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Billet de blog 25 novembre 2014

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Palestine: les mots ne sont pas innocents

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Vous connaissez sans doute le site « Les mots sont importants ». Je dirais de mon côté que les mots ne sont pas innocents.

J'ai déjà signalé, à plusieurs reprises sur Médiapart, que l'introduction dans son discours de thèmes et mots importés du camp adverse était souvent le prélude à une capitulation idéologique, qui en précède d'autres.

Je connaissais l'exemple du « racisme anti-blanc », concept forgé par l'extrême-droite :

Pierre Paraf (MRAP) a-t-il découvert le racisme anti-blanc?

Le racisme anti-blanc à l'épreuve des faits

Racisme anti-blancs : vrais débats et fausses accusations

Racisme anti-blanc : « toujours plus ».

A propos de l'orientation adoptée par le MRAP sur "le racisme anti-Blancs".

C'est maintenant au tour des droits des Palestiniens d'être victimes du même rapt sémantique.

Il y avait déjà eu quelques alertes, avec notamment une intervention surprenante lors de la dernière AG à propos des campagnes BDS, qui avait laissé de marbre la direction du MRAP

Après l'attentat dans une synagogue de Jérusalem, le MRAP a publié le communiqué suivant :

Israël – Palestine : pour stopper les violences, une seule solution, le respect du droit 1

Le MRAP rappelle d'abord qu'il condamne cet attentat parce qu'il condamne toutes les violences contre des civils. Soit.

Pour être tenable, cette condamnation de principe doit être systématique, pour toutes les violences contre des civils, y compris celles commises par des mouvements dont on soutient le combat.

Et bien entendu, il faut aussi régulièrement condamner celles commises par les gouvernements dont on combat la politique.

C'est ensuite que le texte du communiqué pose des problèmes  plus graves:

« le crime barbare commis contre la synagogue ».

Contrairement à ce que certains pensent, je suis profondément laïque. Malgré l'intérêt que je porte à l'architecture religieuse, malgré le respect que j'ai pour les croyants en tant qu'être humains, que je ne veux pas blesser dans leurs convictions intimes, je réserve le terme de crime aux atteintes à la personne humaine.

C'est pour des raisons identiques que j'ai toujours refusé d'employer le terme de profanation pour les saccages, dégradations contre des lieux de cultes. Et ce qui est sacré (c'est l'origine du mot profaner) pour les uns ne l'est pas pour les autres. Je suis d'ailleurs en phase avec le code pénal français qui réserve ce terme aux atteintes aux cadavres et sépultures.

« En détruisant la maison des terroristes »

Qualifier les auteurs de l'attentat de « terroristes » c'est à la fois reprendre le vocabulaire du gouvernement israélien et faire un contresens sur le terme « terroriste ». Le terrorisme est une méthode qui cherche à réaliser un projet politique en employant la violence contre des non-combattants, en faisant régner un climat de terreur. Le terrorisme peut être aussi le fait d'États. Au cas particulier, cet attentat ne s'inscrit pas dans un projet terroriste.

« Imaginerait-on que les autorités françaises détruisent les maisons des français auteurs des crimes aux côtés de l’État Islamique. »

Cette comparaison est incroyable. D'un côté, il y a des gens qui vivent sous un régime d'occupation depuis bientôt 50 ans, avec tout ce que cela suppose de brimades, d'humiliations. Des gens qui voient leur pays, leurs maisons, leurs champs disparaître progressivement avec la colonisation. Des gens qui connaissent régulièrement les violences de l'occupant, la prison, qui risquent leur vie en allant travailler, etc..

Ce qui est surprenant, ce n'est pas qu'ils cèdent à la tentation de la violence, mais qu'ils n'y cèdent pas plus souvent.

Comment peut-on les comparer avec des jeunes ayant perdu tout repère, toute perception rationnelle du monde, qui se mettent au service d'une cause détestable et criminelle.

Oserait-on comparer la violence de la femme rouée de coups qui décide de tuer son bourreau et celle d'un pervers criminel ?

La suite est moins pire, mais pourquoi appeler à des sanctions internationales (ce qui est louable mais peu réaliste) sans évoquer les actions citoyennes de boycott, indispensables ?

119 novembre 2014.

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