François Bonnet (avatar)

François Bonnet

Journaliste

Journaliste à Mediapart

122 Billets

7 Éditions

Billet de blog 16 octobre 2009

François Bonnet (avatar)

François Bonnet

Journaliste

Journaliste à Mediapart

Il y a du pluralisme au bureau politique du «Figaro»!

La droite a la tête qui tourne. Et l'interview spectacle de Nicolas Sarkozy au Figaro, ce vendredi, fait valser le vieux journal. Voilà que son directeur, Etienne Mougeotte, et son éditorialiste vedette, Ivan Rioufol, sont en plein court-circuit dans la même page! Pluralisme bienvenu ou panique?

François Bonnet (avatar)

François Bonnet

Journaliste

Journaliste à Mediapart

La droite a la tête qui tourne. Et l'interview spectacle de Nicolas Sarkozy au Figaro, ce vendredi, fait valser le vieux journal. Voilà que son directeur, Etienne Mougeotte, et son éditorialiste vedette, Ivan Rioufol, sont en plein court-circuit dans la même page! Pluralisme bienvenu ou panique?

Heureux Etienne Mougeotte. Le patron du Figaro est un homme qui ne doute pas. Nicolas Sarkozy parle? Il répète. Oui, le président «aborde son mi-mandat dans une bien meilleure situation personnelle que chacun de ses prédécesseurs de la Ve République». Oui, «la volonté du chef de l'Etat de revenir aux fondamentaux du sarkozysme est claire». Oui, il siffle enfin «la fin de la récré». Et «si certains ou certaines ministres se sentent mal à l'aise au gouvernement, la porte est grande ouverte», tempête le cher Etienne qui s'exaspère de «cette écume des jours qui nourrit ces polémiques publiques» pendant que «Vladimir Poutine négocie pour 100 milliards de dollars de contrat avec la Chine».

C'est cela le talent d'Etienne Mougeotte: le «bon sens» de Serge Dassault, son propriétaire, l'énergie de Nicolas Sarkozy, son président, le tout dans une plume qui ne souffre pas la contestation. Quoique... Car en cette même page 15 du Figaro du jour, Ivan Rioufol entre en dissidence. Le successeur du fameux Max Clos, d'ordinaire habitué à faire rempart de son corps face aux bolcheviques, se met soudain à douter à voix haute. Jusqu'au crime de lèse-majesté.

«Jean Sarkozy n'aurait très vraisemblablement jamais été choisi pour présider prochainement l'Epad de la Défense s'il n'avait été le fils du chef de l'Etat», écrit Ivan Rioufol. «A 23 ans et en deuxième année de droit, se voir confier un tel poste stratégique n'est concevable qu'en vertu d'un favoritisme initial.» Le président ne peut ignorer le scandale né de cette affaire, ajoute-t-il, sauf «à prendre à la légère le sentiment d'injustice qu'a fait naître cette affaire inutile. Le cynisme serait la pire des réponses».

Qu'est-il arrivé à Ivan Rioufol? L'éditorialiste du Figaro a fait un long voyage. Un voyage sur Internet, ses «sites alternatifs», «ses forums, ses blogs, ses tweets qui s'emplissent de bruyantes doléances». Et il a découvert là un «peuple»: «Qui veut l'écouter ne peut être que frappé par son sentiment d'abandon et sa méfiance croissante.» Car parmi ces sites où se mesure «le divorce entre le pays et ses représentants», il y a aussi lefigaro.fr ! Etienne Mougeotte n'a sans doute pas lu les flots indignés de commentaires de ses lecteurs-internautes concernant l'affaire Jean Sarkozy.

Ivan Rioufol si. Revenu de cette aventure sur le Web, il en déduit que «l'habileté politique de Nicolas Sarkozy n'est apparemment plus une réponse suffisante». Avez-vous bien entendu Etienne Mougeotte? «L'inutile taxe carbone, la choquante cagnotte contre l'absentéisme scolaire, l'incongru grand emprunt, la déroutante ouverture à gauche, la pipolisation d'un Mitterrand à la Culture, le coûteux procès Clearstream peuvent être vus comme les produits d'un cénacle indifférent aux besoins des gens», assène l'éditorialiste.

Il est vrai qu'il ne faisait pas partie des six journalistes envoyés à l'Elysée recueillir la parole présidentielle. Il n'a donc pu entendre que la «récréation était finie». Attention, avertit Etienne Mougeotte à l'adresse de tous ces parlementaires de droite qui grognent: «On recommande la lecture de l'interview du président.» Ivan Rioufol l'a-t-il seulement lue? Si oui, un rebelle est né au comité éditorial du Figaro.