François MUNIER (avatar)

François MUNIER

Voyageur, en rêve et en réalité.

Abonné·e de Mediapart

289 Billets

1 Éditions

Billet de blog 13 août 2014

François MUNIER (avatar)

François MUNIER

Voyageur, en rêve et en réalité.

Abonné·e de Mediapart

Solidarité internationale et canaux privilégiés.

Le soutien irréfléchi aux revendications nationales peut conduire à des impasses :On retrouve le même processus chez les Kurdes, les Tamouls et probablement d'autres peuples

François MUNIER (avatar)

François MUNIER

Voyageur, en rêve et en réalité.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le soutien irréfléchi aux revendications nationales peut conduire à des impasses :

On retrouve le même processus chez les Kurdes, les Tamouls et probablement d'autres peuples :

1. Revendications légitimes : égalité des droits, reconnaissance de la langue et de la culture, autonomie éventuelle.

2. Répression par le pouvoir central

3. Radicalisation du mouvement revendicatif, avec une dérive totalitaire : PKK1, Tigres de l'Elam Tamoul.

Les mouvements de solidarité doivent éviter plusieurs écueils :

  • confondre le soutien de revendications légitimes avec celui d'organisations aux méthodes contestables.

  • n'avoir pour seule sources d'informations sur une question nationale que les relais en France d'une organisation déterminée. Les membres de ces derniers sont le plus souvent très documentés, formés à dire ce que leurs interlocuteurs souhaitent entendre. Ces interlocuteurs passent souvent d'un collectif de soutien à un autre, des Mapuches aux Kurdes, sans voir que chaque cas est spécifique, et sans se documenter par ailleurs sur le sujet.

  • retenir comme seule solution l'identité : une langue = un peuple = un État. Il suffit parfois d'essayer de dessiner sur une carte les contours d'un État tamoul ou kurde pour comprendre les risques de l'opération. C'est aussi au nom de ce postulat que les vainqueurs de 1918 ont redessiné la carte de l'Europe, et fait le lit du nazisme.

Plus précisément, la situation kurde est très complexe :

Après avoir prôné la lutte à outrance, le PKK a entrepris, depuis que son chef charismatique est incarcéré, un long processus de négociation avec le gouvernement d'Ankara.

Les Kurdes d'Irak ont obtenu un statut d'autonomie proche de l'indépendance de facto. Ils sont divisés en deux partis, chacun contrôlant une zone déterminée. Et le gouvernement régional kurde est plus proche du pouvoir central turc que du PKK kurde.

Les Kurdes de Syrie ont créée un État de fait, dont la direction est proche du PKK turc.

Les droits de ceux d'Iran sont niés par le gouvernement de Téhéran.

Syrie et Irak : les portes de l'enfer se sont ouvertes2..

Quand nous manifestions contre la guerre en 2003, nous pensions que les « armes de destruction massive » n'existaient pas, et nous avions raison. Nous pensions que cette guerre avait un goût de pétrole et nous avions raison. Nous pensions qu'il n'y avait pas de rapport entre Saddam Hussein et Al-qaïda, nous avions raison, mais peu d'entre nous imaginaient que la guerre ferait de l'Irak la proie des djihadistes. Nous pensions que la chute de Saddam ouvrirait une période de troubles et de violences, mais peu d'entre nous imaginaient à quel point ce serait vrai.

Guerres entre milices, attentats et violence contre les membres des confessions religieuses honnies des djihadistes : chrétiens, yézidis, chiites sont fréquents en Irak depuis plusieurs années.

L'avancée des troupes de « l'émirat islamique » et son cortège d'horreurs a réveillé une partie de l'opinion publique et des gouvernements occidentaux.

Non sans beaucoup d'hypocrisie : dénoncer les violences c'est bien, accueillir des réfugiés, qui plus est arabes, est autre chose.

Le GISTI a rédigé un communiqué excellent sur ce sujet.

Que les islamophobes de service, les soutiens inconditionnels de la politique israélienne utilisent la situation dramatique des Chrétiens d'Orient pour vendre leur propagande est finalement dans l'ordre des choses.

Peu leur importe d'ailleurs qu'en liant leur cause à celle de « l'Occident », ils les soutiennent comme la corde soutient le pendu.

Mais certaines réactions me stupéfient par leur vision réductrice des choses.

« Je vois le monde avec les lunettes de mas amis »

Depuis 2005, le MRAP a publié 9 communiqués sur son site national. Celui mis en ligne en avril 2005 est plus une longue analyse, encore pertinente aujourd'hui, de la situation d'un communiqué de presse. En 2008, le MRAP appelle à un rassemblement contre la guerre.

Les sept communiqués suivants (2009 à 2010) traitent d'un seul sujet : le sort des militants iraniens de l'OMPI, alliés de Saddam Hussein lors de la guerre Irak-Iran, retenus dans un camp militaire en Irak et victimes de violences de la part des autorités irakiennes.

Et pendant de temps-là en Irak, il y avait des dizaines de milliers de morts.

Depuis 2011, la Syrie a elle aussi sombré dans le chaos, et beaucoup de défenseurs des droits de l'homme se demandent si le remède djihadiste ne serait pas pire que le mal Assad, ne voyant pas quelle serait la troisième solution, sur le terrain, pas dans les conférences internationales. Les communiqués et analyses du MRAP sur la guerre civile en Syrie sont rares : cinq.

Un communiqué qui traite à la fois de l'Irak et de la Syrie n'en est que plus susceptible d'analyse.

Le dernier communiqué est proprement surprenant :

Il commence par parler de l'attaque militaire de « l'émirat islamique (EI) » contre le gouvernement de facto du Kurdistan syrien, le « Rojava », et en profite pour mettre en cause la politique du gouvernement turc. Ce n'est qu'ensuite que le débat est élargi aux menaces contre le gouvernement kurde irakien et aux autres exactions de l'EI.

On a l'impression que le matériau premier et déclencheur de ce communiqué est issu des relais parisiens du PKK et qu'ensuite seulement le thème a été élargi.

Il est aussi possible que la description irénique du « Rojava » ait la même source.

Je termine par mise au point : l'EI ne s'attaque pas qu'aux « minorités », puisque les chiites sont parmi ses ennemis et sont majoritaires en Irak.

1Partiya Karkerên Kurdistan Parti des travailleurs du Kurdistan., essentiellement implanté en Turquie.

2 Amr Moussa avait employé cette formule pour l'Irak.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.