freddy klein

Abonné·e de Mediapart

773 Billets

0 Édition

Billet de blog 1 mai 2022

freddy klein

Abonné·e de Mediapart

MA LIBERTÉ CONTRE LA VÔTRE

Et c'est ainsi que Jupiter est grand.

freddy klein

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il est grand temps de faire une petite pause dans la politique et de s'attaquer au marronnier du jour : la sécurité routière, qui semble n'être ni de gauche ni de droite, est un vrai sujet qui fâche et qui donne l'occasion de s'étriper.

Quelques automobilistes gagnés par une certaine nervosité relèvent ces jours derniers que les services de l'Etat en prendraient à leur aise en verbalisant les excès de vitesse pour remplir les caisses. Ils nous rançonneraient littéralement et sans vergogne. Passe encore que le porte-monnaie des conducteurs de Maserati et de quelques autres bolides soit ponctionné dès que leur vitesse excède les 50 km/h en agglomération ou les autres vitesses limitées, mais est-il concevable que celui des conducteurs de voitures ordinaires le soit à la même hauteur ? Ne serait-il pas plus convenable que le montant des amendes actuellement en vigueur soit doublé, voire triplé pour les premiers et diminué de moitié pour les seconds.

Cela ne vaut pas que pour les propriétaires de voitures de grand luxe par simple principe. Un examen attentif de la situation des concernés s'impose. Les propriétaires de belles voitures, qu'elles soient de couleur rouge ou d'une autre teinte et qui ont acheté leur véhicule au comptant, à l'exclusion donc de ceux qui ont fait un emprunt bancaire, devraient bénéficier d'une surtaxe de leurs contraventions. Ceux et surtout celles, qui ont eu recours à la formule de location avec option achat autrefois appelée leasing pour acquérir un des véhicules précédemment évoqués pourraient éventuellement bénéficier du même régime surtout si la formule d'achat pour laquelle ils ont opté leur permet de déduire intégralement leurs dépenses de déplacement de leurs frais généraux ou de ceux de leur entreprise.

Conscient que cette classification des véhicules et de leurs propriétaires va considérablement alourdir la tâche des fonctionnaires chargés de la verbalisation, je suggère qu'il sera peut-être utile de faire figurer sur la carte grise, dès la première acquisition du véhicule, le statut exact du dit véhicule, de son acquéreur et du mode de paiement. Afin d'éviter toute tentation d'organiser une fraude massive par des acquisitions/reventes rapides, tout en instaurant une certaine souplesse en cas de revente afin de ne pas nuire au marché de l'occasion, la mesure pourrait ne concerner que certains véhicules indépendamment de leur puissance. Il est en effet hors de question d'instaurer une quelconque discrimination et de jeter le discrédit sur certains modèles de voiture dont les heureux propriétaires seraient davantage prédisposés que d'autres à commettre des excès de vitesse. Ainsi, ne seraient concernées que les voitures de couleur rouge qui comme chacun le sait sont plus rapides que les autres, donc susceptibles de pousser à commettre les excès de vitesse les plus significatifs. Les voitures rouges de forte cylindrée et celles tout aussi rouges de moindre cylindrée ne sauraient connaître le même traitement et un examen approfondi de chaque cas s'impose.

En un second temps, il convient de cerner avec le plus grand sérieux ce qui doit être qualifié d'excès de vitesse. Est réputé excès de vitesse tout dépassement de la vitesse autorisée, mais tous les excès se valent-ils ? Qu'en est-il des petites excès et des très importants excès ? Nous éviterons à l'avenir de parler de « vitesse limitée » et ne parlerons désormais plus que de « vitesse autorisée », même si cela ne répond pas à notre question.

Atteindre la limite de la vitesse autorisée et la dépasser légèrement ne sauraient être considérés comme une infraction en soi. Tout est affaire d'intention, de mesure et de circonstances. Un dépassement autorisé de l'ordre de 5 km/h, en particulier pour les conducteurs les plus chevronnés, paraît tout à fait raisonnable, sans oublier la nécessaire pondération pour tenir compte de l'erreur de mesure du radar et de l'éventuelle imprécision du compteur du véhicule imputable au constructeur et qu'il serait injuste de reprocher au conducteur quelle que soit la cylindrée de son véhicule d'ailleurs.

Dans le cas d'une vitesse autorisée à 50 km/h, la tolérance pourrait être de l'ordre de 15 km/h en cumulant le bénéfice de la compétence du chauffeur et les pondérations liées au manque de fiabilité de la technologie ; 5 km/h par pondération paraissent là encore tout à fait raisonnables. De l'ordre de 30 %, il n'y a aucune raison que cette tolérance ne sont pas étendue à toutes les autres vitesses autorisées. Ainsi pour aborder un virage que certains voient dangereux et qu'on n'autorise de ce fait  qu'à négocier à la vitesse de 70km/h, celle-ci pourrait être portée à 91 km/h. Il n'y a aucune raison que la même règle ne s'applique pas à la circulation sur les autoroutes, ainsi les 110 km/h autorisés par temps sec seraient portés à 144 km/h et les 130 km/h tolérés par temps de pluie à 169 km/h derechef.

