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Francoise Diehlmann

Germaniste, traduis, blogue sur l'Allemagne, également sur la France, l'Europe, le monde, membre du Bureau exécutif de l'Union des Fédéralistes Européens - France (UEF-France) et secrétaire générale de l'UEF-IdF, Ecolo cohn-bendiste, je combats les nationalismes et régimes totalitaires, je milite pour la reconnaissance de l'Etat palestinien et la victoire de l'Ukraine, la défense des droits humains

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Billet de blog 21 mai 2014

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Hep ! Vladimir Poutine, tu ne feras jamais rêver le monde

Cela fait plus de 2 mois qu'a eu lieu le référendum de rattachement de la Crimée à la Russie. Il est choquant qu'un référendum qui s'est déroulé en violation du droit international avec la bénédiction de Vladimir Poutine n'ait pas provoqué plus de réactions au sein de l'Union Européenne et de la communauté internationale.

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Cela fait plus de 2 mois qu'a eu lieu le référendum de rattachement de la Crimée à la Russie. Il est choquant qu'un référendum qui s'est déroulé en violation du droit international avec la bénédiction de Vladimir Poutine n'ait pas provoqué plus de réactions au sein de l'Union Européenne et de la communauté internationale. Des voix européennes se font entendre fortement dans l'Union à ce sujet comme celle du Premier minstre polonais, Donald Tusk, Rebecca Harms, eurodéputée allemande, Joschka Fischer, Dany Cohn-bendit. Malgré cela, ce rattachement semble consommé, on note tout simplement, en passant, que l'Ukraine a perdu la Crimée. Que des journalistes soient emprisonnés, silence. Que le chef tatar, après avoir voyagé à Kiev, n'ait plus le droit de retourner en Crimée, silence. Que les Tatars célèbrent le 70e anniversaire de leur déportation sous Staline, en petits comités, et non sous la forme d'une grande manifestation car la peur est de retour, silence. Que les Tatars soient étrangers chez eux, silence. Que la plupart des 10 000 déplacés en Ukraine – selon le UNHCR – soient des Tatars, fuyant vers le centre et l'ouest de ce pays, silence. Quelle est la politique de Moscou en direction de la Crimée ? Il n' y en a pas, il n'y a pas de stratégie de développement. Le seul intérêt pour Moscou est l'accès le plus rapide vers ses zones stratégiques du Sud, comme la Syrie, via la Mer Noire.

Mais quel est donc le rêve russe ? Il y a un rêve américain de « happines », un rêve européen avec des valeurs démocratiques, le rêve européen est tout sauf un rêve d'annexion. Au contraire, l'Europe attire ceux qui rêvent de démocratie. Mais le rêve russe de Vladimir Poutine, quel est-il ? Après l'empire tsariste et orthodoxe, Moscou se voyait le centre mondial de l'empire communiste, lequel s'est effondré en 1989 avec la chute du mur de Berlin qui célèbre cette année ses 25 ans. Si Mikhaïl Gorbatchev avait été celui qui avait replacé au centre le rêve européen avec son idée de maison commune européenne, il n'a pas été pris au sérieux par les Occidentaux. Pire ils lui ont tourné le dos, lorsqu'il leur a demandé de l'aider dans ses réformes et la fin de l'Union soviétique a été signée par les Présidents de la Fédération de Russie, de Biélorussie et d'Ukraine de l'époque après une nuit de beuverie comme le souligne Bernard Guetta dans son excellent livre « intime conviction ».

Depuis, et avec l'ère Poutine, on assiste à un recul sans précédent. Les idées chauvines et nationalistes se développent rapidement. Le rêve russe de Vladimir Poutine, c'est de faire de la Russie une puissance mondiale avec comme mot d'ordre : « si on ne m'aime pas, on doit me craindre ». Donc le rêve russe poutinien, c'est zéro. Il n' y a pas d'offre pour les voisins. Qui accepterait dans ce contexte de rejoindre volontairement l'Eurasie ?

Poutine ne fera jamais rêver. L'histoire avance et la planète continue de tourner. Le monde s'organise en réseaux, ce qui n'est pas pour plaire à Poutine. Confronté à des contestations dans son pays au niveau des libertés  démocratiques, il tente de déstabiliser l 'Ukraine en accusant le mouvement de la Place Maïdan à Kiev d'être un mouvement majoritairement fasciste voire néo-nazi, accusation relayée par la gauche de la gauche. Bien entendu, les mouvements citoyens ou d'en bas n'ont jamais fait partie de la culture communiste et/ou poutinienne, pour qui de tels mouvements sont toujours dirigés de l'extérieur, pourquoi pas de la CIA. Seulement voilà, le mouvement de la place Maïdan, qui rappelons-le, a fait de nombreuses victimes pour la liberté, a eu comme objectif de chasser les Oligarches du pouvoir et de se rapprocher de l'UE au nom de la démocratie ; Le Mouvement Euromaïdan s'inscrit dans le cadre de ces mouvements citoyens de Solidarnosc en Pologne, de ceux de l'ex RDA au moment de la chute du mur et de ceux de la révolution de velours dans l'ex Tchécoslovaquie. Euromaïdan fait partie du mouvement post 89 avec toutes les contradictions qu'il renferme, comme ce fut le cas aussi des mouvements est-européens de libération de 1989.

