J'ai longtemps lu l'Est républicain, le quotidien de Nancy. J'étais parfois en désaccord, mais il faut reconnaître certains points :
un engagement antifasciste indéniable à l'époque de la montée du FN. Le souci d'enquêtes bien faites, documentées et sans complaisances sur quelques affaires judiciaires, une bonne tenue intellectuelle des articles rédigés. Champardennais, comme on dit, depuis plusieurs mois, je découvre l'Union, le quotidien de Reims, et son clone ardennais. Et là, on change de division. C'est beaucoup plus vite lu. Les « Unes » alternent les résultats du CSSA Sedan, accidents de la circulation, drames de l’alcoolisme et fermetures d'usine.
Mais il y a plus grave : certaines chroniques politiques et billets d'humeur laissent pantois, notamment celles du dimanche, regroupées sous la rubrique « Satiricon », de Philippe Le Claire.
Un des journalistes, Bruno Testa commente le 22 mai 2011 l'affaire DSK sous ce titre :
« Le nez de Cléopâtre, la bite de Dominique.. ».
Ce qui suit est de la même profondeur :
« son talon d'Achille était son sexe »
« replacer le serpent de Dominique dans sa culotte »
« Le complot et con pelote »
« grâce à la bite de Dominique »
et il y a au moins une injure : « l'autre naze de Ramzi Khiroun »
Il y a aussi quelque chose qui obsède le « Satiricon », c'est l'islam.
Et c'est un feu d'artifice, à propos des « prières dans la rue. »
Les erreurs, approximations, méconnaissance de la langue française pullulent.
« sous prétexte d'une laïcité dont la vocation serait la protection des cultes ». Et bien justement, deux conceptions de la laïcité se sont affrontées lors du vote de la loi de 1905, et c'est celle défendue par Briand et Jaurès qui l'a emporté : « La République assure la liberté de conscience (..) garantit le libre exercice des cultes ». Alors, ensuite, on croit en une religion ou on n'y croit pas, mais pratiquer un culte est un droit, et je ne suis pas sûr que l'auteur qualifie également de superstitions les processions religieuses catholiques. Des lecteurs outrés ne manqueraient pas de protester.
Qu'apporte l'allusion assez grasse aux orientations sexuelles de Bertrand Delanoë ?
Des observateurs et des militants ont essayé de quantifier le besoin en lieux de cultes des musulmans. Un travail de journaliste aurait été de faire une enquête de terrain (il y a au moins un lieu de culte trop petit et des prières dans la rue dans la région, et les musulmans concernés n'ont qu'une hâte : avoir une mosquée suffisamment grande pour y prier, pourquoi ne pas leur donner la parole ?) et éventuellement de refaire les calculs pour démontrer leur inanité. C'est plus simple de traiter un blogueur de Rue 89 de blogueur d'opérette, sans donner d'ailleurs la référence complète de l'article, qui ne fait que reprendre et commenter1 une enquête de terrain parue dans Libération.
Et si M. Moussaoui, président du CFCM, dont c'est l'objet statutaire, se livre aux mêmes calculs, ce n'est pas un numérologue2 !
Et effectivement, s'il y a 850 000 musulmans qui souhaitent prier dans une mosquée le vendredi, les locaux actuellement disponibles sont insuffisants.
Ce qui se passe dans d'autres pays, pour d'autres raisons, n'a aucun rapport. Et personne ne se « fout » des autres cultes. Par exemple, le problème de l'Église catholique, c'est que ses lieux de cultes actuels sont surdimensionnés. Si elle en est propriétaire (construits après 1905), elle les vend. Pour les autres, propriétés publiques, la question sera certainement posée un jour par des municipalités.
Pour terminer, l'auteur explique que la prière commune est identitaire et communautaire. La messe du dimanche, la cérémonie du Sabbat aussi. Pourquoi serait-elle forcément politique, alors que les autres ne le sont pas ?
Quant à l'arabe, c'est la langue de la prière. L'imam (dont le statut est plus proche de celui d'un pasteur protestant que de celui d'un prêtre catholique) qui prêcherait en arabe coranique ne serait pas compris de la plupart des fidèles, dont la langue maternelle est le turc, un arabe dialectal ou le français.
1Et le résultat d'un calcul ne s'appelle pas une adéquation !! Adéquation : adaptation parfaite (Larousse dixit).
2Numérologie : pratique occultiste, qui consiste à tirer de l'analyse numériques de caractéristiques individuelles telles que le nom, le prénom, la date de naissance, des conclusions sur le caractère des personnes et des pronostics sur leur avenir (Larousse également)