Elle était née et habitait à Compeyre, un petit village accroché au roc, près de Millau, dans l'Aveyron. Selon les mentions écrites à la plume et figurant au verso de ce cliché celui-ci a été pris en 1911 alors qu'elle était âgée de 97 ans. Elle était donc née en 1814 il y a presque 200 ans.
Elle porte une sorte de coiffe alors typique des femmes de la région. Veuve et donc habillée de noir. Le soleil qui frappe le sud du massif central a bruni son visage en y imprimant des rides tellement profondes qu'il en ressort un sourire. Ses mains de paysanne sont humblement jointes. Elle est assise contre un mur en pierre du pays. Peut-être la maison familiale qu'elle n'a jamais quittée et dans laquelle elle vivait avec ses enfants. Disparue quelques temps plus tard elle ne saura jamais que son petit-fils, engagé volontaire, traversera miraculeusement la Grande Guerre.
A quoi pensait-elle au moment où cette photographie a été prise ? Sans doute que tout cela était bien inutile. Et pourtant...
Je viens de retrouver cette photographie au milieu de tant d'autres. Je ne sais comment ce cliché a pu résister au temps. Serons-nous en mesure de transmettre nos propres souvenirs photographiques dans 100 ans ? Ces clichés étaient précieusement conservés par les familles. Nos clichés numériques disparaissent souvent avec nos ordinateurs lorsque nous avons omis de les éditer sur la petite imprimante à jet d'encre...
J'aime cette photographie même si elle n'a strictement rien de particulier. Je voulais simplement la mettre en ligne. Certainement qu'elle n'y restera pas 100 ans. Mais comment pouvais-je faire autrement pour rendre hommage à celle dont je ne connais ni le nom ni le prénom et que j'appelle la Mamette. Je sais seulement qu'elle était mon arrière...arrière...arrière...grand-mère.