Aussi accuser Euromaïdan de mouvement fasciste comme le font Vladimir Poutine et la gauche de la gauche a quelquechose de particulièrement grave. En effet, tout ce petit monde prétend agir au nom de l'ANTIFASCISME. Mais comment la propagande de la RDA appelait-elle le mur de Berlin de 1961 à 1989 ? « der antifaschsitische Schutzwall » ou en français : « mur de protection ANTIFASCISTE ». Qui Vladimir Poutine reçoit-il en grande pompe à Moscou comme soutien ? Marine Le Pen. S'il plaide pour l'ANTIFASCISME, pourquoi reçoit-il Marine Le Pen. Il s'agit, comme le dit haut et fort Joschka Fischer, de déligitimer le mouvement démocratique ukrainien. Les démocrates de partout doivent s'élever contre cette tentative de délégitimation et ne doivent en aucun cas tomber dans le piège poutinien dans lequel la gauche de la gauche est déjà tombée, et donc ne pas se retrouver prisonniers du piège de l'ANTIFASCISME dévoyé.

On voit bien que Poutine ne connaît pas la diplomatie de la Paix. Il ne conn aît que la diplomatie musclée, dont celle du gaz : il veut fermer prochainement le robinet du gaz si l'Ukraine ne paie pas ses dettes, il y a la construction du gazoduc « south stream » contournant ainsi l'Ukraine, qui passera sous la mer noire via la Bulgarie, la Serbie, l'Autriche, l'Italie avec un accord de la Turquie pour la pose du gazoduc dans ses eaux territoriales. Pour réaliser tous ces plans poutiniens, l'annexion de la Crimée est une véritable aubaine. La Pologne avait déjà manifesté son inquiétude d'être écartée des projets énergétiques européens au moment de la construction du gazoduc North Stream reliant la Russie à l'Allemagne via la mer Baltique, inquiétude qui s'est vue confirmer avec le conflit russo-ukrainien. La Pologne insiste aujourd'hui sur la mise en place d'une Union énergétique européenne, permettant d'aider la Pologne à ne plus miser exclusivement sur le charbon. Elle reproche à des pays de l'UE comme la France et l'Allemagne qu'il n'y ait pas de discussion commune, l'Allemagne restant dans son coin pour ce qui est de sa politique d'énergies renouvelables, la France faisant de même concernant sa politique nucléaire. Ce manque de politique énergétique commune afaiblit l'Europe. Les Grünen soutiennent la proposition d'Union énergétique européenne de la Pologne et souhaitent que l'Allemagne cesse d'être sous la pression des lobbies de l'énergie qui l'ont obligé à négocier seule et non dans un cadre européen, l'exemple du gazoduc North Stream Russie – Allemagne est flagrant.

Mais l'Union Européenne doit réagir et vite. Elle n'a jamais eu depuis la chute du mur de Berlin une véritable politique concernant la Russie. On assiste à un vide sidéral. Il est temps et urgent de parvenir à une véritable Ostpolitk européenne. La Ostpolitik de l'ancien chancelier allemand social-démocrate Willi Brandt consistait à réaliser une politique de détente et de rapprochement entre l'Allemagne de l'Ouest ou RFA, l'URSS et ses alliés du pactes de Varsovie. Des traités ont été signés entre la RFA et l'URSS et la RFA et la Pologne, reconnaissant l'inviolabalité des frontières de la ligne Oder-Neisse. A cela s'ajoute une normalisation des relations entre les deux Allemagnes voire à une reconnaissance mutuelle. Ainsi s'établissait une période de coexistence pacifique entre l'Ouest et l'Est de l'Europe. Aujourd'hui, il ne s'agit pas de faire un « remake » de la Ostpolitik de Willi Brandt, mais bien de proposer qu'une Ostpolitik de l'UE en direction de ses voisins à l'Est, y compris la Russie, se mette en place, dont les contenus doivent être discutés le plus démocratiquement possible.

Trop de temps a été perdu. On célèbre le centenaire de la Première Guerre mondiale, les 25 ans de la chute du mur de Berlin et bientôt les 70 ans de la fin du désastre que furent le nazisme et la Seconde Guerre mondiale. Il est donc bon de se poser la question aujourd'hui : A quel chapitre de l'histoire européenne, sommes-nous :? 

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