Les taux d'inflation n'ont pas été si hauts depuis des années, 1981 précisément. Contrairement à cette époque, l'inflation n'est pas vraiment d'origine monétaire, mais résulte plutôt d'un changement de rapports entre l'offre et la demande. Les Banques Centrales qui ont des solutions monétaristes peuvent donner l'impression d'être dépourvue face à ce type d'inflation.
Le retour des taux d'inflation supérieurs à 3%
J'ai eu la mauvaise surprise de m'apercevoir que le compte épargne où l'on peut sagement placer ses modestes économies offre un taux d'intérêt...négatif ! Non seulement on ne gagne pas d'argent, mais on en perds ! La faute à l'inflation qui approche les 4%, alors que les taux de ces comptes sont plutôt de l'ordre de 3.5%.
Il faut que cette remontée est inattendue, depuis 1981, on n'avait pas connu ça et les taux d'intérêt étaient donc restés très bas. L'inflation, c'est de la perte de valeur monétaire. 10 euros il y a 5 ans, ce n'est pas 10 euros aujourd'hui, c'est environ 12% de plus. Si ce phénomène a été mis en évidence il y a plusieurs siècles, ses origines sont encore l'objet d'un débat entre économistes.
Des solutions monétaristes pour enrayer l'inflation
D'un côté, les monétaristes, pour qui tout est affaire de monnaie : plus il y a d'argent en circulation, plus sa valeur diminue. Un excès de création monétaire par rapport aux nouveaux besoins engendrés par la croissance stimule l'inflation. Trop d'argent tue l'argent. C'est ce qui s'est passé durant les années 70 : perte de valeur intrinsèque à la monnaie.
La solution, c'est de contrôler la création monétaire : comme ce sont les banques qui sont les principales créatrices, les Banques Centrales limite cette création via le taux d'intérêt : des taux hauts dissuaderont les banques de créer trop de monnaie. La politique des taux consiste donc à faire peser des pressions désinflationnistes sur la monnaie.
Mais l'inflation a d'autres sources, parfois difficilement contrôlables
De l'autre côté, ceux qui pensent que ce sont les déséquilibres macroéconomiques qui engendrent, de façon dynamique, l'inflation. Par exemple, si les salaires croissent plus vite que la productivité, la monnaie perd une partie de sa valeur car elle n'est pas soutenue par l'économie. Du keynésianisme en quelques sortes.
Depuis une vingtaine d'année, ces dernières pressions ont fortement diminuées, certains pensent en raison de la globalisation, nous aurions importé de la désinflation. Mais depuis quelques temps, les choses sont moins simples. Avec l'augmentation des prix du pétrole et des biens alimentaires, l'inflation augmente : mais pas n'importe quelle inflation, une sorte d'inflation keynésienne exogène. Ce n'est pas tout à fait nouveau, mais ce n'est pas ce à quoi nous étions habitués ces derniers temps.
En réalité, même en ne tenant pas compte du pétrole ou des céréales, on constate que l'inflation, ou « core inflation », est également à la hausse. Mais pas non plus de quoi s'affoler, les dernières annonces sont même plutôt rassurantes.
Que peut la BCE face à l'inflation importée ?
Le problème est que la politique des taux est avant tout monétariste, elle n'enraye en rien l'inflation importée, elle peut juste accroître la pression désinflationniste pour compenser cette inflation importée. Mais, le contrôle de l'inflation globale n'est pas entièrement entre ses mains. La BCE n'a pas beaucoup d'autres choix que de remonter ses taux si elle veut contraindre l'inflation sous les 3% du Traité, mais cela sert-il à quelque chose contre l'inflation importée ? Cela a-t-il un sens quand 90% de la création monétaire se fait en dehors du G7 (cf Patrick Artus) ou que la croissance de la masse monétaire globale (M3) est bien au-delà de la croissance du PIB ? Ou bien, l'inflation a-t-elle pris d'autres formes, comme par exemple la formation de bulle, sorte d'inflation localisée ?
Tout cela fait craindre à certains d'entrer dans une nouvelle stagflation. On peut raisonnablement penser que s'annonce plutôt une nouvelle configuration économique mondiale.
Franck Lirzin