Les véhicules ne disposant que d'un compteur de vitesse à aiguille et gradué de 5 km/h en 5 km/h verront de ce fait leurs vitesses autorisées arrondies à la cinquaine supérieure ; elles passeront ainsi respectivement à des tolérances de 95 km/h, 145 km/h et 170 km/h.

Se pose par ailleurs la délicate question des changements soudains et répétés des vitesses autorisées et à ne pas dépasser autant que possible. Le passage inopiné de 30 km/h à 50 km/h pour un retour tout à fait aussi impromptu à la première vitesse autorisée prend sans cesse le conducteur, même le plus respectueux des injonctions, à contre-pied. Sans que la merveille technologique qu'est le limiteur de vitesse désormais monté en série sur presque tous les véhicules n'en puisse mais. Il pourrait être décidé une fois pour toute de couper la poire en deux et de fixer à 40 km/h la vitesse supérieure en ville et à la marche à pied d'un pas de sénateur la vitesse inférieure.

Je vous vois froncer les sourcils et devine vos rides de la glabelle fleurir. Une réprobation naissante dans le regard, vous objectez : quid d'une distinction raisonnable entre pilote chevronné et conducteur du dimanche, espèces différentes que je logerais à la même enseigne ?

Bienveillance, mansuétude, efficacité et surtout clarté doivent être les maîtres mots d'une politique de la sécurité routière apaisée en matière de vitesse conseillée, autorisée et limitée. La question semble surtout se poser et devoir trouver une réponse rapide sur les autoroutes. Il suffira de réserver deux voies aux véhicules dont le compteur de vitesse est à aiguille et d'offrir à la circulation la voie de l'extrême gauche aux véhicules rouges. Dans le cas d'une 4 voies, par définition à chaussées séparées, la vitesse autorisée restera en l'état. À savoir, 110 km/h en temps normal, 100 km/h par temps de pluie et 50 km en cas de brouillard, avec réduction de la vitesse à 70 km/h puis peu à peu à une vitesse raisonnable obligatoire sur l'échangeur.

Toutes ces mesures entreront en vigueur à titre expérimental à compter du 1er juillet de l'année en cours. Il est donc donné un délai de deux mois aux automobilistes pour assimiler les mesures à venir et permettre aux services de police et de la gendarmerie nationale de s'en imprégner. Pendant cette période d'incubation et afin de faire une réinitialisation complète des esprits, les vitesses autorisées sont sans limites. Si, à l'issue de cette même période, le nombre d'accidents et de morts sur les routes a spectaculairement chuté, il n'y a plus lieu de mener l'essai expérimental évoqué précédemment et il peut même être sérieusement envisagé d'abandonner toute idée de limitation de vitesse.

Une expérimentation dans l'expérimentation verra le jour simultanément, mais les deux ne se cumuleront évidemment pas. Elle aura lieu dans cinq départements métropolitains choisis selon des critères de répartition géographique sur le territoire national, de densité de population et de quelques autres critères que les uns et les autres trouveront pertinents. Elle portera sur un thème tiré au sort en temps utile et le ministre délégué auprès du ministère de l'intérieur de France chargé de la citoyenneté sera chargé d'établir l'échantillon de départements, de la mise en oeuvre de l'expérience, de son suivi et de son évaluation. Dans l'hypothèse où le premier train de mesures expérimentales viendrait à être annulé, il va de soi que la seconde expérimentation n'aurait plus de raison d'être et serait de facto supprimée.

Toute mesure pour définir une vitesse autorisée moyenne et uniforme sur l'ensemble du réseau routier et s'appliquant aux véhicules indépendamment de leur couleur, de l'âge, du genre et de l'expérience des conducteurs ainsi que du mode d'acquisition, de financement ou de la cylindrée du véhicule, est définitivement abandonnée en raison d'une trop grande complexité de la mise en œuvre.

L'étude de l'accidentologie ferroviaire a  révélé qu'en cas de déraillement de train, c'est toujours dans le dernier wagon du convoi qu'il y a le plus de blessés et même de voyageurs tués. Instruite de ce résultat, la SNCF a pris par conséquent une mesure radicale ; elle a décidé la suppression du dernier wagon des trains circulant sur son réseau.

Il y a tout lieu de s'inspirer de l'expérience de la société des chemins de fer pour ce qui est de sa philosophie, de faire donc travailler ensemble pour ce faire les meilleurs spécialistes du café du commerce et des technocrates des administrations concernées.

Et c'est ainsi que Jupiter est grand.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.