Le confinement n'a pas que des inconvénients. Cela dépend bien sûr de l'endroit où l'on vit. Mais il est indéniable que nombreux sont ceux qui en profitent pour respirer un peu dehors. Lorsque l'on a la chance d'habiter près des champs ou d'une forêt, une promenade est bienvenue. On aurait pu croire que le confinement allait suspendre la chasse et par conséquent nous permettre de nous y déplacer en sécurité. Mais c'était sans compter avec le groupe de pression des chasseurs. Donc ces messieurs ont obtenu une dérogation pour faire des "prélèvements" (voyez l'euphémisme) pour maintenir un "équilibre" (ben voyons). De quel équilibre parle-t-on ? Les sangliers ? qui les nourrit avec des postes garnis au maïs en pleine forêt ? Les chevreuils ? pas de prédateurs, éradiqués par ces même chasseurs, donc ils prolifèrent. Les renards ? désolée mais ce sont les alliés de mon jardin car depuis que l'éleveur voisin a cessé son activité, les campagnols pullulent. Sans les renards il serait impossible d'avoir la moindre carotte dans le potager. Les blaireaux ? je n'ai pas encore vu de dégâts provoqués par eux.
Pourtant, nous avons toutes sortes d'hôtes qui viennent dans le jardin. Nous les avons photographiés. Il y a au moins deux renards : l’un est grand avec une queue magnifique, l’autre est plus petit et borgne. Ils se rencontrent, quasi côte à côte, avec un blaireau qui maraude dans les pommes tombées. Et puis le jour il y a des écureuils qui fouillent dans les herbes pour trouver les noix (pas de noisettes cette année) et les chevreuils qui passent dans les fougères et lorgnent vers le potager pour voir si par hasard, il ne trainerait pas un petit quelque chose à se mettre sous la dent. De temps en temps ils écorcent une branche de groseiller ou de cassissier. Mais on leur pardonne, ils sont si beaux. Le confinement les a rendu hardis. Ils n’en sont que plus vulnérables.
Car les chasseurs se considèrent comme les propriétaires de la nature et contester cette propriété à des gens armés d’un fusil est assez périlleux. Ils occupent un pavillon à 200 m de notre maison. Les jours de chasse, nous avons droit au trafic des 4/4 et des SUV car il faut aller au plus près des zones de chasse en voiture. Marcher c'est fatiguant surtout avec une arme. Chasser est un sport, mais pas trop. Ces jours-là, pas de cueillette de champignons ni de balade avec le chien car la zone balisée commence en général dès le talus en face de la maison et s’étend sur toute la forêt jusqu’à la route. Bref, nous sommes en état de siège.
Dans le portrait qui lui a été consacré et diffusé par France 3 (à voir absolument, 50 mn de pur bonheur), Vincent Munier, naturaliste et photographe vosgien, montre les amours de deux lynx. Deux animaux superbes. Il montre aussi la radio faite par le vétérinaire qui a autopsié le mâle après qu'un imbécile l'a criblé de 120 plombs de chasse. Le lynx est protégé. Il ne se consomme pas. Ce mâle a payé un tribut à la bêtise humaine et à la lâcheté. J'ai envie de terminer en citant Vincent Munier : "De super prédateur, l'homme est devenu un super destructeur".