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Billet de blog 12 octobre 2021

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Les orientations pour l’école de Madame Pécresse : en arrière toute !

Madame Pécresse vient de communiquer ses orientations pour l’école. C’est bien de connaître dès maintenant ses intentions car cela exclut toute velléité de voter pour elle, si d’aventure un électeur n’avait pas compris à quel point cette personne est le vestige d’une conception profondément passéiste de la société.

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Madame Pécresse vient de communiquer ses orientations pour l’école. C’est bien de connaître dès maintenant ses intentions car cela exclut toute velléité de voter pour elle, si d’aventure un électeur n’avait pas compris à quel point cette personne est le vestige d’une conception profondément passéiste de la société. Revue de ses préconisations (je m’appuie sur le compte rendu fait par Le Monde).

1. « Remettre les fondamentaux au cœur de l’école. » On croirait entendre Monsieur Chevènement. Cela conduit à privilégier le français et les maths, car tout le monde sait bien que ces disciplines ne se travaillent pas à travers d’autres disciplines. Par exemple, on ne peut travailler le français en rédigeant le résumé d’une recherche en histoire, ni les mathématiques en effectuant des mesures dans une expérimentation en sciences d’observation… N’est-ce pas ? Deux heures de français, une heure de maths un point c’est tout. D’ailleurs la « consolidation » qu’elle prévoit de mettre en place pour les recalés de l’examen d’entrée au collège portera aussi sur ces matières car comme on le sait, le citoyen de demain doit « bien parler » le français et savoir faire une soustraction pour ne pas être en découvert à la banque. Pour les grandes questions qui agitent le monde, on verra après s’il est « consolidé ».

2. Mettre en place « un examen avant la 6e, non pas pour bloquer [l’]entrée au collège, mais pour créer des classes de 6e de consolidation »« Les enfants ayant échoué à l’examen y feraient massivement du français et des maths pour se remettre au niveau », explique-t-elle. Je fais partie de la première génération qui n’a pas subi d’examen d’entrée en 6ème. Cela fait donc 64 ans que ce machin à dissuader les élèves n’existe plus. Alors que l’automaticité du passage du CM2 à la sixième et l’instauration du Socle commun (qui entérine de fait que l’école et le collège constituent un ensemble continu) auraient dû depuis longtemps encourager la mise en place de mesures de transition et d’échange entre les deux structures, Madame Pécresse ne trouve rien de mieux que de retourner à une coupure sélective pour mettre en place une nouvelle voie de garage où vont s’engluer, devinez qui ? Je ne vais pas vous faire un dessin. C’est une façon de se débarrasser des enfants qui pour diverses raisons, sociales bien sûr, mais aussi psychologiques (allergie à l’école), liées à des troubles de croissance plus ou moins momentanés, des évènement familiaux divers etc. ne sont pas dans les clous d’une norme supposée évidente dans tous les Cafés du commerce où la proposition de Madame Pécresse va faire un tabac.

3. Pour remédier à la crise des vocations chez les enseignants, elle entend créer « une réserve éducative nationale, composée de professeurs retraités rémunérés », qui fourniraient une aide aux devoirs gratuite et remplaceraient « sans délai un professeur absent ». Voilà une idée qu’elle est bonne. Les retraités au boulot. Bon je n’insiste pas...

4.Elle souhaite également donner « plus d’autonomie aux établissements », pour leur permettre de « mieux rémunérer les enseignants en valorisant l’ensemble de leurs missions éducatives ».  Après la vision caporaliste de l’école primaire de Monsieur Blanquer avec un directeur recruteur mais qui ne doit pas déplaire à l’IEN seul vrai responsable, voici le chef d’établissement DRH distributeur de primes. Bonjour l’ambiance dans les salles des profs. Où va-t-elle chercher tout ça ?

5. Elle déclare : « La crise que traverse l’éducation impose un sursaut national, ce que j’appelle le projet de “nation éducative” ». Après « la start up nation » voici la nation éducative. Rien de moins. Elle ajoute : « L’école, c’est la fabrique de la France, à travers la transmission de nos savoirs, de notre histoire. »  Ben tiens. Le vieux rêve de la droite de mettre l’école au service d’une politique rétrograde et injuste, en instrumentalisant l’enseignement de l’histoire ne saurait être mieux exprimé.

6. Elle veut aussi restaurer l’autorité et la discipline en poursuivant les élèves et les parents qui agressent les professeurs. Je croyais naïvement qu’un professeur et l’équipe de direction pouvaient déjà porter plainte en cas d’agression ou d’injure. J’ai dû rêver. De même elle ressort le serpent de mer sarkozyste de la suspension des allocations aux familles délinquantes. Pour ce que j’en sais cette mesure a été utilisée en Grande Bretagne (David Cameron, 2007) sans rien changer à l’absentéisme. Quant à la France, le gouvernement s’est déclaré hostile à l’amendement voté par le Sénat (2021) et Gabriel Attal a « refusé d’ajouter la misère à la misère ». C’est dire la popularité du machin.

7. Elle préconise « une protection renforcée de tous les enseignants » qui « devraient pouvoir signaler les faits de radicalisation à une structure dédiée gérée par le ministère de la justice et de l’intérieur ». Il me semble que c’est déjà possible auprès de la gendarmerie  sur la plate-forme téléphonique ouverte au sein de l’Unité de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT). Bref, un brassage de vent à l’approche de l’anniversaire de l’assassinat de Samuel Paty. Dans ce cas d'ailleurs, puisque l’assassin n’était pas scolarisé dans le collège et donc inconnu dans l’établissement, le signalement n’était même pas possible. Mais Madame Pécresse n’en est pas à une approximation près.

Qu’un parti puisse soutenir la candidature à l'élection présidentielle d’une personne capable de proférer de telles inepties (rappelons que la dame a été ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche) en dit long sur la vacuité intellectuelle de la droite.

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