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Billet de blog 21 mai 2008

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Crise : le retour des boucs-emissaires

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Les Hebreux avaient l’habitude d’envoyer un bouc dans le desert, charge de toutes leurs fautes. L’actualite economique nous rappelle que cette tradition est toujours vivace. Le Monde publie aujourd’hui une tribune libre accusant les marches financiers de tous les maux et jurant de les mater pour retablir la paix. Mais reguler ces derniers, etc-ce vraiment la bonne solution ? Le retour du bouc-emissaire A chaque crise, c’est pareil, on cherche un bouc-emissaire pour porter la responsabilite des malheurs, et qu’importe s’il ne l’est pas vraiment. La semaine derniere, j’ai participe a un micro-trottoir a la City : « selon vous, qui est responsable des crises ? » Que repondre ? Aujourd’hui c’est les marches financiers que l’on traine dans la boue, ou contre qui monte la colere Et pourtant sont-ils si maudits qu’on le dit ? Un pour tous et tous coupables Prenons la crise des subprimes : si les citoyens n’avaient pas voulu acheter leur maison a tous prix, que de frauduleuses agences ne leur avaient pas pretes, que les agences de notation avaient mieux evalue les risques, que le gouvernement n’avait pas encourage les citoyens a devenir proprietaire, que la Fed n’avait pas encourage cette pratique en suivant la doctrine Greenspan, les banques n’auraient rien fait et nulle crise. La crise est un phenomene de societe, une reaction en chaine, c’est la societe toute entiere, son fonctionnement qui est en cause ici, mais, on cherche tout de meme un bouc-emissaire, c’est du Rene Girard presque caricatural. Mettons que ce soient les marches les coupables, que propose-t-on ? Reguler ! Difficile quand on connait la realite du monde financier. A titre d’exemple, rappelons que quand Elliot Spitzer a voulu reguler un peu ce monde a New York, c’est Londres qui est devenu la 1e place financiere. Mettez un barrage et le fleuve change de lit. Mis a part une regulation mondiale, type Bale II, on n’arrrivera a rien. Et encore, il faut que les marches financiers y trouvent leur compte, sinon on peut se mettre le doigt dans l’oeil en croyant qu’ils suivront bien gentillement les regles. La regulation impossible Et puis n’oublions pas que la titrisation est une invetion geniale, qui marche tres bien pour plein d’autres choses, beaucoup d’entreprises sont en outre tres contentes d’avoir aujourd’hui a leur disposition toute une panoplie d’instruments financiers. Et comme on ne reforme jamais « contre » mais « avec », il faudra voir.

En quelques mois, Bernanke, en improvisateur genial, a transforme la Fed. Hier oracle aux paroles cryptees, elle est devenu le medecin d’une finance affaiblie : rachat de titres, adossement d’obligation, soutien pour le rachat de banques – voir l’article de Philippe Ries sur le sujet

Une deliberation economique ? La regulation, ce n’est plus jouer les arbitres, c’est coacher, accompagner, et integrer tous les acteurs dans la discussion pour leur faire retrouver le sens du bien commun. Une sorte de deliberation. Et en cela s’opposent une conception americaine (disons de Rawls) juridique ou il suffit des regles et une europeenne (disons Habermas) ou l ‘important est la discussion – avec aujourd’hui un Bernanke plus europeen qu’un Trichet ! En reunissant ainsi tous les acteurs, on evite de biaiser le debat en se focalisant sur des boucs-emissaires – on est un peu plus adulte. Reconnaitre ses fautes, c’est le debut de la redemption – il faut s’y mettre et eviter que les crises a repetition deviennent nos crus du Nil : un evenement chronique et naturel autour desquels s’organisent nos vies.

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