième s’atténuera peut-être quand les financiers trouveront mieux. Rien n’indique donc que la situation actuelle soit un fait isolé, mais plutôt que ce n’est qu’un début.

Il est intéressant ici de se rappeler Malthus, ce penseur britannique dont l’histoire n’a retenu qu’un adjectif réducteur, et qui pourtant, peut nous aider à comprendre aujourd’hui ce qui se passe. L’idée de Malthus est très simple : la population croît exponentiellement alors que la production alimentaire augmente linéairement. Au bout d’un moment, il n’y a plus assez de nourriture pour tout le monde. Avant, c’étaient les guerres et les maladies qui permettaient de limiter la population, aujourd’hui ce sont les famines. La conclusion de Malthus est qu’il faut limiter la croissance de la population. L’histoire a montré que ses prévisions étaient complètement fausses ! Les techniques agricoles ont connu un tel essor qu’elles ont permis d’éradiquer les famines...jusqu’à aujourd’hui.

Malthus est en vérité le premier penseur de la décroissance : jusqu’à quel point peut-on utiliser les ressources naturelles sans remettre en cause l’humanité ? L’actualité fait ressurgir les Malthus, qui accusent les population d’Afrique de ne pas avoir contrôlé les naissances ou les gouvernements d’être trop corrompus, etc. Mais, il y a sans doute une raison plus incidieuse que l’on évoque pas.

Depuis des décennies, le FMI et la Banque Mondiale mènent des politiques économiques libérales extrêmement violentes dans les pays en voie de développement. Leur crédo est que la libéralisation de l’économie apportera, un jour, la richesse. Les structures locales sont cassées et les économies livrées au marché mondial sans avoir la chance de bénéficier, comme les USA par exemple, ou l’UE, de protections adéquates. Les économies en voie de développement sont extrêmement vulnérables car incapables de vivre par elles-mêmes. Une hausse des prix, et patatras, impossible de rien acheter, et surtout, impossible de vivre en auto-subsistance.

Il faudrait savoir quelle est la part de responsabilité de la BM et du FMI dans ces famines cruelles, eux qui prêchent aujourd’hui pour la mise en place d’un plan international pour enrayer les famines, dont on voit mal comment il pourra distribuer des céréales qui n’existent pas.

Malthus a peut-être tort, une fois de plus, la famine n’est pas tant due à une baisse des rendements qu’à une économie agricole internationale cruelle ; ou alors il a raison, et sa théorie de la décroissance sera de plus en plus importante.

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